sábado, 31 de diciembre de 2011

Saint-Simon: Fortuna y muerte de La Vauguyon.



Fortune et mort de La Vauguyon
(1693)

Un autre évènement surprit moins qu'il ne fit admirer les fortunes. Le dimanche 29 novembre, le Roi, sortant du salut, apprit par le baron de Beauvais que La Vauguyon s'était tué le matin de deux coups de pistolets dans son lit, qu'il se donna dans la gorge, après s'être défait de ses gens sous prétexte de les envoyer à la messe. Il faut dire un mot de ces deux hommes. La Vauguyon était un des plus petits et des plus pauvres gentilshommes de France: son nom était Bétoulat, et il porta le nom de Fromenteau. C'était un homme parfaitement bien fait, mais plus que brun, et d'une figure espagnole; il avait de la grâce, une voix charmante qu'il savait très bien accompagner du luth et de la guitare; avec cela le langage des femmes, de l'esprit, et insinuant. Avec ces talents et d'autres plus cachés, mais utiles à la galanterie, il se fourra chez Mme de Beauvais, première femme de chambre de la Reine mère et dans sa plus intime confidence, et qui à tout le monde faisait d'autant plus la cour qu'elle ne s'était pas mise moins bien avec le Roi, dont elle passait pour avoir eu le pucelage. Je l'ai encore vue, vieille, chassieuse et borgnesse, à la toilette de Mme la dauphine de Bavière, où toute la cour lui faisait merveilles, parce que de temps en temps elle venait à Versailles, où elle causait toujours avec le Roi en particulier, qui avait conservé beaucoup de considération pour elle. Son fils, qui s'était fait appeler le baron de Beauvais, avait la capitainerie des plaines d'autour de Paris. Il avait été élévé, au subalterne près, avec le Roi. Il avait été de ses ballets et de ses parties, et, galant, hardi, bien fait, soutenu par sa mère et par un goût personnel du Roi, il avait tenu son coin, mêlé avec l'élite de la cour, et depuis traité du Roi toute sa vie avec une distinction qui le faisait craindre et rechercher. Il était fin courtisan et gâté, mais ami à rompre des glace auprès du Roi avec succès, et ennemi de même; d'ailleurs honnête homme, et toutefois respectueux avec les seigneurs. Je l'ai vu encore donner les modes. Fromentau se fit entretenir par la Beauvais, et elle le présentait à tout ce qui venait chez elle, qui, là et ailleurs, pour lui plaire, faisait accueil au godelureau. Peu à peu elle le fit entrer chez la Reine mère, puis chez le Roi, et il devint courtisan par cette protection. De là el s'insinua chez les ministres. Il montra de la valeur, volontaire à la guerre, et enfin il fut employé auprès de quelques princes d'Allemagne.Peu à peu il s'éleva jusqu'au caractère d'ambassadeur en Danemark, et il alla après ambassadeur en Espagne. Partout on en fut content, et le Roi lui donna une des trois places de conseiller d'Etat d'épée, et au scandale de sa cour le fit chevalier de l'Ordre en 1688. Vingt ans auparavant il avait épousé la fille de Saint-Maigrin dont j'ai parlé ci-devant à propos du voyage qu'il fit à Blaye de la part de la cour, pendant les guerres de Bordeaux, auprès de mon père; ainsi je n'ai pas besoin de répéter qui elle était, sinon qu'elle était veuve avec un fils de Monsier de Broutay, du nom de Quelen, et que cette femme était la laideur même. Par ce mariage, Fromentau s'était seigneurifié, et avait pris le nom de comte de La Vauguyon. Tant que les ambassades durèrent et que le fils de sa femme fut jeune, il eut de quoi vivre; mais, quand la mère se vit obligée de compter avec son fils, ils se trouvèrent réduits fort à l'étroit. La Vauguyon, comblé d'honneurs bien au delà de ses espérances, représenta souvent au Roi le misérable état de ses affaires, et n'en tirait que de rares et très médiocres gratifications. La pauvreté peu à peu lui tourna la tête, mais on fut très longtemps sans s'en apercevoir. Une des premières marques qu'il en donna fut chez Mme Pellot, veuve du premier président du parlement de Rouen, qui avait tous soirs un souper et un jeu, uniquement pour ses amis en petit nombre. Elle ne voyait que fort bonne compagnie, et La Vauguyon y était presque tous les soirs. Jouant au brelan, elle lui fit un renvi, qu'il ne tint pas. Elle l'en plaisanta et lui dit qu'elle était bien aise de voir qu'il était un poltron. La Vauguyon ne répondit mot; mais, le jeu fini, il laissa sortir la compagnie, et, quand il se vit seul avec Mme Pellot, il ferma la porte au verrou, enfonça son chapeau dans sa tête, l'accula contre sa cheminée, et, lui mettant la tête entre ses deux poings, lui dit qu'il ne savait ce qui le tenait qu'il ne la lui mit en compote pour lui apprendre à l'appeler poltron. Voilà une femme bien effrayée, qui entre ses deux poings lui faisait des révérences perpendiculaires et des compliments tant qu'elle pouvait, et l'autre toujours en furie et en menaces. A la fin, il la laissa plus morte que vive et s'en alla. C'était une très bonne et très honnête femme, qui défendit bien à ses gens de la laisser seule avec La Vauguyon, mais qui eut la générosité de lui en garder le secret jusqu'après sa mort, et de le recevoir chez elle à l'ordinaire, où il retourna comme si de rien n'eût été. Longtemps après, rencontrant sur les deux heures après midi M. de Courtenay dans ce passage obscur à Fontainebleau, qui, du salon d'en haut devant la tribune, conduit à une terrasse le long de la chapelle, il lui fit mettre l'épée à la main, quoique l'autre lui pût dire sur le lieu où ils étaient, et sans avoir jamais eu occasion ni apparence de démêlé. Au bruit des estocades, des passants dans ce grand salon accoururent et les séparèrent, et appelèrent des Suisses de la salle des gardes de l'ancien appartement de la Reine mère, où il y en avait toujours quelques-uns, et qui donnait dans le salon. La Vauguyon, dès lors chevalier de l'Ordre, se débarrassa d'eux et courut chez le Roi, tourne la clef du cabinet, force l'huissier, entre, et se jette aux pieds du Roi, en lui disant qu'il venait lui apporter sa tête. Le Roi, qui sortait de table, chez qui personne n'entrait jamais que mandé, et qui n'aimait pas les surprises, lui demanda avec émotion à qui il en avait. La Vauguyon, toujours à genoux, lui dit qu'il a tiré l'épée dans sa maison, insulté par M. de Courtenay, et que son honneur a été plus fort que son devoir. Le Roi eut grand-peine à s'en débarrasser et dit qu'il verrait à éclaircir cette affaire, et, un moment après, les envoya arrêter tous deux par des exempts du grand prévôt et mener dans leurs chambres. Cependant on amena deux carrosses, qu'on appelait de la Pompe, qui servaient à Bontemps et à divers usages pour le Roi, qui étaient à lui, mais sans armes, et avaient leurs attelages. Les exempts qui les avaient arrêtés les mirent chacun dans un de ces carrosses, et l'un deux avec chacun, et les conduisirent à Paris à la Bastille, où ils demeurèrent sept ou huit mois, avec permission au bout du premier mois d'y voir leurs amis, mais traités tous deux en tout avec une égalité entière. On peut croire le fracas d'une telle aventure: personne n'y comprenait rien. Le prince de Courtenay était un fort honnête homme, brave, mais doux, et qui n'avait de sa vie eu querelle avec personne. Il protestait qu'il n'en avait aucune avec La Vauguyon, et qu'il l'avait attaqué et forcé de mettre l'épée la main pour n'en être pas insulté. D'autre part, on ne se doutait point encore de l'égarement de La Vauguyon. il protestait de même que c'était l'autre qui l'avait attaqué et insulté. On ne savait donc qui croire ni que penser. Chacun avait ses amis, mais personne ne put goûter l'égalité si fort affectée en tous les traitements faits à l'un et à l'autre. Enfin, faute de meilleur éclaircissement et la faute suffisamment expiée, ils sortirent de prison, et peu après reparurent à la cour. Quelque temps après, une nouvelle escapade mit les choses plus au net. Allant à Versailles, La Vauguyon rencontre un palefrenier de la livrée de Monsieur le Prince, menant un cheval de main tout sellé, allant vers Sèvres et vers Paris. Il arrête, l'appelle, met pied à terre, et demande à qui est le cheval. le palefrenier répond qu'il est à Monsieur le Prince. La Vauguyon lui dit que Monsieur le Prince ne trouvera pas mauvais qu'il le monte, et saute en même temps dessus. Le palefrenier, bien étourdi, ne sait que faire à un homme à qui il voit un cordon bleu par-dessus son habit et sortant de son équipage, et le suit. La Vauguyon prend le petit galop jusqu'à la porte de la Conférence, gagne le rempart et va mettre pied à terre à la Bastille, donne pour boire au palefrenier et le congédie. Il monte chez le gouverneur, à qui il dit qu'il a eu le malheur de déplaire au Roi et qu'il le prie de lui donner une chambre. Le gouverneur, bien surpris, lui demande à son tour à voir l'ordre du Roi, et, sur ce qu'il n'en a point, plus étonné encore, résiste à toutes ses prières, et par capitulation le garde chez lui en attendant réponse de Pontchartrain à qui il écrit par un exprès. Pontchartrain en rend compte au Roi, qui ne sait ce que cela veut dire; et l'ordre vient au gouverneur de ne point recevoir La Vauguyon, duquel malgré cela il eut encore toutes les peines du monde à se défaire. Ce trait et cette aventure du cheval de Monsieur le Prince fit grand bruit et éclaircit fort celle de M. de Courtenay. Cependant le Roi fit dire à La Vauguyon qu'il pouvait reparaître à la cour, et il continua d'y aller comme il allait auparavant; mais chacun l'évitait, et on avait grand peur de lui, quoique le Roi par bonté affectât de le traiter bien. On peut juger que ces dérangements publics n'étaient pas sans d'autres domestiques, qui demeuraient cachés le plus qu'il était possible. Mais ils devinrent si fâcheux à sa pauvre femme, bien plus vieille que lui et fort retirée, qu'elle prit le parti de quitter Paris et de s'en aller dans ses terres. Elle n'y fut pas bien longtemps, et y mourut tout à la fin d'octobre, à la fin de cette année. Ce fut le dernier coup qui acheva de faire tourner la tête à son mari: avec sa femme il perdait toute sa subsistance; nul bien de soi et très peu du Roi. Il ne la survécu que d'un mois. Il avait soixante-quatre ans, près de vingt ans moins qu'elle, et n'eut jamais d'enfants. On sut que les deux dernières années de sa vie il portait des pistolets dans sa voiture et en menaçait souvent le cocher ou le postillon, en joue, allant et venant de Versailles. ce qui est certain, c'est que, sans le baron de Beauvais qui l'assistait de sa bourse et prenait fort soin de lui, il se serait souvent trouvé aux dernières extrémités, surtout depuis le départ de sa femme. Beauvais en parlait souvent au Roi, et il est inconcevable qu'ayant élevé cet homme au point qu'il l'avait fait, et lui ayant toujours témoigné une bonté particulière, il l'ait persévéramment laissé mourir de faim et devenir fou de misère.


LOUIS DE ROUVROY, duque de SAINT-SIMON.







Fortuna y muerte de La Vauguyon
 Crónicas del año 1693.

Otro acontecimiento sorprendió menos que lo que hizo admirar las distintas fortunas. El domingo 29 de de noviembre, el Rey al salir de la ceremonia del saludo supo, gracias al barón de Beauvais, que La Vauguyon se había matado en la cama de dos tiros de pistola en la garganta, después de haberse librado de sus domésticos con el pretexto de enviarlos a la misa. Es necesario decir unas palabras acerca de estos dos hombres. La Vauguyon era uno de los más pequeños y de los más pobres nobles de Francia: su nombre era Bétoulat, y él se adjudicó el nombre de Fromentau. Era un hombre perfectamente bien hecho, pero más que moreno, y de tipo español; poseía gracia, una voz encantadora que sabía acompañar muy bien con el laúd o la guitarra; aunado a ello, el lenguaje de las mujeres, no carente de ingenio, e insinuante. Con estos talentos y con otros más ocultos, pero útiles para la galantería, se introdujo en la casa de Madame de Beauvais, primera camarista de la reina madre y en su más íntima confidencia, y que trataba tanto más de conquistarse a todo el mundo que no lo había hecho menos con el Rey de quien se decía había sido la primera amante. Yo la he visto aún, vieja, legañosa y tuerta, en el despertar de la Señora Delfina de Baviera, donde toda la corte se comportaba con ella maravillosamente, ya que de tiempo en tiempo venía a Versalles donde siempre conversaba en privado con el Rey quien había conservado mucha consideración por ella. Su hijo, que se había hecho llamar el barón de Beauvais, tenía la capitanería de las llanuras que rodean París. Había sido educado, salvo en lo que concernía a su condición de subalterno, junto con el Rey. Había formado parte de sus bailes y de sus fiestas, y galante, audaz, bien proporcionado, sostenido por su madre y por un gusto personal del Rey, sabía emplear las palabras justas, mezclado con la élite de la corte, y tratado desde entonces por el Rey durante toda su vida con una distinción tal que hacía que se le temiese y se buscase su compañía. Era un cortesano sutil y mimado pero amigo de romper lanzas con éxito delante del Rey, y enemigo de la misma manera; hombre correcto, por otra parte, y respetuoso no obstante con los señores. Yo le he visto todavía imponiendo las modas. Fromentau se hizo mantener por la Beauvais, y ésta lo presentaba a todos los que venían a verla, los cuales, allí y en cualquier parte, a fin de complacerla, daban buena acogida al barbilindo. Poco a poco lo introdujo en el círculo de la Reina madre, luego en el del Rey, y él se volvió cortesano con tal protección. A partir de allí se introdujo entre los ministros. Voluntario en la guerra, demostró que tenía valor, y al fin se le dio un empleo en las cortes de algunos príncipes de Alemania. Poco a poco se elevó hasta la calidad de embajador en Dinamarca, y luego fue como embajador a España. En todas partes satisfizo, y el Rey le dio uno de los tres puestos de consejero de Estado de espada y, con escándalo de la Corte, lo hizo caballero de la Orden en 1688. Veinte años antes se había casado con la hija de Saint-Maigrin del cual ya he hablado aquí a propósito del viaje que éste hizo a Blaye de parte de la Corte, durante las guerras de Burdeos, junto con mi padre; de esta manera no me veo en la necesidad de repetir quién era ella, solamente que había quedado viuda con un hijo de Monsieur de Broutay, de nombre Quelen, y que esta mujer era la fealdad misma. Gracias a este matrimonio, Fromenteau se había enseñorificado y había tomado el nombre de conde de La Vauguyon. Mientras duraron las embajadas y el hijo de su mujer fue joven, tuvo de qué vivir; pero cuando la madre se vio obligada a contar con su hijo, se encontraron reducidos de manera bien estrecha. La Vauguyon, colmado de honores mucho más allá de sus esperanzas, le hizo ver a menudo al Rey el estado miserable de sus asuntos, y de ello no obtenía sino poco habituales y mediocres gratificaciones. Poco a poco la pobreza le trastornó la cabeza, pero durante mucho nadie se dio cuenta. Una de las primeras pruebas que dio de ello ocurrió en la casa de Madame Pellot, viuda del primer presidente del parlamento de Ruán, que ofrecía todas las noches una cena y un juego, únicamente para sus amigos en pequeño número. No recibía sino muy buena compañía, y La Vauguyon estaba allí casi todas las noches. Jugando al brelán, Madame Pellot subió la apuesta y él no quiso aceptarla. Ella se burló y le dijo que estaba contenta de ver lo pusilánime que él era. La Vauguyon no respondió ni una palabra; pero, terminado el juego, dejó irse la compañía, y, cuando se vio a solas con Madame Pellot, echó cerrojo a la puerta, se hundió el sombrero en la cabeza, la arrinconó contra la chimenea, y metiéndole la cabeza entre sus dos puños le dijo que no sabía qué era lo que le impedía dejarla hecha una compota para que aprendiese así a llamarlo pusilánime. He aquí una mujer bien asustada que entre dos puños le hacía reverencias perpendiculares y cumplidos tanto como podía, y el otro siempre con furia y con amenazas. Al fin la dejó más muerta que viva y se fue. Era una muy buena y muy correcta mujer que prohibió totalmente a sus domésticos dejarla a solas con La Vauguyon, pero que tuvo la generosidad de guardar la cosa en secreto hasta después de su muerte, y de recibirlo en su casa como de costumbre, adonde él volvió como si nada hubiese pasado. Mucho tiempo después, encontrando hacia las dos de la tarde a Monsieur de Courtenay en ese pasaje obscuro de Fontainebleau que, del salón de arriba delante de la tribuna, conduce a una terraza a lo largo de la capilla, lo obligó a echar mano a la espada sin importarle lo que el otro pudiera decirle del lugar donde se encontraban, y sin haber tenido jamás ocasión o apariencia de disputa. Con el ruido de las estocadas, los que pasaban por aquel gran salón acudieron y los separaron, y llamaron a los suizos de la sala de guardia del antiguo apartamento de la Reina madre donde siempre se encontraban algunos, y que comunicaba con el salón. La Vaguyon que ya era caballero de la Orden, se desembarazó de ellos y corrió hasta los apartamentos del Rey, hace girar la llave del gabinete, empuja al portero, entra, y se arroja a los pies del Rey diciéndole que venía a entregarle su cabeza. El Rey que acababa de levantarse de la mesa, en las habitaciones del cual nadie entraba sin ser llamado, y al que no le gustaban las sorpresas, le preguntó conmovido con quién tenía problemas. La Vaguyon, siempre de rodillas, le dijo que había desenvainado la espada en su casa habiendo sido insultado por Monsieur de Courtenay, y que su honor fue más fuerte que su deber. Al Rey le costó mucho librarse de él y dijo que haría aclarar el asunto y, luego de un momento, ordenó que fueran arrestados ambos por los oficiales del gran preboste y confinados en sus habitaciones. Mientras tanto trajeron dos carrozas, de las conocidas como de la calle de La Pompe, que Bontemps usaba y que servían para distintos usos para el Rey al que pertenecían aunque no llevasen sus ramas, y con todos sus caballos. Los oficiales que los habían arrestado los hicieron subir cada uno en una carroza y cada uno de ellos con cada uno y los condujeron a París a la Bastilla, en donde permanecieron siete u ocho meses con permiso, al cabo del primer mes, de recibir a sus amigos, pero tratados ambos con la misma igualdad en todo. Es fácil comprender el estruendo de una aventura semejante: nadie entendía nada de este asunto. El príncipe de Courtenay era un hombre en extremo correcto, grave, valiente pero de maneras suaves y que no había, durante toda su vida, tenido querella con nadie. Protestaba que no había tenido ninguna con La Vauguyon y que éste lo había atacado y forzado a echar mano a la espada para no ser insultado. Por otra parte, nadie sospechaba todavía del extravío de La Vauguyon. Este protestaba de la misma manera, que era el otro quien lo había atacado e insultado. No se sabía pues qué creer o pensar. Ambos tenían sus amigos pero nadie se dio por contento con la igualdad que tanto se afectaba en el trato que se les dispensaba a ambos. Al fin, a falta de mayor esclarecimiento, y la falta suficientemente expiada, salieron de prisión y, poco después, volvieron a aparecer en la Corte. Poco tiempo después, una nueva extravagancia puso las cosas más en claro. Yendo a Versalles, La Vauguyon encontró a un palafrenero con la librea del Señor Príncipe que llevaba, por el camino que va a Sevres y a París, un caballo obediente completamente ensillado. Lo llama, lo para, se baja, y le pregunta a quién pertenece el caballo. El palafrenero responde que al Señor Príncipe. La Vauguyon le dice que al Señor Príncipe no le parecerá mal que él lo monte, y salta al mismo tiempo sobre el animal. El palafrenero, bien aturdido, no sabe qué hacer con un hombre al que se le ve encima del traje el cordón azul saliendo de entre sus ropas, y lo sigue. La Vauguyon va al trotecito hasta la puerta de la Conferencia, llega hasta las murallas y se baja delante de la Bastilla, le da a beber al palafrenero y lo invita a retirarse. Sube al despacho del gobernador y le dice que ha tenido la desgracia de desagradar al Rey y que le ruega que se le conceda una habitación. El gobernador, muy sorprendido, le pide a su vez ver la orden del Rey y, viendo que éste no tiene nada, más sorprendido aún, resiste a todos sus ruegos y, buscando un arreglo, le permite permanecer en sus habitaciones mientras espera la repuesta de Pontchartrain al que envía de inmediato un mensajero. Pontchartrain da cuenta del asunto al Rey, que no sabe qué puede querer decir esto; y la orden llega al gobernador de no recibir de ninguna manera a La Vauguyon, para librarse del cual el gobernador tuvo aún, a pesar de esto, todas las penas del mundo. Este acto y esta aventura del caballo del Señor Príncipe produjo mucho ruido y aclaró en mucho aquella de Monsier de Courtenay. Sin embargo el Rey hizo que se le dijese a La Vauguyon que podía volver a aparecer en la Corte, y éste continuó a ir igual que antes, pero todo el mundo lo evitaba y tenía miedo de él, aunque el Rey por bondad afectase tratarlo bien. Es fácil darse cuenta que estas molestias de dominio público no iban sin otras de índole doméstica que permanecían ocultas tanto como era posible. Pero se le volvieron tan enojosas a su pobre mujer, mucho más vieja que él y que vivía muy retirada, que tomó la resolución de dejar París y de irse a sus tierras. No estuvo allí mucho tiempo y allí murió al final de ese año hacia fines de octubre. Fue ese el golpe último que terminó de darle vuelta la cabeza a su marido: con su mujer éste perdía todos sus medios de vida; ningún bien por su lado y muy pocos de la parte del Rey. No la sobrevivió sino un mes. Tenía sesenta y cuatro años, casi veinte menos que ella, y nunca tuvo hijos. Se supo que los dos últimos años de su vida llevaba pistolas en su coche con las que amenazaba a menudo al cochero o al postillón, poniéndoselas delante de la cara, cuando iba o venía de Versalles. Lo que es seguro es que sin el barón de Beauvais que lo asistía con sus propios recursos y se ocupaba mucho de él, se hubiese encontrado a menudo en las últimas necesidades, sobre todo después de la partida de su mujer. Beauvais le hablaba a menudo de él al Rey, y es inconcebible que éste habiendo elevado a este hombre hasta tal punto, y habiéndole siempre dado muestras de una bondad particular, lo haya dejado perseverantemente morir de hambre y volverse loco de miseria.


Traducción de Miguel Ángel Frontán.

sábado, 24 de diciembre de 2011

Émile Nelligan: Noche de invierno



Émile Nelligan nació en Montreal en 1879. Su padre era irlandés y su madre, canadiense de lengua francesa. Muy pronto, Nelligan optó por la lengua materna, hasta el punto de exigir que su nombre fuese pronunciado con acento francés.

 Entre los dieciséis y los veinte años, este adolescente genial que parece haberlo leído todo en cuanto de poesía francesa se trata, escribió una pequeña y fulgurante obra poética. Luego vino el silencio y un largo eclipse en la demencia, hasta su muerte en 1941.




SOIR D'HIVER

Ah ! comme la neige a neigé !
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah! comme la neige a neigé!
Qu'est-ce que le spasme de vivre
A la douleur que j'ai, que j'ai.

Tous les étangs gisent gelés,
Mon âme est noire! Où-vis-je? où vais-je?
Tous ses espoirs gisent gelés:
Je suis la nouvelle Norvège
D'où les blonds ciels s'en sont allés.

Pleurez, oiseaux de février,
Au sinistre frisson des choses,
Pleurez oiseaux de février,
Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,
Aux branches du genévrier.

Ah! comme la neige a neigé!
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah! comme la neige a neigé!
Qu'est-ce que le spasme de vivre
A tout l'ennui que j'ai, que j'ai...


ÉMILE NELLIGAN




NOCHE DE INVIERNO

¡Ay, cómo nevó la nieve!
Mi ventana es un jardín helado.
¡Ay, cómo nevó la nieve!
¡Qué es el espasmo de la vida, qué,
 Al lado del dolor que tengo en mí, que tengo! 

Los estanques todos gélidos yacen
Negra es mi alma. ¿Adónde voy? ¿En dónde vivo?
Sus esperanzas todas gélidas yacen.
La nueva Noruega soy
De la que huyeron los rubios cielos.

Llorad pájaros de febrero por el sombrío
Escalofrío que hay en las cosas.
Llorad pájaros de febrero,
Llorad mis rosas, llorad mis llantos,
Entre las altas ramas del cedro.

¡Ay, cómo nevó la nieve!
Mi ventana es un jardín helado.
¡Ay, cómo nevó la nieve!
¡Qué es el espasmo de la vida, qué,
 Al lado del tormento que tengo en mí, que tengo!

Traducción de Miguel Ángel Frontán.

martes, 20 de diciembre de 2011

Leopoldo Marechal y Bernard Sesé



DEL ADIÓS A LA GUERRA
¡No ya la guerra de brillantes ojos,
La que aventando plumas y corceles
Dejó un escalofrío de broqueles
En los frutales mediodías rojos!

Si el orgullo velaba sus despojos
Y el corazón dormía entre laureles,
¡Mal pude, Amor, llegarme a tus canceles,
Tocar aldabas y abolir cerrojos!

¡Armaduras de sol, carros triunfales,
Otros dirán la guerra y sus metales!
Yo he desertado y cruzo la frontera

Detrás de mi señora pensativa,
Porque, a la sombra de la verde oliva,
Su bandera de amor es mi bandera.

L'ADIEU À LA GUERRE
Non plus la guerre aux yeux brillants,
celle qui dispersant les plumes, les coursiers,
laissa un tremblement de boucliers
dans les midis rouges et fruitiers !

Si l'orgueil veillait son butin,
si le coeur dormait parmi les lauriers,
comment pouvais-je, Amour, arriver à tes portes,
y frapper le heurtoir, en briser les verrous !

Armures de soleil, chars triomphants,
d'autres diront la guerre et ses métaux !
J'ai déserté, je passe la frontière,

poursuivant ma dame pensive,
parce que, à l'ombre de la verte olive,
sa bannière d'amour est la mienne.

DE LA SABROSA TREGUA
Cuando, ya sea en la mañana pura,
Ya en la temida noche del espanto,
La mujer admirable de mi canto
Se adelanta sin velo ni atadura,

Descuida el alma su pelea obscura,
Las armas rinde, y su fervor es tanto
Que se aventura en un dominio santo
Donde no tiene llanto la hermosura.

Y si la dueña de mi pensamiento
Pone su labio en el oído atento
Del alma, entonces un sabroso idioma

Conmueve y mueve al que lo va escuchando,
Como la voz de la paloma, cuando
Nos llega enamorada la paloma.

LA TRÈVE SAVOUREUSE
 Quand, dans l'aube très pure
ou bien dans la nuit de l'effroi,
admirable la femme de mon chant
sans voile ni lien s'avance,

de son obscur combat l'âme s'écarte,
rend les armes, et telle est sa ferveur
qu'elle se risque en la région sainte
où la beauté ne connaît pas les pleurs.

Si la reine de toutes mes pensées
repose sa lèvre sur l'oreille attentive
 de l'âme, alors un savoureux langage

émeut celui qui longuement l'écoute,
comme la voix de la colombe, quand
elle revient vers nous prise d'amour.

DEL AMOR NAVEGANTE
Porque no está el Amado en el Amante
Ni el Amante reposa en el Amado,
 Tiende Amor su velamen castigado
 Y afronta el ceño de la mar tonante.

Llora el Amor en su navío errante
Y a la tormenta libra su cuidado,
Porque son dos: Amante desterrado
Y Amado con perfil de navegante.

Si fuesen uno, Amor, no existiría
Ni llanto ni bajel ni lejanía,
Sino la beatitud de la azucena.

¡Oh amor sin remo, en la Unidad gozosa!
¡Oh círculo apretado de la rosa!
Con el número Dos nace la pena.

AMOUR NAVIGANT
Car l'Aimé n'est pas dans l'Amant,
ni l'Amant en l'Aimé repose,
l'Amour tend ses voiles navrées
et de la mer tonnante affronte la menace.

Pleure l'Amour en son navire errant
et son tourment confie à la tourmente,
car ils sont deux, un Amant exilé
et son Aimé, profil de navigant.

S'ils étaient un, Amour, n'existeraient
ni pleurs, ni navire ou lointain,
mais du lis la béatitude.

Amour sans rame, en l'unité joyeuse !
Ô cercle serré de la rose !
Avec le nombre Deux jaillit la peine.


miércoles, 14 de diciembre de 2011

Paul Valéry: Los pasos



Les pas

 Tes pas, enfants de mon silence,
 Saintement, lentement placés,
 Vers le lit de ma vigilance
 Procèdent muets et glacés.

 Personne pure, ombre divine,
 Qu'ils sont doux, tes pas retenus!
 Dieux!... tous les dons que je devine
 Viennent à moi sur ces pieds nus!

 Si, de tes lèvres avancées,
 Tu prépares pour l'apaiser,
 A l'habitant de mes pensées
 La nourriture d'un baiser,

 Ne hâte pas cet acte tendre,
 Douceur d'être et de n'être pas,
 Car j'ai vécu de vous attendre,
 Et mon cœur n'était que vos pas.







Los pasos

 Tus pasos, hijos de mi silencio,
 Santamente, lentamente dados,
 Hacia el lecho de mi vigilancia
 Avanzan gélidos y mudos.

 Persona pura, sombra divina,
 Qué puros son tus pasos temerosos,
 Oh dioses, todos los dones que adivino
 Llegan a mí con esos pies desnudos.

 Si con tus labios que se avanzan
 Tú preparas para calmarlo
 Al que vive en mis pensamientos
 El alimento de tu beso,

 No apremies, no, ese acto tierno,
 Dulzura de ser y de no ser,
 Ya que he vivido de esperarte
 Y mi corazón era sólo tus pasos.

Traducción de Miguel Ángel Frontán.

lunes, 12 de diciembre de 2011

Borges: Montaigne



MONTAIGNE
La más tranquila de las revoluciones francesas tal vez ocurrió así:
Michel Eyquem, señor de Montaigne, leía (releía) en su biblioteca las obras menores de Plutarco, vertidas al francés por Amyot. Sabemos que la biblioteca era circular y que abarcaba el segundo piso de una torre; nada nos costaría añadir que el fuego crepitaba en la chimenea, un fuego alegre de ser fuego y de dar calor a los hombres, y que el aullido inútil de un perro subía desde el patio. (Desde el patio, para Montaigne; desde el siglo XVI, para nosotros.) Pensándolo bien, no lo haremos; la buena literatura ha abusado de los rasgos circunstanciales, que ahora contaminan de irrealidad las cosas que tocan. No fingiremos haber recuperado increíblemente la hora de la noche, del día o del indistinto crepúsculo; bástenos conjeturar que en aquel momento releía el tratado en que se declara que a los tigres los exacerba el son del tambor y a los toros el color rojo. Al volver la hoja, su memoria le adelantó la continuación; la había leído muchas veces, y nada tal vez le importaba menos que el influjo de un color o un sonido sobre los animales. A esta comprobación trivial se agregaría otra, que le causó una leve sorpresa; le gustaba leer y seguir leyendo esas cosas no interesantes. Estas cosas me agradan, reflexionó, porque las escribe Plutarco. Montaigne había comprendido que el griego no era sólo un maestro y una doctrina, sino una entonación individual a la que se había acostumbrado, un hombre y su diálogo.
Desde aquel instante en que percibió que entre alguien y un libro puede existir una relación de amistad, Montaigne ya era el autor de una obra entrañable. Lo demás está en las enciclopedias. En 1580 aparecieron los Essais, el primer libro que deliberadamente busca lo que Plutarco halló en otro país, mediante otra lengua, al cabo de siglos de muerte: el afecto de un hombre desconocido. Los ensayos que abren el volumen son impersonales; también es lícito conjeturar que Montaigne se había propuesto compilar una miscelánea, una silva de varia lección, al gusto de la época, y que, releyendo sus borradores, reconoció en ellos su voz, el sonido de su alma, y decidió incorporarlos en una obra que fuera su verídica imagen.
Seguir la descendencia de la obra, la multiplicación de su linaje por toda Europa, sería reescribir la historia de la literatura.
Acuden a la memoria nombres ilustres; anotemos, al pasar, el de Boswell, que en lugar de mostrarse directamente, optó por incluirse en un grupo, como comparsa lateral y un poco ridícula, porque sabía que la ridiculez puede ser querible.
Para no ser indigno de la amistad de generaciones futuras, Montaigne, quizás sin proponérselo, hubo de acentuar algún rasgo; sus émulos, a lo largo del tiempo, exageraron ese procedimiento dramático y hay personajes —básteme recordar a Bloy y a Carlyle— de quienes no sabemos con certidumbre si son formas de la naturaleza o del arte. ¿Quién, entre los autobiógrafos, es un rostro y quién una máscara?

BORGES — Montaigne, Walt Whitman (Buenos Aires, Imprenta Francisco A. Colombo, 1957. Artículo incluido en Textos recobrados 1956-1986. Emecé Editores, 2003, 2007.)

domingo, 11 de diciembre de 2011

Charles Baudelaire: Las viejecitas




LES PETITES VIEILLES

I

Dans les plis sinueux des vieilles capitales,
Où tout, même l'horreur, tourne aux enchantements,
Je guette, obéissant à mes humeurs fatales
Des êtres singuliers, décrépits et charmants.

Ces monstres disloqués furent jadis des femmes,
Éponine ou Laïs ! Monstres brisés, bossus
Ou tordus, aimons-les ! ce sont encor des âmes.
Sous des jupons troués et sous de froids tissus

Ils rampent, flagellés par les bises iniques,
Frémissant au fracas roulant des omnibus,
Et serrant sur leur flanc, ainsi que des reliques,
Un petit sac brodé de fleurs ou de rébus;

Ils trottent, tout pareils à des marionnettes
Se traînent, comme font les animaux blessés,
Ou dansent, sans vouloir danser, pauvres sonnettes
Où se pend un Démon sans pitié! Tout cassés

Qu'ils sont, ils ont des yeux perçants comme une vrille,
Luisants comme ces trous où l'eau dort dans la nuit;
Ils ont les yeux divins de la petite fille
Qui s'étonne et qui rit à tout ce qui reluit.

  Avez-vous observé que maints cercueils de vieilles
Sont presque aussi petits que celui d'un enfant?
La Mort savante met dans ces bières pareilles
Un symbole d'un goût bizarre et captivant,

Et lorsque j'entrevois un fantôme débile
Traversant de Paris le fourmillant tableau,
Il me semble toujours que cet être fragile
S'en va tout doucement vers un nouveau berceau;

A moins que, méditant sur la géométrie,
Je ne cherche, à l'aspect de ces membres discords,
Combien de fois il faut que l'ouvrier varie
La forme de la boîte où l'on met tous ces corps.

 Ces yeux sont des puits faits d''un milllllion de larmes,
Des creusets qu'un métal refroidi pailleta...
Ces yeux mystérieux ont d'invincibles charmes
Pour celui que l'austère Infortune allaita!

II

De Frascati défunt Vestale enamourée;
Prêtresse de Thalie, hélas ! dont le souffleur
Enterré sait le nom; célèbre évaporée
Que Tivoli jadis ombragea dans sa fleur,

Toutes m'enivrent ; mais parmi ces êtres frêles
Il en est qui, faisant de la douleur un miel
Ont dit au Dévouement qui leur prêtait ses ailes:
Hippogriffe puissant, mène-moi jusqu'au ciel!

L'une, par sa patrie au malheur exercée,
L'autre, que son époux surchargea de douleurs,
L'autre, par son enfant Madone transpercée,
Toutes auraient pu faire un fleuve avec leurs pleurs!

III

Ah ! que j'en ai suivi de ces petites vieilles!
Une, entre autres, à l'heure où le soleil tombant
Ensanglante le ciel de blessures vermeilles,
Pensive, s'asseyait à l'écart sur un banc,

Pour entendre un de ces concerts, riches de cuivre,
Dont les soldats parfois inondent nos jardins,
Et qui, dans ces soirs d'or où l'on se sent revivre,
Versent quelque héroïsme au coeur des citadins

Celle-là, droite encor, fière et sentant la règle,
Humait avidement ce chant vif et guerrier;
Son oeil parfois s'ouvrait comme l'oeil d'un vieil aigle;
Son front de marbre avait l'air fait pour le laurier!

IV

Telles vous cheminez, stoïques et sans plaintes,
A travers le chaos des vivantes cités,
Mères au coeur saignant, courtisanes ou saintes,
Dont autrefois les noms par tous étaient cités.

Vous qui fûtes la grâce ou qui fûtes la gloire,
Nul ne vous reconnaît ! un ivrogne incivil
Vous insulte en passant d'un amour dérisoire;
Sur vos talons gambade un enfant lâche et vil.

Honteuses d'exister, ombres ratatinées,
Peureuses, le dos bas, vous côtoyez les murs;
Et nul ne vous salue, étranges destinées!
Débris d'humanité pour l'éternité mûrs!

Mais moi, moi qui de loin tendrement vous surveille,
L'oeil inquiet, fixé sur vos pas incertains,
Tout comme si j'étais votre père, ô merveille!
Je goûte à votre insu des plaisirs clandestins:

Je vois s'épanouir vos passions novices;
Sombres ou lumineux, je vis vos jours perdus;
Mon coeur multiplié jouit de tous vos vices!
Mon âme resplendit de toutes vos vertus!

Ruines! ma famille! ô cerveaux congénères!
Je vous fais chaque soir un solennel adieu!
Où serez-vous demain, Eves octogénaires,
Sur qui pèse la griffe effroyable de Dieu?




LAS VIEJECITAS

I

En los pliegues sinuosos de las viejas ciudades
En los que hasta el horror se vuelve encantamiento
A mi fatal humor obedeciendo, acecho
A esos seres decrépitos, encantadores, únicos

Que ayer fueron mujeres, vencidos monstruos,
 Eponina o Laís, jorobados o rotos
O torcidos; querámoslos, todavía son almas.
Bajo las telas frías o las agujereadas faldas

Flagelados se arrastran por los vientos inicuos,
Gimiendo bajo el ruido rodante de los ómnibus,
Cual si fuesen reliquias sobre el cuerpo apretando
Un saquito bordado con flores o iniciales;

Como las marionetas moviéndose
O como los animales heridos arrastrándose,
Danzando sin quererlo, oh pobres campanitas
A las que sin piedad el demonio se cuelga.

Pero aún rotos tienen los ojos penetrantes,
Brillantes cual los pozos nocturnos donde el agua
Duerme, esos ojos divinos de la joven mujer
Que se asombra y que ríe de todo lo que brilla.

¿Habéis visto cómo los féretros de viejas
Son casi tan pequeños como los de los niños?
La muerte pone en esos cajones parecidos
Un símbolo de un gusto extraño y cautivante.

Y cuando yo un fantasma débil apercibo
Cruzando de París el hormigueante cuadro
Siempre me parece que esa frágil persona
Suavemente se va hacia una nueva cuna.

Salvo si de manera geométrica pensando,
debajo del aspecto de esos miembros discordes
Calculo cuántas veces variará el carpintero
La forma de la caja que contendrá esos cuerpos.

Esos ojos son pozos por un millón de lágrimas
Hechos, crisoles que un metal hoy frío iluminó...
Ojos misteriosos de perdurable encanto
Para el amamantado por la austera desgracia.

II

De Frascati ya muerto Vestal enamorada,
Sacerdotisa de Talía cuyo nombre el difunto
Apuntador lo sabe, alocada famosa
Que de Tívoli antaño disfrutó de la sombra,

Todas me embriagan, mas de esos seres frágiles
Algunos transformaron su dolor en dulzura,
Diciendo al sacrificio que les prestó sus alas,
Poderoso hipogrifo, ¡condúceme hasta el cielo!

Una fue por su patria que aceptó la desgracia,
A esa otra su esposo la cargó de dolores,
A esa otra su hijo le ha atravesado el pecho,
Todas podrían hacer un río con sus lágrimas.

III

¡Ay!, esas viejecitas, cómo las he seguido,
Y sobre todo a una que, cuando el sol se pone
Ensangrentando el cielo con bermejas heridas,
Permanecía en un banco, aparte y pensativa,

Uno de esos conciertos de bronces escuchando
Con los que los soldados inundan los jardines
Y que, en las tardes de oro cuando la vida vibra,
Llenan con su heroísmo el pecho de las gentes.

A esa que, altanera, aún con olor a regla
Olía ávidamente aquel canto guerrero,
Que los ojos abría como un águila vieja,
Cuya marmórea frente reclamara laureles.

IV

Así vosotras vais, estoicas y sin quejas,
Atravesando el caos de la ciudad viviente,
El corazón sangrante, cortesanas o santas
Cuyos nombres antaño todos los conocieron.

Vosotras que la gracia y que la gloria fuísteis,
Ya nadie os reconoce y un incivil borracho
Al pasar os insulta con su amor irrisorio
O un niño vil, cobarde, os persigue corriendo.

De existir vergonzosas, sombras disminuidas,
Temerosas, dobladas y rozando los muros
Que ya nadie saluda, oh destinos extraños,
Restos humanos listos para la eternidad.

Pero yo que de lejos os cuido tiernamente,
 Observando inquieto vuestros pasos inciertos,
Qué maravilla, como si vuestro padre fuese
Siento anónimamente un placer clandestino:

Veo cómo florecen vuestras nuevas pasiones
Oscuras, luminosas, vuestros días perdidos,
Mi corazón disfruta de todos vuestros vicios
Y con vuestras virtudes resplandece mi alma.

¡Ruïnas! ¡Mi familia! ¡Congéneres cerebros!
Cada noche yo os digo solemnemente adiós.
¿Dónde estaréis mañana, Evas octogenarias,
Sobre quienes la garra atroz pesa de Dios?

Traducción de Miguel Ángel Frontán