viernes, 7 de septiembre de 2012

Léon Daudet: Retrato de Jean Lorrain


PORTRAIT DE JEAN LORRAIN


J'ai toujours eu, pour ce pauvre diable, une horreur insurmontable, quasi physique, la clinique, à cette époque, étant beaucoup moins bien fixée sur son cas et les similaires qu'elle ne l'est maintenant. Lorrain avait une tête poupine et large à la fois de coiffeur vicieux, les cheveux partagés par une raie parfumée au patchouli, des yeux globuleux, ébahis et avides, de grosses lèvres qui jutaient, giclaient et coulaient pendant son discours. Son torse était bombé comme le bréchet de certains oiseaux charognards. Lui se nourrissait avidement de toutes les calomnies et immondices que colporte la manie ancillaire des salonnards, des filles rentées et des souteneurs chic. Qu'on imagine le clapotement d'un égout servant de déversoir à un hôpital. Ce maniaque d'un genre spécial, participant à deux ou trois sexes, ne manquait pas de « patte » comme on disait alors, ni « d'écriture artiste ». Il avait inventé une forme de chronique éparpillée et bavarde, composée des ânonnements, balbutiements et bouts de dialogue des esthètes qui mangent le potage à l'éther et s'habillent en messieurs, quand ils sont des dames, en dames quand ils sont des messieurs. Il en encombrait les journaux, ainsi que d'allusions empoisonnées, de rosseries pseudo-féminines aux maisons où on l'avait reçu, où on ne le recevait plus, où on ne le recevait pas encore. La veulerie de l'époque apparaissait dans ce fait que Lorrain était toléré et ne recevait pas quotidiennement la ration de caresses de cannes et de frictions de pied dans le derrière à laquelle il avait certainement droit. Bon fils, ce qui semble paradoxal, il vivait à Auteuil auprès de sa mère, personne d'aspect redoutable, que j'avais baptisée Sycorax, en souvenir de Caliban. Le soir, il allait retrouver, dans les bals louches du Point-du-Jour, des camarades de sa complexion. D'où des histoires de commissariat de police qui se dénouaient généralement à l'amiable, Jean le Journaliste étant connu et au-dessous de la déconsidération. Neuf mois sur douze, il déambulait de Toulon à Nice, le long de ce littoral qui est devenu le conservatoire des perversions sexuelles, en même temps que le Bottin de l'espionnage allemand. Il rapportait de là des études vireuses, putrides, décomposées à son image, mais qui demeurent de bons spécimens de psychopathie pittoresque.

LÉON DAUDET (Fantômes et vivants)

Ediciones De La Mirándola acaba de publicar La maldición de los Noronsoff, de JEAN LORRAIN. En el sitio de la editorial se puede leer la ficha de presentación de la obra y descargar un fragmento gratuito.


RETRATO DE JEAN LORRAIN

Siempre tuve por ese pobre diablo un rechazo insuperable, casi físico; la medicina clínica, en aquella época, veía con mucho menor claridad su caso y otros similares que hoy en día. Lorrain tenía una cara a un tiempo rubicunda y ancha de peluquero vicioso, el pelo partido al medio con una raya perfumada con pachulí, ojos globulosos, atónitos y ávidos, labios gruesos que rezumaban, babeaban y escupían cuando hablaba. Tenía un torso abombado como la pechuga de ciertas aves carroñeras. Él se alimentaba ávidamente de todas las calumnias e inmundicias que lleva de un lado a otro la manía ancilar de los esnobs de los salones mundanos, de las mujerzuelas rentadas y de los rufianes chics. Imáginese el borboteo de una alcantarilla que sirve de desagüe a un hospital. Ese maniático de un género especial, que pertenecía a dos o tres sexos a la vez, no carecía de garra, como se decía entonces, ni de escritura de artista. Había inventado una forma de crónica dispersa y charlatana, compuesta por los monótonos parloteos, balbuceos y fragmentos de diálogo de los estetas que toman sopa de éter y se visten como señores cuando son damas y como damas cuando son señores. Atestaba con ella los periódicos, así como con alusiones venenosas, impertinencias seudo femeninas sobre las casas donde se lo había recibido, donde ya no se lo recibía, donde todavía no lo recibían. La pusilanimidad de la época se evidenciaba en el hecho de que a Lorrain se lo toleraba y no recibía diariamente la ración de caricias de bastón y de fricciones de pie en el trasero a la que ciertamente tenía derecho. Buen hijo, lo que parece paradójico, vivía en Auteuil con su madre, persona de aspecto temible a la que yo había bautizado Sycorax en recuerdo de Calibán. Por la noche iba a reunirse, en los bailes de mala fama del Point-du-Jour, con amigos de su misma catadura. De donde nacían enredos de comisaría que por lo general se arreglaban de manera amistosa, dado que Jean el Periodista era conocido y estaba por encima del descrédito. Nueve meses de cada doce deambulaba de Tolón a Niza, a lo largo de ese litoral que se ha convertido en el conservatorio de las perversiones sexuales, a la vez que en el Quién es Quién del espionaje alemán. Volvía de allí con estudios ponzoñosos, pútridos, descompuestos a su imagen y semejanza, pero que siguen siendo buenos especímenes de psicopatía pintoresca.

Traducción de Carlos Cámara.