Fortune et mort de La Vauguyon
(1693)
(1693)
Un autre évènement surprit moins qu'il ne fit
admirer les fortunes. Le dimanche 29 novembre, le Roi, sortant du salut, apprit
par le baron de Beauvais que La Vauguyon s'était tué le matin de deux coups de
pistolets dans son lit, qu'il se donna dans la gorge, après s'être défait de
ses gens sous prétexte de les envoyer à la messe. Il faut dire un mot de ces
deux hommes. La Vauguyon était un des plus petits et des plus pauvres
gentilshommes de France: son nom était Bétoulat, et il porta le nom de
Fromenteau. C'était un homme parfaitement bien fait, mais plus que brun, et
d'une figure espagnole; il avait de la grâce, une voix charmante qu'il savait
très bien accompagner du luth et de la guitare; avec cela le langage des
femmes, de l'esprit, et insinuant. Avec ces talents et d'autres plus cachés,
mais utiles à la galanterie, il se fourra chez Mme de Beauvais, première femme
de chambre de la Reine mère et dans sa plus intime confidence, et qui à tout le
monde faisait d'autant plus la cour qu'elle ne s'était pas mise moins bien avec
le Roi, dont elle passait pour avoir eu le pucelage. Je l'ai encore vue,
vieille, chassieuse et borgnesse, à la toilette de Mme la dauphine de Bavière,
où toute la cour lui faisait merveilles, parce que de temps en temps elle
venait à Versailles, où elle causait toujours avec le Roi en particulier, qui
avait conservé beaucoup de considération pour elle. Son fils, qui s'était fait
appeler le baron de Beauvais, avait la capitainerie des plaines d'autour de
Paris. Il avait été élévé, au subalterne près, avec le Roi. Il avait été de ses
ballets et de ses parties, et, galant, hardi, bien fait, soutenu par sa mère et
par un goût personnel du Roi, il avait tenu son coin, mêlé avec l'élite de la
cour, et depuis traité du Roi toute sa vie avec une distinction qui le faisait
craindre et rechercher. Il était fin courtisan et gâté, mais ami à rompre des
glace auprès du Roi avec succès, et ennemi de même; d'ailleurs honnête homme,
et toutefois respectueux avec les seigneurs. Je l'ai vu encore donner les
modes. Fromentau se fit entretenir par la Beauvais, et elle le présentait à
tout ce qui venait chez elle, qui, là et ailleurs, pour lui plaire, faisait
accueil au godelureau. Peu à peu elle le fit entrer chez la Reine mère, puis
chez le Roi, et il devint courtisan par cette protection. De là el s'insinua
chez les ministres. Il montra de la valeur, volontaire à la guerre, et enfin il
fut employé auprès de quelques princes d'Allemagne.Peu à peu il s'éleva
jusqu'au caractère d'ambassadeur en Danemark, et il alla après ambassadeur en
Espagne. Partout on en fut content, et le Roi lui donna une des trois places de
conseiller d'Etat d'épée, et au scandale de sa cour le fit chevalier de l'Ordre
en 1688. Vingt ans auparavant il avait épousé la fille de Saint-Maigrin dont
j'ai parlé ci-devant à propos du voyage qu'il fit à Blaye de la part de la
cour, pendant les guerres de Bordeaux, auprès de mon père; ainsi je n'ai pas
besoin de répéter qui elle était, sinon qu'elle était veuve avec un fils de
Monsier de Broutay, du nom de Quelen, et que cette femme était la laideur même.
Par ce mariage, Fromentau s'était seigneurifié, et avait pris le nom de comte
de La Vauguyon. Tant que les ambassades durèrent et que le fils de sa femme fut
jeune, il eut de quoi vivre; mais, quand la mère se vit obligée de compter avec
son fils, ils se trouvèrent réduits fort à l'étroit. La Vauguyon, comblé
d'honneurs bien au delà de ses espérances, représenta souvent au Roi le
misérable état de ses affaires, et n'en tirait que de rares et très médiocres
gratifications. La pauvreté peu à peu lui tourna la tête, mais on fut très
longtemps sans s'en apercevoir. Une des premières marques qu'il en donna fut
chez Mme Pellot, veuve du premier président du parlement de Rouen, qui avait
tous soirs un souper et un jeu, uniquement pour ses amis en petit nombre. Elle
ne voyait que fort bonne compagnie, et La Vauguyon y était presque tous les
soirs. Jouant au brelan, elle lui fit un renvi, qu'il ne tint pas. Elle l'en
plaisanta et lui dit qu'elle était bien aise de voir qu'il était un poltron. La
Vauguyon ne répondit mot; mais, le jeu fini, il laissa sortir la compagnie, et,
quand il se vit seul avec Mme Pellot, il ferma la porte au verrou, enfonça son
chapeau dans sa tête, l'accula contre sa cheminée, et, lui mettant la tête
entre ses deux poings, lui dit qu'il ne savait ce qui le tenait qu'il ne la lui
mit en compote pour lui apprendre à l'appeler poltron. Voilà une femme bien
effrayée, qui entre ses deux poings lui faisait des révérences perpendiculaires
et des compliments tant qu'elle pouvait, et l'autre toujours en furie et en
menaces. A la fin, il la laissa plus morte que vive et s'en alla. C'était une
très bonne et très honnête femme, qui défendit bien à ses gens de la laisser
seule avec La Vauguyon, mais qui eut la générosité de lui en garder le secret
jusqu'après sa mort, et de le recevoir chez elle à l'ordinaire, où il retourna
comme si de rien n'eût été. Longtemps après, rencontrant sur les deux heures
après midi M. de Courtenay dans ce passage obscur à Fontainebleau, qui, du
salon d'en haut devant la tribune, conduit à une terrasse le long de la
chapelle, il lui fit mettre l'épée à la main, quoique l'autre lui pût dire sur
le lieu où ils étaient, et sans avoir jamais eu occasion ni apparence de démêlé.
Au bruit des estocades, des passants dans ce grand salon accoururent et les
séparèrent, et appelèrent des Suisses de la salle des gardes de l'ancien
appartement de la Reine mère, où il y en avait toujours quelques-uns, et qui
donnait dans le salon. La Vauguyon, dès lors chevalier de l'Ordre, se
débarrassa d'eux et courut chez le Roi, tourne la clef du cabinet, force
l'huissier, entre, et se jette aux pieds du Roi, en lui disant qu'il venait lui
apporter sa tête. Le Roi, qui sortait de table, chez qui personne n'entrait
jamais que mandé, et qui n'aimait pas les surprises, lui demanda avec émotion à
qui il en avait. La Vauguyon, toujours à genoux, lui dit qu'il a tiré l'épée
dans sa maison, insulté par M. de Courtenay, et que son honneur a été plus fort
que son devoir. Le Roi eut grand-peine à s'en débarrasser et dit qu'il verrait
à éclaircir cette affaire, et, un moment après, les envoya arrêter tous deux
par des exempts du grand prévôt et mener dans leurs chambres. Cependant on
amena deux carrosses, qu'on appelait de la Pompe, qui servaient à Bontemps et à
divers usages pour le Roi, qui étaient à lui, mais sans armes, et avaient leurs
attelages. Les exempts qui les avaient arrêtés les mirent chacun dans un de ces
carrosses, et l'un deux avec chacun, et les conduisirent à Paris à la Bastille,
où ils demeurèrent sept ou huit mois, avec permission au bout du premier mois
d'y voir leurs amis, mais traités tous deux en tout avec une égalité entière.
On peut croire le fracas d'une telle aventure: personne n'y comprenait rien. Le
prince de Courtenay était un fort honnête homme, brave, mais doux, et qui
n'avait de sa vie eu querelle avec personne. Il protestait qu'il n'en avait
aucune avec La Vauguyon, et qu'il l'avait attaqué et forcé de mettre l'épée la
main pour n'en être pas insulté. D'autre part, on ne se doutait point encore de
l'égarement de La Vauguyon. il protestait de même que c'était l'autre qui
l'avait attaqué et insulté. On ne savait donc qui croire ni que penser. Chacun
avait ses amis, mais personne ne put goûter l'égalité si fort affectée en tous
les traitements faits à l'un et à l'autre. Enfin, faute de meilleur
éclaircissement et la faute suffisamment expiée, ils sortirent de prison, et
peu après reparurent à la cour. Quelque temps après, une nouvelle escapade mit
les choses plus au net. Allant à Versailles, La Vauguyon rencontre un
palefrenier de la livrée de Monsieur le Prince, menant un cheval de main tout
sellé, allant vers Sèvres et vers Paris. Il arrête, l'appelle, met pied à
terre, et demande à qui est le cheval. le palefrenier répond qu'il est à
Monsieur le Prince. La Vauguyon lui dit que Monsieur le Prince ne trouvera pas
mauvais qu'il le monte, et saute en même temps dessus. Le palefrenier, bien
étourdi, ne sait que faire à un homme à qui il voit un cordon bleu par-dessus
son habit et sortant de son équipage, et le suit. La Vauguyon prend le petit
galop jusqu'à la porte de la Conférence, gagne le rempart et va mettre pied à
terre à la Bastille, donne pour boire au palefrenier et le congédie. Il monte
chez le gouverneur, à qui il dit qu'il a eu le malheur de déplaire au Roi et
qu'il le prie de lui donner une chambre. Le gouverneur, bien surpris, lui
demande à son tour à voir l'ordre du Roi, et, sur ce qu'il n'en a point, plus
étonné encore, résiste à toutes ses prières, et par capitulation le garde chez
lui en attendant réponse de Pontchartrain à qui il écrit par un exprès.
Pontchartrain en rend compte au Roi, qui ne sait ce que cela veut dire; et
l'ordre vient au gouverneur de ne point recevoir La Vauguyon, duquel malgré
cela il eut encore toutes les peines du monde à se défaire. Ce trait et cette
aventure du cheval de Monsieur le Prince fit grand bruit et éclaircit fort
celle de M. de Courtenay. Cependant le Roi fit dire à La Vauguyon qu'il pouvait
reparaître à la cour, et il continua d'y aller comme il allait auparavant; mais
chacun l'évitait, et on avait grand peur de lui, quoique le Roi par bonté
affectât de le traiter bien. On peut juger que ces dérangements publics
n'étaient pas sans d'autres domestiques, qui demeuraient cachés le plus qu'il
était possible. Mais ils devinrent si fâcheux à sa pauvre femme, bien plus
vieille que lui et fort retirée, qu'elle prit le parti de quitter Paris et de
s'en aller dans ses terres. Elle n'y fut pas bien longtemps, et y mourut tout à
la fin d'octobre, à la fin de cette année. Ce fut le dernier coup qui acheva de
faire tourner la tête à son mari: avec sa femme il perdait toute sa
subsistance; nul bien de soi et très peu du Roi. Il ne la survécu que d'un
mois. Il avait soixante-quatre ans, près de vingt ans moins qu'elle, et n'eut
jamais d'enfants. On sut que les deux dernières années de sa vie il portait des
pistolets dans sa voiture et en menaçait souvent le cocher ou le postillon, en
joue, allant et venant de Versailles. ce qui est certain, c'est que, sans le
baron de Beauvais qui l'assistait de sa bourse et prenait fort soin de lui, il
se serait souvent trouvé aux dernières extrémités, surtout depuis le départ de
sa femme. Beauvais en parlait souvent au Roi, et il est inconcevable qu'ayant
élevé cet homme au point qu'il l'avait fait, et lui ayant toujours témoigné une
bonté particulière, il l'ait persévéramment laissé mourir de faim et devenir
fou de misère.
LOUIS DE ROUVROY, duque de SAINT-SIMON.
LOUIS DE ROUVROY, duque de SAINT-SIMON.
Fortuna
y muerte de La Vauguyon
Crónicas
del año 1693.
Otro acontecimiento sorprendió menos que lo que
hizo admirar las distintas fortunas. El domingo 29 de de noviembre, el Rey al
salir de la ceremonia del saludo supo, gracias al barón de Beauvais, que La
Vauguyon se había matado en la cama de dos tiros de pistola en la garganta,
después de haberse librado de sus domésticos con el pretexto de enviarlos a la
misa. Es necesario decir unas palabras acerca de estos dos hombres. La Vauguyon
era uno de los más pequeños y de los más pobres nobles de Francia: su nombre
era Bétoulat, y él se adjudicó el nombre de Fromentau. Era un hombre
perfectamente bien hecho, pero más que moreno, y de tipo español; poseía
gracia, una voz encantadora que sabía acompañar muy bien con el laúd o la
guitarra; aunado a ello, el lenguaje de las mujeres, no carente de ingenio, e
insinuante. Con estos talentos y con otros más ocultos, pero útiles para la
galantería, se introdujo en la casa de Madame de Beauvais, primera camarista de
la reina madre y en su más íntima confidencia, y que trataba tanto más de
conquistarse a todo el mundo que no lo había hecho menos con el Rey de quien se
decía había sido la primera amante. Yo la he visto aún, vieja, legañosa y
tuerta, en el despertar de la Señora Delfina de Baviera, donde toda la corte se
comportaba con ella maravillosamente, ya que de tiempo en tiempo venía a
Versalles donde siempre conversaba en privado con el Rey quien había conservado
mucha consideración por ella. Su hijo, que se había hecho llamar el barón de
Beauvais, tenía la capitanería de las llanuras que rodean París. Había sido
educado, salvo en lo que concernía a su condición de subalterno, junto con el
Rey. Había formado parte de sus bailes y de sus fiestas, y galante, audaz, bien
proporcionado, sostenido por su madre y por un gusto personal del Rey, sabía
emplear las palabras justas, mezclado con la élite de la corte, y tratado desde
entonces por el Rey durante toda su vida con una distinción tal que hacía que
se le temiese y se buscase su compañía. Era un cortesano sutil y mimado pero
amigo de romper lanzas con éxito delante del Rey, y enemigo de la misma manera;
hombre correcto, por otra parte, y respetuoso no obstante con los señores. Yo
le he visto todavía imponiendo las modas. Fromentau se hizo mantener por la
Beauvais, y ésta lo presentaba a todos los que venían a verla, los cuales, allí
y en cualquier parte, a fin de complacerla, daban buena acogida al barbilindo.
Poco a poco lo introdujo en el círculo de la Reina madre, luego en el del Rey,
y él se volvió cortesano con tal protección. A partir de allí se introdujo
entre los ministros. Voluntario en la guerra, demostró que tenía valor, y al
fin se le dio un empleo en las cortes de algunos príncipes de Alemania. Poco a
poco se elevó hasta la calidad de embajador en Dinamarca, y luego fue como
embajador a España. En todas partes satisfizo, y el Rey le dio uno de los tres
puestos de consejero de Estado de espada y, con escándalo de la Corte, lo hizo
caballero de la Orden en 1688. Veinte años antes se había casado con la hija de
Saint-Maigrin del cual ya he hablado aquí a propósito del viaje que éste hizo a
Blaye de parte de la Corte, durante las guerras de Burdeos, junto con mi padre;
de esta manera no me veo en la necesidad de repetir quién era ella, solamente
que había quedado viuda con un hijo de Monsieur de Broutay, de nombre Quelen, y
que esta mujer era la fealdad misma. Gracias a este matrimonio, Fromenteau se
había enseñorificado y había tomado el nombre de conde de La Vauguyon. Mientras
duraron las embajadas y el hijo de su mujer fue joven, tuvo de qué vivir; pero
cuando la madre se vio obligada a contar con su hijo, se encontraron reducidos
de manera bien estrecha. La Vauguyon, colmado de honores mucho más allá de sus
esperanzas, le hizo ver a menudo al Rey el estado miserable de sus asuntos, y
de ello no obtenía sino poco habituales y mediocres gratificaciones. Poco a
poco la pobreza le trastornó la cabeza, pero durante mucho nadie se dio cuenta.
Una de las primeras pruebas que dio de ello ocurrió en la casa de Madame
Pellot, viuda del primer presidente del parlamento de Ruán, que ofrecía todas
las noches una cena y un juego, únicamente para sus amigos en pequeño número.
No recibía sino muy buena compañía, y La Vauguyon estaba allí casi todas las
noches. Jugando al brelán, Madame Pellot subió la apuesta y él no quiso
aceptarla. Ella se burló y le dijo que estaba contenta de ver lo pusilánime que
él era. La Vauguyon no respondió ni una palabra; pero, terminado el juego, dejó
irse la compañía, y, cuando se vio a solas con Madame Pellot, echó cerrojo a la
puerta, se hundió el sombrero en la cabeza, la arrinconó contra la chimenea, y
metiéndole la cabeza entre sus dos puños le dijo que no sabía qué era lo que le
impedía dejarla hecha una compota para que aprendiese así a llamarlo
pusilánime. He aquí una mujer bien asustada que entre dos puños le hacía
reverencias perpendiculares y cumplidos tanto como podía, y el otro siempre con
furia y con amenazas. Al fin la dejó más muerta que viva y se fue. Era una muy
buena y muy correcta mujer que prohibió totalmente a sus domésticos dejarla a
solas con La Vauguyon, pero que tuvo la generosidad de guardar la cosa en
secreto hasta después de su muerte, y de recibirlo en su casa como de
costumbre, adonde él volvió como si nada hubiese pasado. Mucho tiempo después,
encontrando hacia las dos de la tarde a Monsieur de Courtenay en ese pasaje
obscuro de Fontainebleau que, del salón de arriba delante de la tribuna,
conduce a una terraza a lo largo de la capilla, lo obligó a echar mano a la
espada sin importarle lo que el otro pudiera decirle del lugar donde se
encontraban, y sin haber tenido jamás ocasión o apariencia de disputa. Con el
ruido de las estocadas, los que pasaban por aquel gran salón acudieron y los
separaron, y llamaron a los suizos de la sala de guardia del antiguo apartamento
de la Reina madre donde siempre se encontraban algunos, y que comunicaba con el
salón. La Vaguyon que ya era caballero de la Orden, se desembarazó de ellos y
corrió hasta los apartamentos del Rey, hace girar la llave del gabinete, empuja
al portero, entra, y se arroja a los pies del Rey diciéndole que venía a
entregarle su cabeza. El Rey que acababa de levantarse de la mesa, en las
habitaciones del cual nadie entraba sin ser llamado, y al que no le gustaban
las sorpresas, le preguntó conmovido con quién tenía problemas. La Vaguyon,
siempre de rodillas, le dijo que había desenvainado la espada en su casa
habiendo sido insultado por Monsieur de Courtenay, y que su honor fue más
fuerte que su deber. Al Rey le costó mucho librarse de él y dijo que haría
aclarar el asunto y, luego de un momento, ordenó que fueran arrestados ambos
por los oficiales del gran preboste y confinados en sus habitaciones. Mientras
tanto trajeron dos carrozas, de las conocidas como de la calle de La Pompe, que
Bontemps usaba y que servían para distintos usos para el Rey al que pertenecían
aunque no llevasen sus ramas, y con todos sus caballos. Los oficiales que los
habían arrestado los hicieron subir cada uno en una carroza y cada uno de ellos
con cada uno y los condujeron a París a la Bastilla, en donde permanecieron
siete u ocho meses con permiso, al cabo del primer mes, de recibir a sus
amigos, pero tratados ambos con la misma igualdad en todo. Es fácil comprender
el estruendo de una aventura semejante: nadie entendía nada de este asunto. El
príncipe de Courtenay era un hombre en extremo correcto, grave, valiente pero
de maneras suaves y que no había, durante toda su vida, tenido querella con
nadie. Protestaba que no había tenido ninguna con La Vauguyon y que éste lo
había atacado y forzado a echar mano a la espada para no ser insultado. Por
otra parte, nadie sospechaba todavía del extravío de La Vauguyon. Este
protestaba de la misma manera, que era el otro quien lo había atacado e
insultado. No se sabía pues qué creer o pensar. Ambos tenían sus amigos pero
nadie se dio por contento con la igualdad que tanto se afectaba en el trato que se
les dispensaba a ambos. Al fin, a falta de mayor esclarecimiento, y la falta
suficientemente expiada, salieron de prisión y, poco después, volvieron a
aparecer en la Corte. Poco tiempo después, una nueva extravagancia puso las
cosas más en claro. Yendo a Versalles, La Vauguyon encontró a un palafrenero
con la librea del Señor Príncipe que llevaba, por el camino que va a Sevres y a
París, un caballo obediente completamente ensillado. Lo llama, lo para, se
baja, y le pregunta a quién pertenece el caballo. El palafrenero responde que
al Señor Príncipe. La Vauguyon le dice que al Señor Príncipe no le parecerá mal
que él lo monte, y salta al mismo tiempo sobre el animal. El palafrenero, bien
aturdido, no sabe qué hacer con un hombre al que se le ve encima del traje el
cordón azul saliendo de entre sus ropas, y lo sigue. La Vauguyon va al
trotecito hasta la puerta de la Conferencia, llega hasta las murallas y se baja
delante de la Bastilla, le da a beber al palafrenero y lo invita a retirarse.
Sube al despacho del gobernador y le dice que ha tenido la desgracia de desagradar
al Rey y que le ruega que se le conceda una habitación. El gobernador, muy
sorprendido, le pide a su vez ver la orden del Rey y, viendo que éste no tiene
nada, más sorprendido aún, resiste a todos sus ruegos y, buscando un arreglo,
le permite permanecer en sus habitaciones mientras espera la repuesta de
Pontchartrain al que envía de inmediato un mensajero. Pontchartrain da cuenta
del asunto al Rey, que no sabe qué puede querer decir esto; y la orden llega al
gobernador de no recibir de ninguna manera a La Vauguyon, para librarse del
cual el gobernador tuvo aún, a pesar de esto, todas las penas del mundo. Este
acto y esta aventura del caballo del Señor Príncipe produjo mucho ruido y
aclaró en mucho aquella de Monsier de Courtenay. Sin embargo el Rey hizo que se
le dijese a La Vauguyon que podía volver a aparecer en la Corte, y éste
continuó a ir igual que antes, pero todo el mundo lo evitaba y tenía miedo de
él, aunque el Rey por bondad afectase tratarlo bien. Es fácil darse cuenta que
estas molestias de dominio público no iban sin otras de índole doméstica que
permanecían ocultas tanto como era posible. Pero se le volvieron tan enojosas a
su pobre mujer, mucho más vieja que él y que vivía muy retirada, que tomó la
resolución de dejar París y de irse a sus tierras. No estuvo allí mucho tiempo
y allí murió al final de ese año hacia fines de octubre. Fue ese el golpe
último que terminó de darle vuelta la cabeza a su marido: con su mujer éste
perdía todos sus medios de vida; ningún bien por su lado y muy pocos de la
parte del Rey. No la sobrevivió sino un mes. Tenía sesenta y cuatro años, casi
veinte menos que ella, y nunca tuvo hijos. Se supo que los dos últimos años de
su vida llevaba pistolas en su coche con las que amenazaba a menudo al cochero
o al postillón, poniéndoselas delante de la cara, cuando iba o venía de
Versalles. Lo que es seguro es que sin el barón de Beauvais que lo asistía con
sus propios recursos y se ocupaba mucho de él, se hubiese encontrado a menudo
en las últimas necesidades, sobre todo después de la partida de su mujer.
Beauvais le hablaba a menudo de él al Rey, y es inconcebible que éste habiendo
elevado a este hombre hasta tal punto, y habiéndole siempre dado muestras de
una bondad particular, lo haya dejado perseverantemente morir de hambre y
volverse loco de miseria.
Traducción de Miguel Ángel Frontán.