domingo, 15 de marzo de 2020

José María de Heredia y Antonio de Zayas: Hércules y los Centauros

HÉRCULES Y LOS CENTAUROS

NEMEA

El Domador intrépido al peligro se lanza
y prosigue las huellas del León bosque adentro
solo. Un rugido a poco delata el rudo encuentro.
Todo ha callado. Húndese el sol en lontananza.

Á través del abrojo del campo sin labranza
el pastor, que a Tyrinto, de la Argólida centro,
va, con ojos que agranda el espanto ve dentro
de las lindes del bosque la fiera en acechanza.

Exhala un ay. Ha visto del Terror de Nemea
sobre el sangriento cielo la fauce gigantea,
las despeinadas crines y el colmillo sañoso;

y forma Ocaso bajo la horrible piel, flotante
alrededor del Hijo de Júpiter Tonante,
mezcla de hombre y de bestia, un héroe monstruoso.


ESTÍNFALO


Doquier ante él se ciernen los pájaros marciales
sobre el margen do el Héroe sus intenciones palia;
y, en rápidos revuelos, del lago de Estinfalia
azotan insolentes los trágicos cristales.

Otros, rastreros, rozan con sus alas ferales
la frente que conoce los ósculos de Onfalia,
cuando, en el fango hundiendo valiente la sandalia,
el Arquero soberbio avanza en los juncales.

Entonces de la nube que audaz agujerea
llueven siniestros dardos que el rayo colorea,
de franjas escarlata rayando el denso tul.

Y al fin el Sol admira, tras de los nubarrones
que el arco ha convertido en fúlgidos jirones,
a Alcides que sangriento sonríe al cielo azul.


NESO

Cuando cual mis hermanos vivía yo, ignorante
del Bien y el Mal, hallaba mi imperio en el retiro
de los Montes Tesálicos so un cielo de zafiro
lavando en fuentes gélidas mi bermejo semblante.

Así crecí robusto y alegre al sol flamante:
y sólo, saturando el aire que hoy respiro
angustioso, los rastros de las yeguas de Epiro
turbaban ya mi sueño ya mi carrera errante.

Mas ¡ay! desde que pude ver ¡oh suerte funesta!
que Deyanira en brazos de Hércules se recuesta,
mi crin se eriza y siento ser víctima de Momo;

porque un Dios implacable, maldito sea su nombre,
ha mezclado en la sangre caliente de mi lomo
el celo del caballo y amor que doma al hombre.


LA CENTAURO

Ayer, salvando bosques y espontáneos jardines,
los agrestes Centauros en rebaño vagaban:
sol y sombra en sus lomos movíanse y mezclaban
ellos con nuestras rubias crenchas sus negras crines.

Hoy en vano el Estío triunfa. Zarzas ruines
vemos crecer en donde gayas flores brotaban;
y a la noche la pena que sentimos agravan
relinchos de caballos en remotos confines.

Mermándose la raza a que tanto amor tuve
de los hijos portentos que engendrara la Nube,
nos abandona y sigue a la Mujer, ardiente.

¡Hasta su amor carnal nos humilla sin tregua!
Y es el grito que arráncanos un relincho inconsciente.
¡Y su celo en nosotros sólo abraza a la yegua!


CENTAUROS Y LAPITAS

La nupcial muchedumbre va al festín agolpada:
Centauros y guerreros ebrios y fanfarrones.
Vese la carne heroica, al arder los hachones,
con la piel de los hijos de la Nube mezclada.

Risas, tumulto... Un grito... La Esposa profanada
rechaza el desmán bajo la púrpura en jirones.
Al chocar con los cascos lanza el bronce sus sones
y entre roncos aullidos es la mesa volcada.

Aquel, a cuya vera es el más grande chico,
se alza. En su cráneo frúncese de un león el hocico
orlado de crin áurea. Es Hércules tremendo.

De un salto de un extremo va al otro de la sala
enorme y ante su ojo que indignación exhala,
el monstruoso rebaño retrocede mugiendo.


FUGA DE CENTAUROS

Huyen ebrios de sangre, crimen y rebelión,
hacia el profundo valle que esconde la floresta:
aguíjales el miedo, la muerte sienten presta
y a la noche olfatean un olor de león.

Atraviesan hollando la Hidra y el Estelión,
barrancos cien en torno de la montaña enhiesta;
y ven en lontananza dibujarse la cresta
del Osa, del Olimpo o del negro Pelión.

Tal vez un fugitivo sobre las ancas gira,
encabritase, en torno sobresaltado mira
y al fraterno rebaño se une por un atajo;

porque ha visto a la Luna transparente y lozana
alargar detrás de ellos cual supremo espantajo,
el horror gigantesco de la sombra Herculana.



HERCULE ET LES CENTAURES

NÉMÉE 

Depuis que le Dompteur entra dans la forêt
En suivant sur le sol la formidable empreinte,
Seul, un rugissement a trahi leur étreinte.
Tout s'est tu. Le soleil s'abîme et disparaît.

À travers le hallier, la ronce et le guéret,
Le pâtre épouvanté qui s'enfuit vers Tirynthe
Se tourne, et voit d'un œil élargi par la crainte
Surgir au bord des bois le grand fauve en arrêt.

Il s'écrie. Il a vu la terreur de Némée
Qui sur le ciel sanglant ouvre sa gueule armée,
Et la crinière éparse et les sinistres crocs ;

Car l'ombre grandissante avec le crépuscule
Fait, sous l'horrible peau qui flotte autour d'Hercule,
Mêlant l'homme à la bête, un monstrueux héros.

STYMPHALE

Et partout devant lui, par milliers, les oiseaux,
De la berge fangeuse où le Héros dévale,
S'envolèrent, ainsi qu'une brusque rafale,
Sur le lugubre lac dont clapotaient les eaux.

D'autres, d'un vol plus bas croisant leurs noirs réseaux,
Frôlaient le front baisé par les lèvres d'Omphale,
Quand, ajustant au nerf la flèche triomphale,
L'Archer superbe fit un pas dans les roseaux.

Et dès lors, du nuage effarouché qu'il crible,
Avec des cris stridents plut une pluie horrible
Que l'éclair meurtrier rayait de traits de feu.

Enfin, le Soleil vit, à travers ces nuées
Où son arc avait fait d'éclatantes trouées,
Hercule tout sanglant sourire au grand ciel bleu.

NESSUS

Du temps que je vivais à mes frères pareil
Et comme eux ignorant d'un sort meilleur ou pire,
Les monts Thessaliens étaient mon vague empire
Et leurs torrents glacés lavaient mon poil vermeil.

Tel j'ai grandi, beau libre, heureux, sous le soleil ;
Seule, éparse dans l'air que ma narine aspire,
La chaleureuse odeur des cavales d'Épire
Inquiétait parfois ma course ou mon sommeil.

Mais depuis que j'ai vu l'Épouse triomphale
Sourire entre les bras de l'Archer de Stymphale
Le désir me harcèle et hérisse mes crins ;

Car un Dieu, maudit soit le nom dont il se nomme !
A mêlé dans le sang enfiévré de mes reins
Au rut de l'étalon l'amour qui dompte l'homme.

LA CENTAURESSE

Jadis, à travers bois, rocs, torrents et vallons,
Errait le fier troupeau des Centaures sans nombre ;
Sous leurs flancs le soleil se jouait avec l'ombre ;
Ils mêlaient leurs crins noirs parmi nos cheveux blonds.

L'été fleurit en vain l'herbe. Nous la foulons
Seules. L'antre est désert que la broussaille encombre ;
Et parfois je me prends, dans la nuit chaude et sombre,
À frémir à l'appel lointain des étalons.

Car la race de jour en jour diminuée
Des fils prodigieux qu'engendra la Nuée,
Nous délaisse et poursuit la Femme éperdument.

C'est que leur amour même aux brutes nous ravale ;
Le cri qu'il nous arrache est un hennissement,
Et leur désir en nous n'étreint que la cavale.

CENTAURES ET LAPITES

La foule nuptiale au festin s'est ruée,
Centaures et guerriers ivres, hardis et beaux ;
Et la chair héroïque, au reflet des flambeaux,
Se mêle au poil ardent des fils de la Nuée.

Rires, tumulte… Un cri !… L'Épouse polluée
Que presse un noir poitrail, sous la pourpre en lambeaux
Se débat, et l'airain sonne au choc des sabots
Et la table s'écroule à travers la huée.

Alors celui pour qui le plus grand est un nain,
Se lève. Sur son crâne, un mufle léonin
Se fronce, hérissé de crins d'or. C'est Hercule.

Et d'un bout de la salle immense à l'autre bout,
Dompté par l'œil terrible où la colère bout,
Le troupeau monstrueux en renâclant recule.

FUITE DE CENTAURES

Ils fuient, ivres de meurtre et de rébellion,
Vers le mont escarpé qui garde leur retraite ;
La peur les précipite, ils sentent la mort prête
Et flairent dans la nuit une odeur de lion.

Ils franchissent, foulant l'hydre et le stellion,
Ravins, torrents, halliers, sans que rien les arrête ;
Et déjà, sur le ciel, se dresse au loin la crête
De l'Ossa, de l'Olympe ou du noir Pélion.

Parfois, l'un des fuyards de la farouche harde
Se cabre brusquement, se retourne, regarde,
Et rejoint d'un seul bond le fraternel bétail ;

Car il a vu la lune éblouissante et pleine
Allonger derrière eux, suprême épouvantail,
La gigantesque horreur de l'ombre Herculéenne.