LA VIE SORT DE LA MORT
Homme, pourquoi gémir devant la mort des feuilles
Et de ce que ton pied marche en sa vanité ?
Eh quoi ! n'as-tu jamais songé, quand tu les cueilles,
Que le charme des fleurs, c'est leur fragilité ?
Oui, tout paraît descendre aux entrailles de l'ombre.
La mort enlève à tout sa forme et sa couleur,
Non pas sa vie. Et toi, cœur aux désirs sans nombre,
Tu trouves l'espérance au fond de ta douleur.
La mort ne détruit pas : tout se transforme en elle.
La cendre des oiseaux ajoute à la forêt ;
Et le ver que l'oiseau becquète prend une aile
Et monte vers l'azur que son cœur désirait.
La neige qui des mains du ciel s'éboule et tombe
Efface les laideurs boueuses des étangs.
Des centaines de fleurs sortent de chaque tombe,
L'hiver à barbe blanche engendre le printemps.
Le cœur qui se flétri après bien des désastres,
Demain refleurira dans un nouvel amour.
L'ombre mourante éteint la douceur de ses astres,
Mais le soleil sourit dans le berceau du jour.
Et la cendre de l'homme et la cendre des choses
Se mêlent dans la mort profonde au ventre obscur,
Et sous le saint labeur de leurs métamorphoses
Rejaillissent de terre en gerbes de blé mûr.
C'est la morts des petits qui fait grande la vie.
L'arbre vieux qu'on abat, le vieillard qui s'endort,
Font la terra éclatante et plus jeune et ravie;
Et la Vie éternelle est debout sur la Mort.
LA VIDA SALE DE LA MUERTE
Hombre, ¿por qué dolerse de la muerte de las hojas,
y de lo que tu pie en su vanidad aplasta?
¡Y qué! ¿No has pensado alguna vez, al cortarlas,
que el encanto de las flores es su fragilidad?
Sí, todo parece descender a las entrañas de la sombra.
A todos despoja la muerte de su forma y su color,
pero no de su vida. Y tú, corazón de innúmeros deseos,
en el fondo del dolor hallas esperanza.
La muerte no destruye; en ella todo se transforma;
la ceniza de los pájaros se incorpora al bosque,
y el gusano que el pájaro arrebata toma alas
y se eleva hacia el azul que su corazón anhela.
De las manos del cielo la nieve se desploma y cae
y borra la fealdad barrosa del estanque.
Mil florecillas salen de cada tumba,
el invierno de blanca barba engendra la primavera.
Tras muchos desastres el corazón se derrumba y muere,
mas el amor puede sobrevivir al corazón que hizo el amor.
Agonizante, la sombra apaga la dulzura de sus astros,
pero en la cuna del día óyese un vagido del sol.
Y la ceniza del hombre y la ceniza de las cosas
se confunden en el vientre oscuro de la profunda muerte,
y por la santa labor de sus metamorfosis
irrumpen de la tierra en gavillas de maduro trigo.
De la muerte de los pequeños nace la vida inmensa.
El añoso árbol que abatimos, el anciano que se duerme,
hacen que la tierra resplandezca, más joven y arrebatadora;
y la Vida eterna está de pie sobre la Muerte.
Traducción de WILLIAM SHAND y ALBERTO GIRRI
Revista Sur nº 240, Buenos Aires, mayo y junio de 1956