SI VOUS PARLIEZ, SEIGNEUR...
Si vous parliez, Seigneur, je
vous entendrais bien,
Car toute humaine voix pour mon
âme s’est tue,
Je reste seule auprès de ma
force abattue,
J’ai quitté tout appui, j’ai
rompu tout lien.
Mon cœur méditatif et qui boit
la lumière
Vous aurait absorbé, si,
transgressant les lois,
Comme le vent des nuits qui
pénètre les pierres
Votre verbe enflammé fût
descendu sur moi !
Nul ne vous souhaitait avec
tant d’indigence :
Je vous aurais fêté au son du
tympanon
Si j’avais, dans mon triste et
studieux silence,
Entendu votre voix et connu
votre nom.
Mais jamais rien à moi ne vous
a révélé,
Seigneur ! ni le ciel
lourd comme une eau suspendue,
Ni l’exaltation de l’été sur
les blés,
Ni le temple ionien sur la
montagne ardue ;
Ni les cloches qui sont un
encens cadencé,
Ni le courage humain, toujours
sans récompense,
Ni les morts, dont l’hostile et
pénétrant silence
Semble un renoncement
invincible et lassé ;
Ni ces nuits où l’esprit retient
comme une preuve
Son aspiration au bien
universel ;
Ni la lune qui rêve, et voit
passer le fleuve
Des baisers fugitifs sous les
cieux éternels.
Hélas ! ni les matins de
ma brûlante enfance,
Où, dans les prés gonflés d’un
nuage d’odeur,
Je sentais, tant l’extase en
moi jetait sa lance,
Un ange dans les cieux qui
m’arrachait le cœur !
Pourtant, ayez pitié ! Que
votre main penchante
Vienne guider mon sort
douloureux et terni ;
J’aspire à vous, Splendeur,
Raison éblouissante !
Mais je ne vous vois pas, ô mon
Dieu ! et je chante
À cause du vide infini !
SI TU HABLARAS, SEÑOR...
Si tú
hablaras, Señor, yo bien podría oírte,
pues toda
voz humana para mi alma ha callado,
Me encuentro
sola junto a mi fuerza abatida,
Todo
apoyo dejé, todo lazo rompí.
Mi
corazón que bebe la luz, meditabundo,
Te habría
absorbido si, transgrediendo las leyes,
Como el
viento nocturno que las piedras horada
Tu ígneo
verbo en mí hubiera descendido.
Nadie te deseó
con indigencia tanta:
al son
del tamboril te habría celebrado
Si en mi
silencio triste y estudioso yo hubiera
conocido
tu nombre y escuchado tu voz.
Pero
nada, Señor, me reveló tu ser,
Jamás: ni
el cielo plúmbeo como agua amenazante,
Ni el
ardor estival en los campos de trigo,
Ni el
templo jónico en lo alto de la ardua montaña;
Ni el
cadencioso incienso que son las campanadas
Ni el
humano coraje, siempre sin recompensa,
Ni los
muertos, de hostil y profundo silencio,
Que
parece invencible y cansada renuncia;
Ni esas
noches en que, en su aspiración al bien
Universal,
encuentra una prueba el espíritu:
Ni la luna
que sueña, y ve pasar el río
De los besos
fugaces bajo el eterno cielo.
Ni las
mañanas, ¡ay!, de de mi niñez ardiente,
Cuando, en prados henchidos de una nube de
aroma,
Sentía
(¡tanto el éxtasis en mí su lanza hundía!)
Un ángel
en los cielos que me rasgaba el pecho.
Aun así,
¡apiádate! Que tu mano se tienda
Para
guiar mi suerte dolorosa y oscura;
¡A Ti
aspiro, Esplendor, deslumbrante Razón!
¡Pero no
puedo verte, oh Dios mío, y es por este
Infinito
vacío que yo canto!
Traducción, para Literatura & Traducciones, de Carlos Cámara y Miguel Ángel Frontán


