CARTA A MADAME AUPICK
26 de marzo de
1860.
¡Bueno, querida madre!, tengo que darte otro
disgusto. Mañana 27, y el 1 de abril, llegarán dos nuevos pagarés a Honfleur.
(LOS ÚLTIMOS. Desde que me lo prohibiste, no he hecho otros). NO QUIERO, ni
aunque tú lo quisieras, que te sacrifiques por mí. El que te dirijo es un ruego
absolutamente sincero. No quiero, no puedo, sin estremecerme, pensar en lo que
me escribiste hace poco: Charles, aunque seas bueno y puedas ganar dinero, temo
que me lleves a la ruina. —Ahora sabes que cuando el retraso es de sólo 3 o 4
días, no puede haber escándalo. Te doy mi palabra de honor que no he cobrado ni
los 400 francos ni los 500 que espero desde hace dos meses. Pero esta vez el
dinero saldrá de un lugar más serio, de La
Presse. Te escribiré sin falta pasado mañana para tranquilizarte. Anota
cuidadosamente el apellido y la dirección del oficial de justicia o de la
persona que tiene el papel en cuestión. —Con La Presse hemos convenido que siempre me pagarán antes de imprimir.
Te ruego encarecidamente que seas indulgente,
piensa que sufro grandes dolores y que tengo un espíritu enfermizo. No me
envíes uno de esos torrentes de reproches que me hacen tanto daño, a mí, a
quien crees insensible; y además, no quiero que tengas dolores de estómago ni
insomnio. Ya que esta borrasca de tres meses se va a terminar. No puedes
imaginarte las preocupaciones que me causas diciéndome esas cosas. Entonces me
pongo a temblar y, a veces porque temo tus reproches, a veces porque me da
miedo recibir malas noticias sobre tu salud, no me atrevo a abrir tus cartas.
Frente a una carta no soy valiente.
Si supieras qué pensamientos son mi pan
cotidiano: el miedo a morirme antes de hacer lo que tengo que hacer; el miedo a
que tú te mueras antes de haberte hecho completamente feliz, a ti, el único ser
con el que puedo vivir apaciblemente, sin ardides, sin mentiras; el horror que
me inspira mi tutela judicial (hay que decirlo con todas las letras) y que me
tortura noche y día; por último, y esto es quizás más triste que todo lo demás,
el miedo a no poder curarme nunca de mis vicios. Éstos son mis pensamientos
habituales. ¡Y cuando me despierto, por la mañana, enfrentado a estas tristes
realidades: mi nombre, mi pobreza, etc.!…
He tomado una decisión absoluta: después de
la primera semana de abril, es decir en Pascuas, o después de Pascuas, haya o
no terminado lo que me queda por hacer, haya o no resuelto la cuestión del
drama (ya que estoy empecinado), tenga o no en el bolsillo tus 800 francos, me
voy. Y por fin estaré, no feliz, eso es imposible, sino lo bastante tranquilo
para dedicar el día entero al trabajo y la tarde entera a entretenerte y
hacerte la corte.
¿Has recibido una carta (muy breve) en la que
te hablaba de tu chal, y, el mismo día, un paquete de té, que es, creo,
justamente el que te gustaría tener? En cuanto a tu chal, me sentí tan
emocionado, tan conmovido, que nunca pude resignarme a venderlo; lo empeñé con
la esperanza de recuperarlo más tarde, y con el dinero que me prestaron (250)
me vestí de pies a cabeza.
Esto es el comienzo de una serie de artículos
críticos, todos terminados, que irán más tarde a mi 4° volumen para la
editorial de Malassis. Recibirás sucesivamente ocho galeradas como éstas.
Quizás haya nuevas poesías mías en la Revue contemporaine el 1 de abril. En La Presse aparecerán sucesivamente 9 o
10 crónicas de bellas artes.
Adiós.
Mañana a las nueve de la mañana no podré pensar sin tristeza que estás leyendo
mi carta.
CHARLES.
Los Paraísos ya se están imprimiendo. Y luego vendrán Las Flores.
Charles Baudelaire -Querida mamá-
Traducción, prólogo y notas de
Ediciones De La Mirándola, enero de 2019.
26 mars 1860.
Allons
! ma chère mère, il faut encore que je t’afflige. Demain 27, et le Ier avril,
il y aura deux billets nouveaux qui tomberont à Honfleur. (LES DERNIERS. Depuis
ta défense je n’en ai pas fait d’autres.) JE NE VEUX PAS, quand même tu le voudrais,
que tu te saignes pour moi. C’est une prière absolument sincère que je t’adresse.
Je ne veux pas, je ne puis pas, sans un frisson, penser à ce que tu m’as écrit
récemment : Charles, malgré que tu sois bon et que tu puisses gagner de l’argent,
j’ai peur que tu ne me ruines. — Tu sais maintenant que quand le retard n’est
que de 3 ou 4 jours, il ne peut pas y avoir de scandale. Je te donne ma parole d’honneur
que je n’ai touché ni les 400 fr. ni les 500 que j’attends depuis deux mois.
Mais cette fois l’argent viendra d’un endroit plus sérieux, de la Presse.
Je t’écrirai sans faute après-demain pour te rassurer. Prends soigneusement le
nom et l’adresse de l’huissier, ou de la personne qui détient le papier en
question. — II est convenu avec la Presse que je serai toujours payé avant
l’impression.
Je
t’en supplie très ardemment, sois indulgente, songe que je souffre de grandes
douleurs, et que mon esprit est malsain. Ne m’envoie pas un de ces torrents de
reproches qui me font tant de mal, à moi que tu crois insensible; et puis je ne
veux pas que tu aies des maux d’estomac ni des insomnies. Car cette bourrasque
de trois mois va finir. Tu ne peux pas t’imaginer les inquiétudes que tu me
causes en me disant ces choses-là. Alors je me mets à trembler, et tantôt par
la crainte de tes reproches, tantôt par la peur d’apprendre sur ta santé des
nouvelles affligeantes, je n’ose pas décacheter tes lettres. Devant une lettre
je ne suis pas brave.
Si
tu savais de quelles pensées je me nourris : la peur de mourir avant d’avoir
fait ce que j’ai à faire; la peur de ta mort avant que je t’aie rendue absolument
heureuse, toi le seul être avec lequel je puisse vivre doucement, sans ruses,
sans mensonge; l’horreur de mon conseil judiciaire (il faut bien prononcer ce
mot) qui me torture jour et nuit; enfin, et ceci est peut-être plus triste que
le reste, la peur de ne pouvoir jamais me guérir de mes vices. Voilà mes
pensées habituelles. Et mon réveil, le matin ! en face de ces tristes réalités
: mon nom, ma pauvreté, etc !...
J’ai
pris une décision absolue : après la première résolu la question du drame (car
je me suis entêté), que j’aie ou que je n’aie pas tes 800 fr. dans ma poche, je
pars. Et enfin je serai, non pas heureux, c’est impossible, mais assez tranquille
pour consacrer toute ma journée au travail et toute ma soirée à te divertir et
à te faire ma cour.
As-tu
reçu une lettre (très courte) où je parlais de ton châle, et dans la même
journée un paquet de thé, qui est, je croîs, celui que tu désirerais avoir ?
Pour ton châle, j’ai été si ému, si touché, que je n’ai jamais pu me résigner à
le vendre ; je l’ai engagé avec l’espoir de le retrouver plus tard, et avec l’argent
qui m’a été prêté (250) je me suis complètement habillé.
Ceci
est le commencement d’une série d’articles critiques, tous finis, qui entreront
plus tard dans mon 4e volume pour la maison Malassis.Tu recevras successivement
huit placards comme celui-ci.
Il
y aura sans doute des poésies nouvelles de moi dans la Revue contemporaine le 1er avril. À la Presse, il paraîtra
successivement 9 ou 10 feuilletons sur les Beaux-Arts.
Adieu.
J e ne pourrai pas demain à neuf heures du matin, penser sans tristesse que tu
lis ma lettre.
CHARLES.
Les Paradis s’impriment. Et
puis viendront Les Fleurs.