martes, 10 de enero de 2017

Stéphane Mallarmé y Federico Gorbea: Las ventanas

LES FENÊTRES

Las du triste hôpital, et de l'encens fétide
Qui monte en la blancheur banale des rideaux
Vers le grand crucifix ennuyé du mur vide,
Le moribond sournois y redresse un vieux dos,

Se traîne et va, moins pour chauffer sa pourriture
Que pour voir du soleil sur les pierres, coller
Les poils blancs et les os de la maigre figure
Aux fenêtres qu'un beau rayon clair veut hâler,

Et la bouche, fiévreuse et d'azur bleu vorace,
Telle, jeune, elle alla respirer son trésor,
Une peau virginale et de jadis ! encrasse
D'un long baiser amer les tièdes carreaux d'or.

Ivre, il vit, oubliant l'horreur des saintes huiles,
Les tisanes, l'horloge et le lit infligé,
La toux; et quand le soir saigne parmi les tuiles,
Son œil, à l'horizon de lumière gorgé,

Voit des galères d'or, belles comme des cygnes,
Sur un fleuve de pourpre et de parfums dormir
En berçant l'éclair fauve et riche de leurs lignes
Dans un grand nonchaloir chargé de souvenir !

Ainsi, pris du dégoût de l'homme à l'âme dure
Vautré dans le bonheur, où ses seuls appétits
Mangent, et qui s'entête à chercher cette ordure
Pour l'offrir à la femme allaitant ses petits,

Je fuis et je m'accroche à toutes les croisées
D'où l'on tourne l'épaule à la vie, et, béni,
Dans leur verre, lavé d'éternelles rosées
Que dore le matin chaste de l'Infini

Je me mire et me vois ange ! et je meurs, et j'aime
- Que la vitre soit l'art, soit la mysticité
A renaître, portant mon rêve en diadème,
Au ciel antérieur où fleurit la Beauté !

Mais, hélas ! Ici-bas est maître : sa hantise
Vient m'écœurer parfois jusqu'en cet abri sûr,
Et le vomissement impur de la Bêtise
Me force à me boucher le nez devant l'azur.

Est-il moyen, ô Moi qui connais l'amertume,
D'enfoncer le cristal par le monstre insulté
Et de m'enfuir, avec mes deux ailes sans plume
- Au risque de tomber pendant l'éternité ?

LAS VENTANAS

HARTO del triste hospital y del fétido incienso
Que sube por la blancura vulgar de las cortinas
A la gran cruz tediosa de la pared vacía,
El falso moribundo levanta su espalda envejecida.

Se arrastra y va, no para calentar su podre,
Sino para ver el sol en las piedras, a pegar
Los blancos pelos, los huesos de su cara chupada
A las ventanas que un rayo quisiera broncear

Y su boca, febril, voraz de azul de cielo
—La misma que, de joven, respiró su tesoro:
Una piel virginal y del pasado— ahora engrasa
Con largo beso amargo los tibios vidrios de oro.

Ebrio, vive, olvidando el horror de los santos
óleos, del reloj, la tisana y la cama obligada,
De la tos... Y cuando en los tejados la tarde sangra,
Sus ojos, en el horizonte saturado de luz,

Ve galeras doradas, hermosas como cisnes.
Que duermen en un río de púrpura y perfumes
Meciendo el rico brillo leonado de sus líneas,
¡En toda una indolencia cargada de recuerdos!

Así, de pronto asqueado del hombre de alma dura,
Revolcándose en la dicha donde sólo sus apetitos
Comen, y que insiste en buscar esa basura para
Brindársela a la mujer que amamanta sus hijos,

Huyo, me aferro a todas las ventanas contra
Las que uno queda de espaldas a la vida... Y bendito,
En su vidrio que lavan eternales rocíos
Y que dora la mañana del Infinito,

Me miro, ángel me veo, y muero, y quiero
—¡Sea este vidrio el Arte, sea el misticismo!—
Renacer llevando mi sueño como una diadema
Al cielo anterior donde florece la Belleza.

Pero, ¡ay!, el Aquí abajo reina: su obsesión
Me suele perseguir incluso en este refugio,
Y el impuro vómito de la Imbecilidad
Me fuerza frente al cielo, a taparme la nariz.

¿Hay algún medio, oh Yo, que de amarguras sabes,
De romper este cristal por el monstruo insultado
Y de huir por fin con mis dos alas implumes
—A riesgo de caer durante la eternidad?
Traducción de FEDERICO GORBEA.