Este año se han cumplido los 150 años de la muerte de Charles Baudelaire. En su homenaje, Ediciones De La Mirándola acaba de publicar Querida madre. Cartas a Madame Aupick 1860-1866, volumen que, sumado al anterior Querida mamá. Cartas a la madre 1834-1859, completa la edición integral, primera en lengua española, de las cartas que, durante largos años, Baudelaire escribió a su madre, principal confidente y sostén inconmovible de su breve y atormentada viva. Ambos volúmenes constituyen, en su conjunto, un testimonio indispensable para conocer más a fondo la singular aventura vital y espiritual del poeta. "De Maistre y Edgar Poe me enseñaron a razonar", dijo, memorablemente, Baudelaire. Ver también, a propósito del primero, la carta a Alphonse Toussenel. Las dos últimas entradas de este 2017 están dedicadas a estas dos grandes admiraciones de Baudelaire.
LA LOI DE LA GUERRE
Dans
le vaste domaine de la nature vivante, il règne une violence manifeste, une
espèce de rage prescrite qui arme tous les êtres in mutua funera : dès que vous sortez du règne insensible, vous
trouvez le décret de la mort violente écrit sur les frontières mêmes de la vie.
Déjà, dans le règne végétal, on commence à sentir la loi : depuis l'immense
catalpa jusqu'au plus humble graminée, combien de plantes meurent, et combien sont tuées ! mais, dès que vous entrez dans le
règne animal, la loi prend tout à coup une épouvantable évidence. Une force, à
la fois cachée et palpable, se montre continuellement occupée à mettre à
découvert le principe de la vie par des moyens violents. Dans chaque grande
division de l'espèce animale, elle a choisi un certain nombre d'animaux qu'elle
a chargés de dévorer les autres : ainsi, il y a des insectes de proie, des
reptiles de proie, des oiseaux de proie, des poissons de proie, et des
quadrupèdes de proie. Il n'y a pas un instant de la durée où l'être vivant ne
soit dévoré par un autre. Au-dessus de ces nombreuses races d'animaux est placé
l'homme, dont la main destructrice n'épargne rien de ce qui vit ; il tue pour
se nourrir, il tue pour se vêtir, il tue pour se parer, il tue pour attaquer,
il tue pour se défendre, il tue pour s'instruire, il tue pour s'amuser, il tue
pour tuer : roi superbe et terrible, il a besoin de tout, et rien ne lui
résiste. Il sait combien la tête du requin ou du cachalot lui fournira de
barriques d'huile ; son épingle déliée pique sur le carton des musées l'élégant
papillon qu'il a saisi au vol sur le sommet du Mont-Blanc ou du Chimboraço ; il
empaille le crocodile, il embaume le colibri ; à son ordre, le serpent à
sonnettes vient mourir dans la liqueur conservatrice qui doit le montrer intact
aux yeux d'une longue suite d'observateurs. Le cheval qui porte son maître à la
chasse du tigre, se pavane sous la peau de ce même animal ; l'homme demande
tout à la fois, à l'agneau ses entrailles pour faire résonner une harpe ; à la
baleine ses fanons pour soutenir le corset de la jeune vierge ; au loup, sa
dent le plus meurtrière pour polir les ouvrages légers de l'art ; à l'éléphant
ses défenses pour façonner le jouet d'un enfant : ses tables sont couvertes de
cadavres. Le philosophe peut même découvrir comment le carnage permanent est
prévu et ordonné dans le grand tout. Mais cette loi s'arrête-t-elle à l'homme ?
non sans doute. Cependant quel être exterminera celui qui les exterminera tous ?
Lui. C'est l'homme qui est chargé d'égorger l'homme. Mais comment pourra-t-il
accomplir la loi, lui qui est un être moral et miséricordieux : lui qui est né
pour aimer ; lui qui pleure sur les autres comme sur lui-même ; qui trouve du
plaisir à pleurer, et qui finit par inventer des fictions pour se faire pleurer
; lui enfin à qui il a été déclaré qu'on
redemandera jusqu'à la dernière goutte de sang qu'il aura versé injustement[1]
? C'est la guerre qui accomplira le décret. N'entendez-vous pas la terre qui
crie et demande du sang ? Le sang des animaux ne lui suffit pas, ni même celui
des coupables versé par le glaive des lois. Si la justice humaine les frappait
tous, il n'y aurait point de guerre ; mais elle ne saurait en atteindre qu'un
petit nombre, et souvent même elle les épargne, sans se douter que sa féroce
humanité contribue à nécessiter la guerre, si, dans le même temps surtout, un
autre aveuglement, non moins stupide et non moins funeste, travaillait à éteindre
l'expiation dans le monde. La terre
n'a pas crié en vain : la guerre s'allume. L'homme, saisi tout à coup d'une
fureur divine, étrangère à la haine
et à la colère, s'avance sur le champ de bataille sans savoir ce qu'il veut ni
même ce qu'il fait. Qu'est-ce donc que cette terrible énigme ? Rien n'est plus
contraire à sa nature ; et rien ne lui répugne moins : il fait avec
enthousiasme ce qu'il a en horreur. N'avez-vous jamais remarqué que, sur le
champ de bataille, l'homme ne désobéit jamais ? il pourra bien massacrer Nerva
ou Henri IV ; mais le plus abominable tyran, le plus insolent boucher de chair
humaine n'entendra jamais là : Nous ne
voulons plus vous servir. Une révolte sur le champ de bataille, un accord
pour s'embrasser en reniant un tyran, est un phénomène qui ne se présente pas à
ma mémoire. Rien ne résiste, rien ne peut résister à la force qui traîne
l'homme au combat ; innocent meurtrier, instrument passif d'une main
redoutable, il se plonge tête baissée
dans l'abîme qu'il a creusé lui-même ; il reçoit la mort sans ce douter que
c'est lui qui a fait la mort[2].
Ainsi
s'accomplit sans cesse, depuis le ciron jusqu'à l'homme, la grande loi de la
destruction violente des êtres vivants. La terre entière, continuellement
imbibée de sang, n'est qu'un autel immense où tout ce qui vit doit être immolé
sans fin, sans mesure, sans relâche, jusqu'à la consommation des choses,
jusqu'à l'extinction du mal, jusqu'à la mort de la mort[3].
Les Soirées de
Saint-Pétersbourg, Septième entretien.
Notes :
[1] Gen., IX, 5.
[2] Infixae sunt gentes in interitum quem fecerunt.
(Ps. IX, 16.)
[3] Car le
dernier ennemi qui doit être détruit, c'est la mort. (S. Paul aux Cor. I, 15,
26.)
LA LEY DE LA
GUERRA
En el vasto dominio de la naturaleza viviente, reina
una violencia manifiesta, una especie de furor prescrito, que arma a todos los
seres, in mutua funera[1]: en cuanto salimos
del reino insensible, nos encontramos con el decreto de la muerte violenta,
escrito en las fronteras mismas de la vida. Ya en el reino vegetal se comienza
a sentir la ley: desde el inmenso catalpa hasta la más humilde de la gramíneas,
¡cuántas plantas mueren, y a cuantas
se las mata! Pero en cuanto se entra en el reino animal, la ley toma enseguida
una espantosa evidencia. Una fuerza, a la vez oculta y palpable, se muestra
continuamente ocupada en dejar al descubierto el principio de la vida por
medios violentos. En cada gran división de la especie animal, aquélla ha
elegido un cierto número de animales a los que ha encargado de devorar a los
demás: es así como hay insectos de presa, reptiles de presa, pájaros de presa,
peces de presa y cuadrúpedos de presa. No hay un instante del tiempo en que un
ser viviente no sea devorado por otro. Por encima de esas numerosas razas de
animales está colocado el hombre, cuya mano destructora no perdona nada de
cuanto vive; mata para alimentarse, mata para vestirse, mata para engalanarse,
mata para atacar, mata para defenderse, mata para instruirse, mata para
divertirse, mata por matar; rey soberbio y terrible, necesita de todo y nada le
resiste. Sabe cuántos toneles de aceite le proporcionará la cabeza del tiburón
o de la ballena; su fino alfiler clava en el cartón de los museos la elegante mariposa
que ha cazado al vuelo en la cima del Mont-Blanc o del Chimborazo; embalsama el
cocodrilo; embalsama el colibrí; cuando lo ordena, la serpiente de cascabel va
a morir en el líquido conservante que debe mostrarla intacta a los ojos de una
larga serie de observadores. El caballo que lleva a su dueño a la caza del
tigre, se pavonea bajo la piel de ese mismo animal; el hombre exige, a la vez,
al cordero sus entrañas para hacer resonar un arpa; a la ballena sus barbas
para armar el corsé de la joven doncella; al lobo su diente más mortífero para
pulir las obras ligeras del arte; al elefante sus colmillos para moldear el
juguete de un niño: sus mesas están cubiertas de cadáveres. El filósofo puede incluso
descubrir de qué modo la matanza permanente está prevista y ordenada en la
totalidad de las cosas. ¿Pero esta ley sólo rige para el hombre? Sin duda, no. Entonces,
¿qué ser exterminará al que los exterminará a todos? Él mismo. Es el hombre el
que está encargado de matar al hombre. ¿Pero cómo podrá ejecutar esta ley, él
que es un ser moral y compasivo; él que ha nacido para amar; él que llora por los
demás como por sí mismo, que encuentra placer en llorar y que acaba por
inventar ficciones para que lloren por él; él, en fin, a quien se le ha declarado
que tendrá que responder hasta por la última gota de sangre que haya derramado injustamente?[2] Es la guerra la que ejecutará el
decreto. ¿No oyen ustedes la tierra que grita y pide
sangre? La sangre de los animales no le basta, ni siquiera la de los culpables
vertida por la espada de las leyes. Si la justicia humana los castigase a
todos, no habría guerras; pero solamente es capaz de alcanzar a un pequeño
número, e incluso a menudo los perdona, sin sospechar que su feroz humanidad
contribuye a hacer necesaria la guerra, sobre todo si, al mismo tiempo, otra
ceguera, no menos estúpida y no menos funesta, trabaja para acabar con la expiación
en el mundo. La tierra no ha gritado en vano: la guerra estalla. El
hombre, inflamado de repente con un furor divino, ajeno al odio y a la
cólera, se arroja al campo de batalla sin saber lo que quiere, ni siquiera lo
que hace. ¿Qué significa, pues, este terrible enigma? Nada hay más contrario a
su naturaleza, y nada le repugna menos: hace con entusiasmo lo que lo horroriza.
¿No han notado ustedes alguna vez que en el campo de batalla el hombre no
desobedece jamás? Podrá muy bien asesinar a Nerva o a Enrique IV; pero el más
abominable tirano, el más insolente carnicero de carne humana, no oirá jamás
allá: Ya no queremos servirte. Una rebelión en el campo de batalla, un
acuerdo para hacer las paces renegando del tirano, es un fenómeno que no se
presenta a mi memoria. Nada resiste, nada puede resistir a la fuerza que arrastra
al hombre al combate; inocente asesino, instrumento pasivo de una mano
terrible, se arroja de cabeza en el abismo que él mismo ha abierto;
recibe la muerte sin sospechar que es él mismo quien ha hecho la muerte.[3]
Así se cumple sin cesar, desde el insecto minúsculo hasta
el hombre, la gran ley de la destrucción violenta de los seres vivientes. La tierra
entera, continuamente empapada de sangre, no es más que un altar inmenso donde
todo lo que vive debe ser inmolado sin fin, sin medida, sin descanso, hasta la
consumación de las cosas, hasta la extinción del mal, hasta la muerte de la
muerte.[4]
Notas:
[1] Posible reminiscencia de un verso de la Eneida: Jam gravis aequabat luctus et
mutua Mavors / Funera. Ya el terrible Marte tornaba iguales para ambas
partes los duelos y las muertes.
[2] Génesis
IX 5.
[3] Infixae sunt
gentes in interitum quem fecerunt. (Ps. IX, 16.) “Las gentes que me perseguían han quedado sumidas en la perdición
que habían preparado contra mí” (traducción
de Torres Amat).
[4] 1 Corintios XV 26. “Y el postrer enemigo que
será deshecho, será la muerte” (Versión Reina-Valera).