lunes, 27 de abril de 2020

Francis Jammes: Silencio

SILENCIO

Silencio. Luego una golondrina en un postigo
hace un sonido de cielo en el aire fresco y azulado,
sola. Luego dos cascos pasan despacio por la calle.

El campo luce pálido, pero en el cielo gris que cambia
ya se percibe el azul que ha de entibiar el día.
Pienso en los amores de otros tiempos, en los amores
de los que vivían en los parques de los países hermosos
llenos de viñas, de trigo, de heno y de maíz. 
Los pavos reales azules se agitaban en los verdes prados,
y las hojas verdes se reflejaban en los cristales verdes
en el despertar del cielo que se había vuelto verde.
Las cadenas en el establo donde la sombra estaba abierta
producían un ruido tembloroso de entrechocar de vasos.
Pienso en el viejo castillo de la finca,
en los cazadores que salían en las mañanas de verano,
en los ladridos largos de los perros rastreadores que avanzan arrastrándose...
En la enorme escalera encerada estaba la barandilla.
Alta era la puerta, desde la cual los recién casados,
al escuchar que se iban los abuelos, se reían,
se abrazaban y unían sus hermosos labios,
mientras que en las madrigueras de plata temblaban las liebres.

Qué hermosos eran esos tiempos en que los muebles Imperio
brillaban con el lustre y las manijas de bronce...
Era algo encantador, muy feo y simétrico
como el sombrero de Napoleón primero.

Pienso también en las tardes en que las niñas
jugaban al volante cerca de la alta reja.
Llevaban pantalones que iban más abajo
de sus vestidos decorosos y les llegaban a los pies:
Herminie, Coralie, Clémence, Célanire,
Aménaïde, Athénaïs, Julie, Zulmire;
sus grandes sombreros de paja tenían largas cintas.
De pronto, un pavo real azul se encaramaba en un banco.
Una raqueta lanzaba un último volante
que iba a morir en la noche que dormía entre las hojas,
mientras se oía el retumbar de la tormenta en ciernes.



SILENCE

Silence. Puis une hirondelle sur un contrevent
fait un bruit d’azur dans l’air frais et bleuissant,
toute seule. Puis deux sabots traînassent dans la rue.

La campagne est pâle, mais au ciel gris qui remue
on voit déjà le bleu qui chauffera le jour.
Je pense aux amours des vieux temps, aux amours
de ceux qui habitaient aux parcs des beaux pays
riches en vigne, en blé, en foin et en maïs.
Les paons bleus remuaient sur les pelouses vertes,
et les feuilles vertes se miraient aux vitres vertes
dans le réveillement du ciel devenu vert.
Les chaînes dans l’étable où l’ombre était ouverte
avaient un bruit tremblé de choquement de verres.
Je pense au vieux château de la propriété,
aux chasseurs s’en allant par les matins d’été,
aux aboiements longs des chiens flaireurs qui rampent...
Dans l’énorme escalier cirée était la rampe.
La porte était haute d’où les jeunes mariés,
en écoutant partir les grands-pères, riaient,
s’entrelaçaient et joignaient leurs jolies lèvres,
pendant que tremblaient, aux gîtes d’argent, les lièvres.

Que ces temps étaient beaux où les meubles-Empire
luisaient par le vernis et les poignées de cuivre...
Cela était charmant, très laid et régulier
comme le chapeau de Napoléon premier.

Je pense aussi aux soirées où les petites filles
jouaient aux volants près de la haute grille.
Elles avaient des pantalons qui dépassaient
leurs robes convenables et atteignaient leurs pieds:
Herminie, Coralie, Clémence, Célanire,
Aménaïde, Athénaïs, Julie, Zulmire;
leurs grands chapeaux de paille avaient de longs rubans.
Tout à coup un paon bleu se perchait sur un banc.
Une raquette lançait un dernier volant
qui mourait dans la nuit qui dormait aux feuillages,
pendant qu’on entendait un roulement d’orage.