sábado, 28 de abril de 2012

Charles Nodier: El bibliómano



EL BIBLIÓMANO

Todos ustedes saben quién fue el buen Teodoro, sobre cuya tumba vengo a arrojar flores, rogándole al cielo que la tierra le sea ligera.

Estos dos jirones de frase, que todos ustedes también conocen, declaran suficientemente que mi intención es dedicarle algunas páginas de nota necrológica o de oración fúnebre. [...]

Pueden descargar gratuitamente EL BIBLIÓMANO de CHARLES NODIER en formato epub, en la Biblioteca Franca de EDICIONES DE LA MIRÁNDOLA



LE BIBLIOMANE


Vous avez tous connu ce bon Théodore, sur la tombe duquel je viens jeter des fleurs, en priant le ciel que la terre lui soit légère.


Ces deux lambeaux de phrase, qui sont aussi de votre connaissance, vous annoncent assez que je me propose de lui consacrer quelques pages de notice nécrologique ou d'oraison funèbre.


Il y a vingt ans que Théodore s'était retiré du monde pour travailler ou pour ne rien faire : lequel des deux, c'était un grand secret. Il songeait, et l'on ne savait à quoi il songeait. Il passait sa vie au milieu des livres, et ne s'occupait que de livres, ce qui avait donné lieu à quelques-uns de penser qu'il composait un livre qui rendrait tous les livres inutiles ; mais ils se trompaient évidemment. Théodore avait tiré trop bon parti de ses études pour ignorer que ce livre est fait il y a trois cents ans. C'est le treizième chapitre du livre premier de Rabelais.


Théodore ne parlait plus, ne riait plus, ne jouait plus, ne mangeait plus, n'allait plus ni au bal, ni à la comédie. Les femmes qu'il avait aimées dans sa jeunesse n'attiraient plus ses regards, ou tout au plus il ne les regardait qu'au pied ; et quand une chaussure élégante de quelque brillante couleur avait frappé son attention : - Hélas ! disait-il en tirant un gémissement profond de sa poitrine, voilà bien du maroquin perdu !


Il avait autrefois sacrifié à la mode : les mémoires du temps nous apprennent qu'il est le premier qui ait noué la cravate à gauche, malgré l'autorité de Garat qui la nouait à droite, et en dépit du vulgaire qui s'obstine encore aujourd'hui à la nouer au milieu.


Théodore ne se souciait plus de la mode. Il n'a eu pendant vingt ans qu'une dispute avec son tailleur : - Monsieur, lui dit-il un jour, cet habit est le dernier que je reçois de vous, si l'on oublie encore une fois de me faire des poches in-quarto.


La politique, dont les chances ridicules ont créé la fortune de tant de sots, ne parvint jamais à le distraire plus d'un moment de ses méditations. Elle le mettait de mauvaise humeur, depuis les folles entreprises de Napoléon dans le Nord, qui avaient fait enchérir le cuir de Russie. Il approuva cependant l'intervention française dans les révolutions d'Espagne. - C'est, dit-il, une belle occasion pour rapporter de la Péninsule des romans de chevalerie et des Cancioneros. - Mais l'armée expéditionnaire ne s'en avisa nullement, et il en fut piqué. Quand on lui parlait Trocadero, il répondait ironiquement Romancero, ce qui le fit passer pour libéral.


La mémorable campagne de M. de Bourmont sur les côtes d'Afrique le transporta de joie. - Grâce au ciel, dit-il en se frottant les mains, nous aurons les maroquins du Levant à bon marché ; - ce qui le fit passer pour carliste.


Il se promenait l'été dernier dans une rue populeuse, en collationnant un livre. D'honnêtes citoyens, qui sortaient du cabaret d'un pied titubant, vinrent le prier, le couteau sur la gorge, au nom de la liberté des opinions, de crier : Vivent les Polonais ! - Je ne demande pas mieux, répondit Théodore, dont la pensée était un cri éternel en faveur du genre humain, mais pourrais-je vous demander à quel propos ? - Parce que nous déclarons la guerre à la Hollande qui opprime les Polonais, sous prétexte qu'ils n'aiment pas les jésuites, repartit l'ami des lumières, qui était un rude géographe et un intrépide logicien. - Dieu nous pardonne ! murmura notre ami, en croisant piteusement les mains. Serons-nous donc réduits au prétendu papier de Hollande de M. Montgolfier ?


L'homme éminemment civilisé lui cassa la jambe d'un coup de bâton.


Théodore passa trois mois au lit à compulser des catalogues de livres. Disposé comme il l'a toujours été à prendre les émotions à l'extrême, cette lecture lui enflamma le sang.


Dans sa convalescence même son sommeil était horriblement agité. Sa femme le réveilla une nuit au milieu des angoisses du cauchemar. - Vous arrivez à propos, lui dit-il en l'embrassant, pour m'empêcher de mourir d'effroi et de douleur. J'étais entouré de monstres qui ne m'auraient point fait de quartier.


- Et quels monstres pouvez-vous redouter, mon bon ami, vous qui n'avez jamais fait le mal à personne ?


- C'était, s'il m'en souvient, l'ombre de Purgold dont les funestes ciseaux mordaient d'un pouce et demi sur les marges de mes aldes brochés, tandis que celle d'Heudier plongeait impitoyablement dans un acide dévorant mon plus beau volume d'édition princeps, et l'en retirait tout blanc ; mais j'ai de bonnes raisons de penser qu'ils sont au moins en purgatoire.


Sa femme crut qu'il parlait grec, car il savait un peu le grec, à telles enseignes que trois tablettes de sa bibliothèque étaient chargées de livres grecs dont les feuilles n'étaient pas fendues. Aussi ne les ouvrait-il jamais, se contentant de les montrer à ses plus privées connaissances, par le plat et par le dos, mais en indiquant le lieu de l'impression, le nom de l'imprimeur et la date, avec une imperturbable assurance. Les simples en concluaient qu'il était sorcier. Je ne le crois pas.


Comme il dépérissait à vue d'oeil, on appela son médecin, qui était, par hasard, homme d'esprit et philosophe. Vous le trouverez si vous pouvez. Le docteur reconnut que la congestion cérébrale était imminente, et il fit un beau rapport sur cette maladie dans le Journal des Sciences médicales, où elle est désignée sous le nom de monomanie du maroquin, ou de tiphus des bibliomanes ; mais il n'en fut pas question à l'Académie des sciences, parce qu'elle se trouva en concurrence avec le choléra-morbus.


On lui conseilla l'exercice, et comme cette idée lui souriait, il se mit en route l'autre jour de bonne heure. J'étais trop peu rassuré pour le quitter d'un pas. Nous nous dirigeâmes du côté des quais, et je m'en réjouis, parce que j'imaginai que la vue de la rivière le récréerait ; mais il ne détourna pas ses regards du niveau des parapets. Les parapets étaient aussi lisses d'étalages que s'ils avaient été visités dès le matin par les défenseurs de la presse, qui ont noyé en février la bibliothèque de l'Archevêché. Nous fûmes plus heureux au quai aux Fleurs. Il y avait profusion de bouquins ; mais quels bouquins ! Tous les ouvrages dont les journaux ont dit du bien depuis un mois, et qui tombent là infailliblement dans la case à cinquante centimes, du bureau de rédaction ou du fonds de libraire. Philosophes, historiens, poètes, romanciers, auteurs de tous les genres et de tous les formats, pour qui les annonces les plus pompeuses ne sont que les limbes infranchissables de l'immortalité, et qui passent, dédaignés, des tablettes du magasin aux margelles de la Seine, Léthé profond d'où ils contemplent, en moisissant, le terme assuré de leur présomptueux essor. Je déployais là les pages satinées de mes in-octavo, entre cinq ou six de mes amis.


Théodore soupira, mais ce n'était pas de voir les oeuvres de mon esprit exposées à la pluie, dont les garantit mal l'officieux balandran de toile cirée.


- Qu'est devenu, dit-il, l'âge d'or des bouquinistes en plein vent ? C'est ici pourtant que mon illustre ami Barbier avait colligé tant de trésors, qu'il était parvenu à en composer une bibliographie spéciale de quelques milliers d'articles. C'est ici que prolongeaient, pendant des heures entières, leurs doctes et fructueuses promenades, le sage Monmerqué en allant au Palais, et le sage Labouderie en sortant de la métropole. C'est d'ici que le vénérable Boulard enlevait tous les jours un mètre de raretés, toisé à sa canne de mesure, pour lequel ses six maisons pléthoriques de volumes n'avaient pas de place en réserve. Oh ! qu'il a de fois désiré, en pareille occasion, le modeste angulus d'Horace ou la capsule élastique de ce pavillon de fées qui aurait couvert au besoin l'armée de Xerxès, et se portait aussi commodément à la ceinture que la gaine aux couteaux du grand-père de Jeannot ! Maintenant, quelle pitié ! vous n'y voyez plus que les ineptes rogatons de cette littérature moderne qui ne sera jamais de la littérature ancienne, et dont la vie s'évapore en vingt-quatre heures, comme celle des mouches du fleuve Hypanis : littérature bien digne en effet de l'encre de charbon et du papier de bouillie que lui livrent à regret quelques typographes honteux, presque aussi sots que leurs livres ! Et c'est profaner le nom des livres que de le donner à ces guenilles barbouillées de noir qui n'ont presque pas changé de destinée en quittant la hotte aux haillons du chiffonnier ! Les quais ne sont désormais que la Morgue des célébrités contemporaines !


Il soupira encore, et je soupirai aussi, mais ce n'était pas pour la même raison.




J'étais pressé de l'entraîner, car son exaltation qui croissait à chaque pas semblait le menacer d'un accès mortel. Il fallait que ce fût un jour néfaste, puisque tout contribuait à aigrir sa mélancolie.


- Voilà, dit-il en passant, la pompeuse façade de Ladvocat, le Galiot du Pré des lettres abâtardies du dix-neuvième siècle, libraire industrieux et libéral, qui aurait mérité de naître dans un meilleur âge, mais dont l'activité déplorable a cruellement multiplié les livres nouveaux au préjudice éternel des vieux livres ; fauteur impardonnable à jamais de la papeterie de coton, de l'orthographe ignorante et de la vignette maniérée, tuteur fatal de la prose académique et de la poésie à la mode ; comme si la France avait eu de la poésie depuis Ronsard et de la prose depuis Montaigne ! Ce palais de bibliopole est le cheval de Troie qui a porté tous les ravisseurs du palladium, la boîte de Pandore qui a donné passage à tous mes maux de la terre ! J'aime encore le cannibale, et je ferai un chapitre dans son livre, mais je ne le verrai plus !


Voilà, continua-t-il, le magasin aux vertes parois du digne Crozet, le plus aimable de nos jeunes libraires, l'homme de Paris qui distingue le mieux une reliure de Derome l'aîné d'une reliure de Derome le jeune, et la dernière espérance de la dernière génération d'amateurs, si elle s'élève encore au milieu de notre barbarie ; mais je ne jouirai pas aujourd'hui de son entretien, dans lequel j'apprends toujours quelque chose ! Il est en Angleterre où il dispute, par juste droit de représailles, à nos avides envahisseurs de Soho-Square et de Fleet-Street les précieux débris des monuments de notre belle langue, oubliés depuis deux siècles sur la terre ingrate qui les a produits ! Macte animo, generoso puer !...


Voilà, reprit-il en revenant sur ses pas, voilà le Pont-des-Arts, dont l'inutile balcon ne supportera jamais, sur son garde-fou ridicule de quelques centimètres de largeur, le noble dépôt de l'in-folio tri-séculaire qui a flatté les yeux de dix générations de l'aspect de sa couverture en peau de truie et de ses fermoirs de bronze ; passage profondément emblématique, à la vérité, qui conduit du château à l'Institut par un chemin qui n'est pas celui de la science. Je ne sais si je me trompe, mais l'invention de cette espèce de pont devait être pour l'érudit une révélation flagrante de la décadence des bonnes lettres.


Voilà, dit toujours Théodore en passant sur la place du Louvre, la blanche enseigne d'un autre libraire actif et ingénieux ; elle a longtemps fait palpiter mon coeur, mais je ne l'aperçois plus sans une émotion pénible, depuis que Techener s'est avisé de faire réimprimer avec les caractères de Tastu, sur un papier éblouissant et sous un cartonnage coquet, les gothiques merveilles de Jehan Bonfons de Paris, de Jehan Mareschal de Lyon, et de Jehan de Chaney d'Avignon, bagatelles introuvables qu'il a multipliées en délicieuses contrefaçons. Le papier d'un blanc neigeux me fait horreur, mon ami, et il n'est rien que je ne lui préfère, si ce n'est ce qu'il devient quand il a reçu, sous le coup de barre d'un bourreau de pressier, l'empreinte déplorable des rêveries et des sottises de ce siècle de fer.


Théodore soupirait de plus belle ; il allait de mal en pis.


Nous arrivâmes ainsi dans la rue des Bons-Enfants, au riche bazar littéraire des ventes publiques de Silvestre, local honoré des savants, où se sont succédé en un quart de siècle plus d'inappréciables curiosités que n'en renferma jamais la bibliothèque des Ptolémées, qui n'a peut être pas été brûlée par Omar, quoi qu'en disent nos radoteurs d'historiens. Jamais je n'avais vu étaler tant de splendides volumes.


- Malheureux ceux qui les vendent ! dis-je à Théodore.


- Ils sont morts, répondit-il, ou ils en mourront.


Mais la salle était vide. On n'y remarquait plus que l'infatigable M. Thour, facsimilant avec une patiente exactitude, sur des cartes soigneusement préparées, les titres des ouvrages qui avaient échappé la veille à son investigation quotidienne. Homme heureux entre tous les hommes, qui possède, dans ses cartons, par ordre de matières, l'image fidèle du frontispice de tous les livres connus ! C'est en vain, pour celui-là, que toutes les productions de l'imprimerie périront dans la première et prochaine révolution que les progrès de la perfectibilité nous assurent. Il pourra léguer à l'avenir le catalogue complet de la bibliothèque universelle. Il y avait certainement un tact admirable de prescience à prévoir de si loin le moment où il serait temps de compiler l'inventaire de la civilisation. Quelques années encore, et l'on n'en parlera plus.


- Dieu me pardonne ! brave Théodore, dit l'honnête M. Silvestre, vous vous êtes trompé d'un jour. C'était hier la dernière vacation. Les livres que vous voyez sont vendus et attendent les porteurs.


Théodore chancela et blêmit. Son front prit la teinte d'un maroquin-citron un peu usé. Le coup qui le frappa retentit au fond de mon coeur.


- Voilà qui est bien, dit-il d'un air atterré. Je reconnais mon malheur accoutumé à cette affreuse nouvelle ! Mais encore, à qui appartiennent ces perles, ces diamants, ces richesses fantastiques dont la bibliothèque des de Thou et des Grolier se serait fait gloire ?


- Comme à l'ordinaire, monsieur, répliqua M. Silvestre. Ces excellents classiques d'édition originale, ces vieux et parfaits exemplaires autographiés par des érudits célèbres, ces piquantes raretés philologiques dont l'Académie et l'Université n'ont pas entendu parler, revenaient de droit à sir Richard Heber. C'est la part du lion anglais, auquel nous cédons de bonne grâce le grec et le latin que nous ne savons plus. - Ces belles collections d'histoire naturelle, ces chefs-d'oeuvre de méthode et d'iconographie sont au prince de..., dont les goûts studieux ennoblissent encore, par son emploi, une noble et immense fortune. - Ces mystères du moyen âge, ces moralités phénix dont le ménechme n'existe nulle part, ces curieux essais dramatiques de nos aïeux vont augmenter la bibliothèque modèle de M. de Soleine. - Ces facéties anciennes, si sveltes, si élégantes, si mignonnes, si bien conservées, composent le lot de votre aimable et ingénieux ami, M. Aimé-Martin. - Je n'ai pas besoin de vous dire à qui appartiennent ces maroquins frais et brillants, à triples filets, à larges dentelles, à fastueux compartiments. C'est le Shakespeare de la petite propriété, le Corneille du mélodrame, l'interprète habile et souvent éloquent des passions et des vertus du peuple, qui, après les avoir un peu déprisés le matin, en a fait le soir emplette au poids de l'or, non sans gronder entre ses dents, comme un sanglier blessé à mort, et sans tourner sur ses compétiteurs son oeil tragique ombragé de noirs sourcils.


Théodore avait cessé d'écouter. Il venait de mettre la main sur un volume d'assez bonne apparence, auquel il s'était empressé d'appliquer son elzéviriomètre, c'est-à-dire le demi-pied divisé presque à l'infini, sur lequel il réglait le prix, hélas ! et le mérite intrinsèque de ses livres. Il le rapprocha dix fois du livre maudit, vérifia dix fois l'accablant calcul, murmura quelques mots que je n'entendis pas, changea de couleur encore une fois, et défaillit dans mes bras. J'eus beaucoup de peine à le conduire au premier fiacre venu.


Mes instances pour lui arracher le secret de sa subite douleur furent longtemps inutiles. Il ne parlait pas. Mes paroles ne lui parvenaient pas. C'est le typhus, pensai-je, et le paroxysme du typhus.


Je le pressais dans mes bras. Je continuais à l'interroger. Il parut céder à un mouvement d'expansion.


- Voyez en moi, me dit-il, le plus malheureux des hommes ! Ce volume, c'est le Virgile de 1676, en grand papier, dont je pensais avoir l'exemplaire géant, et il l'emporte sur le mien d'un tiers de ligne de hauteur. Des esprits ennemis ou prévenus pourraient même y trouver la demi-ligne. Un tiers de ligne, grand Dieu !


Je fus foudroyé. Je compris que le délire le gagnait.


- Un tiers de ligne ! répéta-t-il en menaçant le ciel d'un point furieux, comme Ajax ou Capanée.


Je tremblais de tous mes membres.


Il tomba peu à peu dans le plus profond abattement. Le pauvre homme ne vivait plus que pour souffrir. Il reprenait seulement de temps à autre : - Un tiers de ligne ! en se rongeant les mains. - Et je redisais tout bas : - Foin des livres et du typhus !


- Tranquillisez-vous, mon ami, soufflais-je tendrement à son oreille, chaque fois que la crise se renouvelait. Un tiers de ligne n'est pas grand'chose dans les affaires les plus délicates de ce monde !


- Pas grand'chose, s'écriait-il, un tiers de ligne au Virgile de 1676 ! C'est un tiers de ligne qui a augmenté de cent louis le prix de l'Homère de Nerli chez M. de Cotte. Un tiers de ligne ! Ah ! compteriez-vous pour rien un tiers de ligne du poinçon qui vous perce le coeur ?


Sa figure se renversa tout à fait, ses bras se roidirent, ses jambes furent saisies d'une crampe aux ongles de fer. Le typhus gagnait visiblement les extrémités. Je n'aurais pas voulu être obligé d'allonger d'un tiers de ligne le court chemin qui nous séparait de sa maison.


Nous arrivâmes enfin.


- Un tiers de ligne ! dit-il au portier.


- Un tiers de ligne ! dit-il à la cuisinière qui vint ouvrir.


- Un tiers de ligne ! dit-il à sa femme, en la mouillant de ses pleurs.


- Ma perruche s'est envolée ! dit sa petite fille, qui pleurait comme lui.


- Pourquoi laissait-on la cage ouverte ? répondit Théodore. - Un tiers de ligne !


- Le peuple se soulève dans le Midi, et à la rue du Cadran, dit la vieille tante qui lisait le journal du soir.


- De quoi diable se mêle le peuple ? répondit Théodore. - Un tiers de ligne !


- Votre ferme de la Beauce a été incendiée, lui dit son domestique en le couchant.


- Il faudra la rebâtir, répondit Théodore, si le domaine en vaut la peine. - Un tiers de ligne !


- Pensez-vous que cela soit sérieux ? me dit la nourrice.


- Vous n'avez donc pas lu, ma bonne, le Journal des Sciences médicales ? Qu'attendez-vous d'aller chercher un prêtre ?


Heureusement le curé entrait au même instant pour venir causer, suivant l'usage, de mille jolies broutilles littéraires et bibliographiques, dont son bréviaire ne l'avait jamais complètement distrait, mais il n'y pensa plus quand il eut tâté le pouls de Théodore.


- Hélas ! mon enfant, lui dit-il, la vie de l'homme n'est qu'un passage, et le monde lui-même n'est pas affermi sur des fondements éternels. Il doit finir comme tout ce qui a commencé.


- Avez-vous lu, sur ce sujet, répondit Théodore, le Traité de son origine et de son antiquité ?


- J'ai appris ce que j'en sais dans la Genèse, reprit le respectable pasteur ; mais j'ai ouï dire qu'un sophiste du siècle dernier, nommé M. de Mirabeau, a fait un livre à ce sujet.


- Sub judice lis est, interrompit brusquement Théodore. J'ai prouvé dans mes Stromates que les deux premières parties du monde étaient de ce triste pédant de Mirabeau, et la troisième de l'abbé le Mascrier. - Eh ! mon Dieu, reprit la vieille tante en soulevant ses lunettes, qui est-ce donc qui a fait l'Amérique ?


- Ce n'est pas de cela qu'il est question, continua l'abbé. Croyez-vous à la Trinité ?


- Comment ne croirais-je pas au fameux volume de Trinitate de Servet, dit Théodore en se relevant à mi-corps sur son oreiller, puisque j'en ai vu céder, ipsissimis oculis, pour la modique somme de deux cent quinze francs, chez M. de Mac Carthy, un exemplaire que celui-ci avait payé sept cents livres à la vente de La Vallière ?


- Nous n'y sommes pas, exclama l'apôtre un peu déconcerté. Je vous demande, mon fils, ce que vous pensez de la divinité de Jésus-Christ.


- Bien, bien, dit Théodore. Il ne s'agit que de s'entendre. Je soutiendrai envers et contre tous que le Toldos-jeschu, où cet ignorant pasquin de Voltaire a puisé tant de sottes fables, dignes des Mille et une Nuits, n'est qu'une méchante ineptie rabbinique, indigne de figurer dans la bibliothèque d'un savant !


- A la bonne heure ! soupira le digne ecclésiastique.


- A moins qu'on n'en retrouve un jour, continua Théodore, l'exemplaire in chartâ maximâ dont il est question, si j'ai bonne mémoire, dans le fatras inédit de David Clément.


Le curé gémit, cette fois, fort intelligiblement, se leva tout ému de sa chaise, et se pencha sur Théodore pour lui faire nettement comprendre, sans ambages et sans équivoques, qu'il était atteint au dernier degré du typhus des bibliomanes, dont il est parlé dans le Journal des Sciences médicales, et qu'il n'avait plus à s'occuper d'autre chose que de son salut.


Théodore ne s'était retranché de sa vie sous cette impertinente négative des incrédules qui est la science des sots ; mais le cher homme avait poussé trop loin dans les livres la vaine étude de la lettre, pour prendre le temps de s'attacher l'esprit. En plein état de santé une doctrine lui aurait donné la fièvre, et un dogme le tétanos. Il aurait baissé pavillon en morale théologique devant un saint-simonien. Il se retourna vers la muraille.


Au long temps qu'il passa sans parler, nous l'aurions cru mort, si, en me rapprochant de lui, je ne l'avais entendu sourdement murmurer : - Un tiers de ligne ! Dieu de justice et de bonté ! mais où me rendrez-vous ce tiers de ligne, et jusqu'à quel point votre omnipotence peut-elle réparer la bévue irréparable de ce relieur ?


Un bibliophile de ses amis arriva un instant après. On lui dit que Théodore était agonisant, qu'il délirait au point de croire que l'abbé le Mascrier avait fait la troisième partie du monde, et que depuis un quart d'heure il avait perdu la parole.


- Je vais m'en assurer, répliqua l'amateur. - A quelle faute de pagination reconnaît-on la bonne édition du César elzévir de 1635 ? demanda-t-il à Théodore.


- 153 pour 149.


- Très bien. Et du Térence de la même année ?


- 108 pour 104.


- Diable ! dis-je, les Elzévirs jouaient de malheur cette année-là sur le chiffre. Ils ont bien fait de ne pas la prendre pour imprimer leurs logarithmes !


- A merveille ! continua l'ami de Théodore. Si j'avais voulu écouter ces gens-ci, je t'aurais cru à un doigt de la mort.


- A un tiers de ligne, répondit Théodore, dont la voix s'éteignait par degrés.


- Je connais ton histoire, mais elle n'est rien auprès de la mienne. Imagine-toi que j'ai manqué, il y a huit jours, dans une de ces ventes bâtardes et anonymes dont on n'est averti que par l'affiche de la porte, un Boccace de 1527, aussi magnifique que le tien, avec la reliure en vélin de Venise, les a pointus, des témoins partout, et pas un feuillet renouvelé.


Toutes les facultés de Théodore se concentraient dans une seule pensée :


- Es-tu bien sûr au moins que les a étaient pointus ?


- Comme le fer qui arme la hallebarde d'un lancier.


- C'était donc, à n'en pas douter, la vintisettine elle-même !


- Elle-même. Nous avions ce jour-là un joli dîner, des femmes charmantes, des huîtres vertes, des gens d'esprit, du vin de Champagne. Je suis arrivé trois minutes après l'adjudication.


- Monsieur, cria Théodore furieux, quand la vintisettine est à vendre, on ne dîne pas !


Ce dernier effort épuisa le reste de vie qui l'animait encore, et que le mouvement de cette conversation avait soutenu comme le soufflet qui joue sur une étincelle expirante. Ses lèvres balbutièrent cependant encore : - Un tiers de ligne ! mais ce fut sa dernière parole.


Depuis le moment où nous avions renoncé à l'espoir de le conserver, on avait roulé son lit près de sa bibliothèque, d'où nous descendions un à un chaque volume qui paraissait appelé par ses yeux, en tenant plus longtemps exposés à sa vue ceux que nous jugions les plus propres à la flatter.


Il mourut à minuit, entre un Du Seuil et un Padeloup, les deux mains amoureusement pressées sur un Thouvenin.


Le lendemain nous escortâmes son convoi, à la tête d'un nombreux concours de maroquiniers éplorés, et nous fîmes sceller sur sa tombe une pierre chargée de l'inscription suivante, qu'il avait parodiée pour lui-même de l'épitaphe de Franklin :


CI-GIT
SOUS SA RELIURE DE
BOIS, UN EXEMPLAIRE IN-
FOLIO DE LA MEILLEURE ÉDITION
DE L'HOMME, ÉCRITE DANS UNE
LANGUE DE L'AGE D'OR QUE LE
MONDE NE COMPREND PLUS.
C'EST AUJOURD'HUI UN
BOUQUIN GATÉ, MA-
CULÉ DÉPAREILLÉ.
IMPARFAIT DU FRONTIS-
PICE, PIQUÉ DES VERS ET
FORT ENDOMMAGÉ DE POUR-
RITURE. ON N'OSE ATTEN-
DRE POUR LUI LES HON-
NEURS TARDIFS ET
INUTILES DE LA
RÉIMPRESSION.


CHARLES NODIER

THE BIBLIOMANIC, translated by WILLIAM BARKER and JOHN HARE



jueves, 26 de abril de 2012

Enrique Gómez Carrillo: Las grandes escritoras del Japón




LAS GRANDES ESCRITORAS

—¿Cómo explica usted —me pregunta una escritora— que habiendo siempre sido las mujeres tan despreciadas en el Japón, hayan producido tan bellas obras?... ¿O nos engañan los que nos dicen que la literatura japonesa ha sido en ciertas épocas una labor femenina?... ¿O nos engaña usted?
No; nadie os engaña. El desprecio que los japoneses tienen hoy por la mujer, no es un sentimiento originario de la nación. Galantes y caballerescos, los antiguos nipones demostraban, al contrario, por sus compañeras, un respeto tal vez mayor que el de los europeos. En el Palacio imperial, la favorita era todopoderosa. En la familia, la madre tenía más influencia que el padre. En las letras, en el estudio, en las ciencias, en fin, el primer puesto correspondía siempre a la mujer. «Es un hecho digno de mención y tal vez sin ejemplo —dice M. Aston— que una parte muy importante de las mejores obras literarias que el Japón ha producido, esté escrita por mujeres. La poesía Nara es, en gran parte, femenina, y en el período Heian, la mujer desempeñó un papel aún más saliente en el desarrollo de la literatura nacional. Las dos obras más notables que han llegado hasta nosotros de esa época, se deben igualmente a mujeres. Esto obedece, sin duda, a que las inteligencias masculinas hallábanse en aquellos tiempos absortas en los estudios chinos y a que el sexo fuerte consideraba como ocupación frívola componer novelas y poemas. También existía otra causa más efectiva: la situación de las mujeres era entonces muy diferente a la de hoy. Los hombres de aquella época no abundaban en las ideas comunes a la mayoría de las naciones de Extremo Oriente, en las cuales considerábase como una necesidad la sujeción de la mujer, y a ser posible, su reclusión.» Tan verdad es esto, que muchos libros chinos del siglo duodécimo hablan del Japón como de un país afeminado y le llaman el pueblo de las reinas. Esta frase fue fatal a la mujer nipona.
Orgullosos locamente y sensibles de un modo increíble al ridículo, los guerreros del Yamato sintiéronse heridos en su dignidad de hombres, de señores absolutos, y comenzaron, a principios del siglo XIII, a practicar el antifeminismo a la manera china. En la literatura, esta reacción se marca de un modo visible. Antes del año 1300, casi todas las obras grandes y bellas, son escritas por mujeres. Después de 1300 las mujeres ilustres abundan menos.
La obra más célebre del siglo X, el Genji Monogatari, que aún leen los japoneses con religiosa admiración, fue escrita por una dama de la corte de Kioto, llamada Murasaki Shikibu. Hija de un erudito, esta escritora pudo desde un principio consagrarse a los estudios literarios. Sin embargo, durante su juventud no escribió nunca una línea. Casó con un noble del clan Fushiwara y vivió en la corte. Viuda a los cincuenta años, retirose a un convento y se consagró a escribir su novela.
El personaje principal del famoso libro, es el príncipe Genji, que vive feliz al lado de dulces y sutiles amigas. El amor es su ocupación favorita. Pero también las letras y la filosofía le entusiasman. A cada momento la autora pone en sus labios discretos discursos sobre la naturaleza humana. Hablando de las mujeres, dice: «Algunas no tienen estimación más que por el talento que ellas poseen, y consideran el de los demás con desdén provocativo. Otras pueden causar honda impresión en el corazón de los hombres que no han tenido ocasión de conocerlas bien. Si son jóvenes y tienen atractivos físicos y modales comedidos, sus amigos pondrán gran empeño en disimular sus defectos morales, presentándonos sólo sus buenas cualidades. ¿Quién se atreverá a condenarlas sin pruebas y a decir: todo eso es falso? Pero después de conocerlas bien, seguramente a pesar de ser bellas, no siendo buenas, perderán mucho nuestra estimación».  Mas estos bellos razonamientos no impiden al príncipe enamorarse con suma facilidad de todas las bellas damas que pasan. Su ardor no conoce límites ni respetos sociales. Las mujeres casadas, las niñas apenas púberes, las maritornes, las mismas religiosas, le seducen. Su última aventura, la más bella de todas, comenzó en un convento. Genji, curioso, se había acercado al muro del santo monasterio y ocultándose entre los árboles veía lo que pasaba dentro. Muchas niñas jugaban. Entre ellas hallábase una que todo lo más tendría diez años, una linda y noble musmé, ataviada con un vestido blanco bordado de amarillo.
Su gracia era divina; sus cabellos caían en espesas ondulaciones sobre los hombres y sus hermosos ojos habíalos enrojecido el llanto. La religiosa que guardaba el convento, volvió la vista hacia ella y le dijo: — ¿Qué tenéis? ¿Habéis disputado con alguna compañera?...
Entretanto Genji, que las estaba contemplando, observó que entre la niña y la religiosa existía una gran semejanza. «Tal vez sea hija suya » — pensó. — «Imiki ha abierto la puerta de la jaula de mi pajarito y éste se ha escapado» —respondió la niña tristemente. «¡Ah! siempre Imiki comete travesuras de esa índole y atormenta a esta pobre niña —exclamó una sirvienta. —Todo porque no se le reprende nunca. ¿Dónde estara el pajarito? Tal vez los cuervos lo habrán cogido ya...» — Y diciendo esto, alejose. La cabellera de la religiosa caía libre y abundante sobre sus hombros y su figura era risueña y agradable. En el convento la llamaban el «ama Shonagon», y parecía tener por principal misión el cuidado de aquella niña. —¡Vamos, vamos, consolaos y sed buena! — díjole la religiosa. No olvidéis que mañana podemos morir, y olvidad vuestro pajarito. Ya os he dicho que es pecado tener encerrados a los pajaritos. ¡Venid, venid a mi lado!... La niña, con expresión de infinita pena y con los ojos llenos de lágrimas, acercose a la religiosa. —¡Qué divina será esta criatura cuando sea mujer! — pensaba Genji al contemplar sus lindos cabellos peinados hacia atrás y sus ojos enrojecidos por el llanto. En efecto, la niña a quien tanto admiraba, parecíase grandemente a una mujer que en otros tiempos habíale entregado todo su corazón. Y la religiosa entretanto acariciaba aquella preciosa cabeza y decía: «Hermosa cabellera tenéis, niña mía; lástima que os apene tanto tener que peinarla. ¡Cuánto me entristece que seáis tan frívola! —A vuestra edad, otras niñas son ya diferentes. Cuando vuestra difunta madre se casó, tenía doce años, y tampoco era muy juiciosa. Si me perdierais ahora ¿qué sería de vos?... La religiosa lloraba al pronunciar esas palabras. Aquel espectáculo emocionó profundamente a Genji... Poco después la niña y el príncipe se casaron para vivir muchos años perfectamente felices. Y así termina el delicioso cuento azul.
Otra figura de primer orden en la galería de mujeres de letras japonesas, es la de Sei Shonagon, autora de un libro titulado Makura No Soshi, lo que significa aproximadamente « notas de mi almohada ». Cuando uno lee estas notas tan ligeras, tan risueñas, no puede menos que envidiar a los nipones del año 1000 que, mientras los europeos se morían de miedo pensando en el fin deI mundo, sólo pensaban en vivir, en gozar, en amar. La existencia del palacio imperial, pintada por esta poetisa, que era al mismo tiempo dama de su majestad, tiene encantos de leyenda.
«Un día —dice— en el instante en que charlábamos de flores y de placeres en la terraza del palacio, su Excelencia el Dáinagon, hermano de la Emperatriz, entró. Llevaba una túnica color de cereza, y pantalones de púrpura obscura. Su vestido interior era blanco y ostentaba bordado en el cuello un precioso dibujo de tonos escarlatas. Como el Mikado estaba con la Emperatriz, se sentó en la terraza para leer un informe sobre asunto de Estado. Las damas de honor vestidas con telas de púrpura, de oro, de plata, de malva y de otros colores encantadores, resaltaban admirablemente sobre la suntuosa decoración del jardín. Después se sirvió la comida en las habitaciones imperiales. Por todas partes oíase el ruido del ir y venir de los criados. El aspecto del cielo era admirable. Cuando todo estuvo dispuesto, un mayordomo vino a pronunciar las sacramentales palabras: « La cena está servida ». El Mikado penetró por la puerta del centro seguido de su excelencia el Dáinagon; ambos fueron a colocarse entre las flores. Entonces la Emperatriz vino a sentarse a su lado y el Emperador la recibió haciéndola observar la belleza del espectáculo y terminó citando estos versos:
Los días y los meses desaparecen
Pero el Monte Mimoro permanece siempre.
»Yo me hallaba profundamente impresionada y desde el fondo de mi alma rogaba a los dioses porque todo aquello continuara así durante miles de años.»
 El voto de la poetisa no fue oído. Poco después la Emperatriz murió y con ella murieron también las frivolidades deliciosas de su corte. Las luchas civiles, las guerras de conquista, los grandes cambios de régimen, dieron a la corte de Kioto un carácter menos suave. Sobre las túnicas de claros matices, la mano del destino bordó vuelos obscuros de aves nocturnas. Pero Sei Shonagon no quiso nunca, ni aun en los últimos años de su vida, pasados en un convento, quejarse de sus amarguras. La mayor concesión que hizo a la adversa suerte, fue la de confesar un día que en la vida no todo es color de rosa : «Hay cosas detestables» —dijo. Y luego, como una marquesita Luis XVI, de las que oyendo rugir al pueblo que tenía hambre le ofrecían bombones, explica : «Sí; hay cosas detestables y helas aquí: El visitante que os cuenta una historia interminable cuando estáis de prisa. Si se trata de alguien con quien tenéis intimidad, podéis despedirlo prometiéndole escucharlo otra día; pero si se trata de gente a quien no podéis tratar con esa confianza, estáis perdidos; el exorcista que enviáis a buscar en un caso de enfermedad repentina y os recita los encantos en tono soñoliento; los niños que lloran y los perros que ladran cuando estáis escuchando a alguien; los ronquidos de un hombre a quien tratáis de ocultar y se queda dormido en el escondrijo; las gentes que viajan en un carruaje que cruje. Esas gentes son detestables, y si somos nosotros los que vamos en el vehículo, entonces el detestable es el propietario. Los que interrumpen vuestra conversación para hacer gala de su inteligencia. Todos los que interrumpen, jóvenes o viejos, son detestables. Los que cuando estáis refiriendo un suceso os interrumpen con un « ¡oh, ya lo sé!» y os dan una versión completamente diferente a la vuestra; el estar obligado a levantarse para recibir un visitante importuno, cuando precisamente os quedabais en la cama para no recibirlo, el estar en buenos términos con un hombre y oírle las alabanzas de una mujer que conoció hace muchos años; los que murmuran una oración cuando estornudan, y, por último, las pulgas cuando se meten entre vuestros vestidos y saltan de un lado a otro.»
¡Oh deliciosa, y tierna, y suave ironía! Leyendo estas páginas ligeras, toda la vida de la corte en que pasó su juventud la poetisa, resucita. Se ve que lo solemne era para fuera y que por dentro, entre las puertas erizadas de dragones, una frivolidad invencible reinaba. Las armas de los daimios podían llenarse de sangre en los cerros cercanos. No importaba. Las damas de la corte y de los claustros reían. Pero en cambio ¡cuánta emoción cuando un detalle cualquiera hería la coqueta susceptibilidad de las camareras de honor! En el Makura no Soshi, una de las páginas más vibrantes, es la que refiere la desventurada visita de la corte al Palacio del Daichin Narimasa. La carroza de su majestad penetró por la puerta del Este. Las damas nobles de servicio dieron un rodeo para entrar por los jardines, con objeto de no pasar ante los oficiales de la guardia. « Porque —dice la poetisa— estábamos todas despeinadas y queríamos que no nos viera nadie. Pero ¡ay, de nosotras!... Los coches cubiertos de palmas se encontraron de pronto detenidos en su marcha, por culpa de la estrechez del portal. Entonces colocaron el clásico camino de alfombras y nos invitaron a apearnos a pesar de nuestro enojo y grande indignación, y no hubo otro remedio; y era irritante ver cómo los cortesanos y los servidores, reunidos en la sala de la guardia, nos miraban pasar. Cuando nos presentamos ante Su Majestad y le contamos lo ocurrido, se burló de nosotras, diciéndonos: ¿Y ahora no os mira acaso nadie? ¿Por qué os presentáis ante mí en tal estado...? Aquí —repliqué yo— todo el mundo está acostumbrado a vernos, y llamaría la atención que nos hubiéramos adornado más de lo regular. Y además, ¿quién podía pensar que en un palacio como éste no pudieran entrar los coches por las puertas?... ¡Ah! Cuando encuentre al Daichin me voy a burlar lindamente de él. » ¿No hay algo de Versalles, algo de Trianón, algo de coquetería florida y de tierno mal humor parisiense, en esta escena tan lejana en el tiempo y tan lejana en el espacio?
Algunos lustros más tarde florecieron dos poetisas que tuvieron tanta fama como Sei Shonagon. La primera, Daini no Sammi, escribió en el año 1040 una larga historia amorosa titulada Gagoromo Monogatari. La segunda fue una hija del noble Suguroano Takasuye. Su única obra conocida, es una melancólica narración de viaje de Limosa a Kioto en 1046.
Ninguna de estas dos obras ha sido traducida en lenguas europeas.
Pero no sólo poetisas, ni contadoras de galantes aventuras produjo el Japón antiguo. El historiador más notable de la época clásica, es una mujer. De su vida, se sabe poco. Llamose Akazome Emon y floreció a fines del siglo XI. Su obra titulada Eiga Monogatari (Relato glorioso), es la crónica del reinado de Kuazan y de sus predecesores. Yo no conozco sino la última parte de esta obra y la encuentro tan bella, que siento no poder leer en el texto los libros anteriores. Con una sencillez llena de emoción, la historiógrafa imperial refiere las hazañas religiosas de aquel pobre Mikado que hace pensar, con sus amores por la reina muerta y con su locura mística, en Carlos II de España. Cuando Kuazan hubo enterrado a su augusta esposa, echose a llorar y llorando pasó días y días. AI fin se dijo: « ¡Ay de mí!... ¡Cuán grandes debieron ser los pecados de Kokiden!... ¡Cuán grandes sus faltas en una existencia pasada!... ¿Por qué murió tan joven?... ¡Ah, si yo encontrara algún medio de olvidar todo eso! » La historiadora, después de reproducir tales lamentaciones, explica lo que pasaba en el alma del monarca: « Su augusto corazón —dice— sentíase con frecuencia turbado por extraños pensamientos religiosos. El primer ministro y el Tchiounagon veían con pena esas manifestaciones que fatalmente encaminaban al monarca a un alarmante misticismo. Gonkiou, superior del monasterio de Kuazan, era diariamente llamado para explicarle las escrituras. Abandonar el mundo y abrazar el estado religioso, decíase en la Corte, es cosa fácil para dicha ¿pero qué ocurriría después? Y el monarca continuaba manoseando sus negros pensamientos. Ya no cabía admitir duda; esa influencia del espíritu tétrico era hereditaria; su padre Reizei-in había muerto loco. Y la conducta insólita, inconsciente, del Mikado, era vigilada atentamente; pero en la noche del duodécimo día del sexto mes de aquel año, el monarca desapareció repentinamente. La alarma fue grande, y todos, sin excepción, nobles, servidores, guardias y hasta domésticos humildes, provistos de antorchas, buscáronle por mil partes. Pero inútilmente. El primer ministro y sus colegas, con los nobles, pasaron la noche reunidos en asamblea; la consternación era general. EI Tchiunagon prosternado ante el altar de los dioses protectores del Palacio, suplicábales con lágrimas en los ojos y grandes lamentos, que descubrieran el lugar en que hallábase oculto su magnífico señor... Algunas tropas fueron enviadas también a todos los templos budistas; pero sin resultado alguno. Al mismo tiempo las reales esposas del monarca lloraban atribuladas sin saber qué terrible acontecimiento había ocurrido. Apareció el alba. Todas las pesquisas habían resultado infructuosas. Por fin, el Tchiunagon y Satchiu-ben-Korenari decidieron ir al monasterio de Kuazan, y allí encontráronle vestido ya de fraile. Al verlo, los dos se prosternaron ante él lanzando exclamaciones y lamentos y gritos de inquietud. El ejemplo cundió y los dos se hicieron religiosos.
 Pocas páginas hay para mí, no sólo en la Iiteratura japonesa sino en los anales del mundo entero, tan intensas como ésta.
Después de la gran historiadora, he aquí a la gran viajera literaria. Se llama Abutsu Ni y es de estirpe imperial. De su vida no se sabe sino muy poca cosa. Como todas las damas nobles del siglo XIII, vivió encerrada en su palacio al lado de su esposo. Al enviudar, hizo un viaje a Kamakura, en donde vivía un hijo suyo. Su célebre Izakoi-Nikki es el relato poético de este viaje, en el cual, más que aventuras, hay paisajes, cielos, puestas de sol, espectáculos de belleza.
Después de Abutsu Ni, ninguna escritora nipona ha sido, como sus abuelas de siglos lejanos, digna de que los hombres conserven su nombre con religioso entusiasmo. Al matar el respeto por la mujer, la influencia china secó la más pura fuente de arte literario japonés.

ENRIQUE GÓMEZ CARRILLO - El alma japonesa (París, Garnier, 1907.)


viernes, 20 de abril de 2012

Luis de Camoëns y Leopoldo Lugones





SONETO LXXX

Alma minha gentil, que te partiste
Tão cedo desta vida descontente,
Repousa lá no Céu eternamente,
E viva eu cá na terra sempre triste.

Se lá no assento etéreo, onde subiste,
Memória desta vida se consente,
Não te esqueças daquele amor ardente
Que já nos olhos meus tão puro viste.

E se vires que pode merecer-te
Alguma cousa a dor que me ficou
Da mágoa, sem remédio, de perder-te,

Roga a Deus, que teus anos encurtou,
Que tão cedo de cá me leve a ver-te,
Quão cedo de meus olhos te levou.





A LA MUERTE DE CATALINA DE ATAIDE

Alma mía gentil, que te partiste
Tan pronto de esta vida indiferente,
Reposa allá en el cielo eternamente,
Y viva yo en la tierra siempre triste.

Si en el etéreo asiento al cual subiste,
Memoria de esta vida se consiente,
No te olvides de aquel amor ardiente,
Aunque tan puro, que en mis ojos viste.

Y si vieras que puede merecerte
Algún caso el dolor que me quedó
Del daño irremediable de perderte,

Ruega a Dios, que tus años abrevió,
Que tan presto de acá me lleve a verte
Cuan pronto de mis ojos te llevó.  


martes, 17 de abril de 2012

Omar Khayyam y Leopoldo Lugones




EL COLLAR DE ZAFIROS
de OMAR KAYAM


En La Nación, de Buenos Aires, del 28 de marzo de 1926 publicó Lugones, con este título, la traducción de cuarenta y cinco estrofas (cuartetas) de Omar Kayam. La acompañó de una extensa exposición del estado cultural de Persia en la época en que las mismas se compusieron y sobre la personalidad del autor, haciendo presente que el título de la publicación obedece a simbolizar el zafiro en los antiguos lapidarios la franqueza y la fidelidad. Recuerda también que las cuartetas carecen de conexión episódica; ello justifica la forma de la actual publicación.
(Nota de Pedro Miguel Obligado. Leopoldo Lugones. Obras poéticas completas. Aguilar, 1959.)





Todos saben que nunca murmuré una oración.

Que mis imperfecciones jamás ocultar quiero.

No sé si existen una justicia y un perdón.

Mas tengo confianza, pues siempre fui sincero.


*



Más allá de la tierra y lo infinito,

El cielo y el infierno perseguí.

Hasta que me anunció un solemne grito:

El cielo y el infierno están en ti.


*



Refugiado en mezquita, sinagoga o convento,

Por temor al infierno, busca el débil la calma.

Quien sabe la grandeza de Dios, no siembra en su alma

La cizaña del miedo ni del remordimiento.

*



Goza todos los frutos de la vida. Alza en todos


Los festines la copa más pródiga. No creas


Que Dios de nuestros vicios o virtudes se ocupa,

Ni te frustres ninguna felicidad que veas.

*



Otrora la mezquita frecuenté con empeño.

Si no rezaba, rico de esperanza volvía,

Ahora voy todavía

A las mezquitas donde la sombra es grata al sueño.

*



El Creador no habría formado deleznable,

Sino para su propia destrucción, todo ser.

Si ello fuera por feo, ¿quién es el responsable?

Si fuera por hermoso, no acierto a comprender.

*



Por la variada tierra va uno que no es creyente.

Infiel, rico ni pobre; ni Dios ni ley acata.

Que en la verdad no cree, ni de aseverar trata.

¿Quién será ese hombre triste, valeroso y prudente?

*



Faz de la dicha ajena, voces de amor: vuestro arte

Es, conmigo, ilusorio. Yo sé lo que he elegido,

Y cuando alguien me dice: «Dios ha de perdonarte»,

Rechazo sereno ese perdón que no he pedido.

*



No me arredra la muerte. Prefiero su sentencia

Inapelable, a aquella que al nacer me impusieron.

¿Qué es la vida? Un presente que a mi pesar me hicieron.

Y a devolver me afronto con fría indiferencia.

*



El vasto mundo, un grano de polvo en el espacio.

La ciencia de los hombres, palabras. La miríada

De pueblos, bestias, plantas de los climas, espectros.

Y el fin de tus perpetuas meditaciones, nada.


*

La vida es un monótono juego en el que estás cierto

De aquestas dos ganancias: dolor y muerte impía.

Dichoso el niño que al nacer ha muerto.

Y el que no vino al mundo, más feliz todavía.


*

Sueño sobre la tierra. Bajo la tierra sueño.

Sobre y bajo ella, cuerpos tendidos de igual modo.

Vana cualquiera senda, vano cualquier empeño.

Unos humanos llegan y otros se van, y es todo.

*



Mi nacimiento al mundo ningún bien ha traído.

Su esplendor, con mi muerte, no ha de disminuir.

Nadie puede explicarme por qué es que aquí he venido,

Ni por qué he de partir.


*

Sólo aquel que se cree sabio y aquel que nada

Quiere saber, alcanzan la dicha. Yo explorar

Intenté los secretos del mundo, y volví solo.

Envidiando a los ciegos que encontraba al pasar.


*

Escucha este profundo secreto de la suerte:

Cuando iluminó al mundo la primera alborada.

No era ya Adán más que una criatura desdichada.

Que invocaba la noche, que llamaba la muerte.


*

Plantas, perfumes, copas, labios, ojos, cabellos;

Bajo el tiempo mudable, juguetes todos ellos.

Virtud, piedad, constancia, penas, loas, querellas:

Bajo el soplo del tiempo, cenizas todas ellas.


*

Con lámparas apagadas y esperanzas encendidas,

Amanece.

Con lámparas encendidas y esperanzas apagadas.

Anochece.


*

Ajeno a lo que puede traerte la fortuna.

Trata hoy de ser dichoso. Llena tu copa ufana.

Y bebe, reposándote al claro de la luna

Que inútilmente, acaso, te buscará mañana.


*

Mi juventud florece de nuevo. ¡Vino! ¡Vino!

Si embriaga bien, no importa la clase del licor

Ni haré melindres, porque fácilmente adivino

Que al fin me saldrá amargo, cual la vida al mejor.


*

Sólo me importe el vino por tu copa brindado.

Tu boca es el más bello clavel de los hechizos.

Que el vino era como tus mejillas, rosado,

Y mis remordimientos leves como tus rizos.


*

Tuve sueño y me dijo la cordura: «Las rosas

De la dicha, en el sueño no acostumbran abrir.

¡Resístete a ese hermano de la muerte! ¡Alza el vaso!

Tienes la eternidad para dormir.»


*

¡Vino que a mi alma enferma dé un bálsamo divino!

¡Vino de aroma grato! ¡Vino color de rosa!

iVino que apague el fuego de mis dolores! ¡Vino!...

Y tu laúd de cuerdas de seda, ¡oh mi amorosa!


*

El cielo es a manera de una copa volcada

Bajo la cual, a tientas, van filósofo y sabio.

Todo el amor agota gozando con tu amada.

Cual se dan jarra y copa su sangre labio a labio.


*

« ¡No bebas más—me dicen—, oh Kayam! » Yo replico:

«Cuando bebo, comprendo lo que dicen la rosa,

El tulipán, el lino y el jazmín; y me explico

Hasta lo que no puede decirme mi amorosa.


*

Caeremos en la senda del amor, pisoteados

Por el Destino. ¡Oh niña que la embriaguez me das!

Ven ahora, a ofrecérmela en tus labios amados.

Que pronto será un poco de polvo y nada más.


*

Reserva mi tristeza, como el pájaro herido

Para morir se oculta: ¡Vino, ironía alada!

¡Más vino, rosas, cantos! Y en delicioso olvido

Tu indiferencia para mi pena, ¡oh bien amada!


*

Un pedazo de pan, un poco de agua fresca.

La sombra de algún árbol y tus ojos. No existe

Comparado conmigo.

Ni sultán más dichoso, ni mendigo más triste.



 *

Amor que no atormenta, no es amor. El brasero


¿Quema, acaso, lo mismo que el tizón ardedor?

Día y noche, durante su vida, el verdadero

Amante, se consume de alegría y dolor.


*

Vil corazón el que no sabe darte

En la embriaguez de amor, ciencia y fortuna.

Si no amas, ¿cómo pueden encantarte

El sol ardiente ni la fresca luna?


*

La amapola, en la sangre de algún rey enterrado,

Sorbe su rojo ardiente.

La violeta nace del lunar agraciado

Que fue estrella en el rostro de alguna adolescente.


*

Sentado ante su torno vi ayer un alfarero,

Que al modelar las asas y los flancos del vaso,

Iba amasando, acaso,

Con cráneos de sultanes, manos de pordioseros.


*

Seguir quisieran todos el rumbo verdadero.

Sendero que unos buscan y otros dan por hallado.

Hasta que un día oímos este apotegma honrado:

«No hay rumbo ni sendero.»


*

Conténtate con pocos amigos. No procures

Eternizar en nadie tu propia simpatía.

Y antes de dar tu mano, bueno es que te asegures

Si la otra que estrechas no ha de golpearte un día.


*

Huyen los días, rápidos como el agua del río

O el viento del desierto, que a ningún punto va.

Dos de ellos menosprecia mi indiferente hastío:

El que pasó ayer y el que mañana llegará.


*

Los sabios y filósofos más ilustres, marcharon

Entre las densas sombras de la duda, aunque fueron

Las antorchas de su época. ¿Qué hicieron? Pronunciaron

Algunas frases vagas y después se durmieron.


*

He aquí la verdad única: Somos cual los peones

Del ajedrez con que hace Dios su eterna jugada.

El nos mueve y detiene, cambia las posiciones.

Y luego vuelve a echarnos en el cofre de la nada.


*

Un día en la taberna, pregunté, cual se debe,

A un anciano filósofo, por los que ya se han ido.

Y así me respondió cauto y cumplido:

—No volverán. Es todo lo que sé. Calla y bebe.


*

Tuve ilustres maestros y mi saber triunfó.

Cuando ahora evoco al sabio que fui, comparo el caso

Con el agua que toma la forma de su vaso,

O bien con la humareda que el viento disipó.


*

¿Cuándo es que nací? ¿Cuándo moriré? ¿Quién recuerda

Su primer día? El último, ¿quién podría fijar?

Ven, mi flexible amada, quiero pedirle al vino

Que esa eterna ignorancia me permita olvidar.


*

¿Dónde irá ese jinete que en la tarde ha pasado?

¿Al bosque? ¿Al llano? ¿Dónde?... ¡No sé! ¿Cómo estaré

Mañana? ¿Encima o bajo la tierra acostado?

No sé…


*

Que tu sabiduría no moleste al vecino.

Domina orgullo y cólera, y si alcanzar supieras

La paz definitiva, sonríele al Destino

Que te hiere implacable, pero tú nunca hieras.


*

Olvídate del premio que ayer te fue negado.

Sé feliz. No te entregues a sufrir ni a esperar.

Lo que viene está escrito ya en el libro ignorado

Que el soplo de lo eterno va hojeando al pasar.


*

Tu vida no fue inútil si en tu pecho ha logrado

La bien plantada rosa del amor florecer.

Si entender la palabra de Dios has procurado,

Y si alzaste la copa, sonriendo al placer.


*

Si avaro dolor hasta las lágrimas te quita,

Las llovidas praderas evoca con cariño.

Si, harto del día, anhelas que una noche infinita

Sepulte al mundo, acuérdate del despertar de un niño.


*

Cierra tu Corán. Piensa libremente y amplía

Tu visión sobre el mundo. Con todo miserable

Comparte lo que tengas. Perdona al que es culpable

No entristezcas a nadie, y oculta tu ironía.



EDICIONES DE LA MIRÁNDOLA acaba de publicar TREINTA Y SIETE VERSIONES HOMÉRICAS Y OTRAS TRADUCCIONES, de LEOPOLDO LUGONES.