lunes, 18 de julio de 2022

Henri Michaux: Que descanse en rebelión

QU'IL REPOSE EN RÉVOLTE

 

Dans le noir, dans le soir sera sa mémoire

dans ce qui souffre, dans ce qui suinte

dans ce qui cherche et ne trouve pas

dans le chaland de débarquement qui crève sur la grève

dans le départ sifflant de la balle traceuse

dans l’île de soufre sera sa mémoire.

 

Dans celui qui a sa fièvre en soi, à qui n’importent les murs

dans celui qui s’élance et n’a de tête que contre les murs

dans le larron non repentant

dans le faible à jamais récalcitrant

dans le porche éventré sera sa mémoire.

 

Dans la route qui obsède

dans le coeur qui cherche sa plage

dans l’amant que son corps fuit

dans le voyageur que l’espace ronge

 

Dans le tunnel

dans le tourment tournant sur lui-même

dans l’impavide qui ose froisser le cimetière.

 

Dans l’orbite enflammée des astres qui se heurtent en éclatant

dans le vaisseau fantôme, dans la fiancée flétrie

dans la chanson crépusculaire sera sa mémoire.

 

Dans la présence de la mer

dans la distance du juge

dans la cécité

dans la tasse à poison.

 

Dans le capitaine des sept mers

dans l’âme de celui qui lave la dague

dans l’orgue en roseau qui pleure pour tout un peuple

dans le jour du crachat sur l’offrande.

 

Dans le fruit d’hiver

dans le poumon des batailles qui reprennent

dans le fou dans la chaloupe.

 

Dans les bras tordus des désirs à jamais inassouvis sera sa mémoire.

HENRI MICHAUX

 

QUE DESCANSE EN REBELIÓN

 

En lo oscuro, en la noche, estará su memoria

en lo que sufre, en lo que exuda

en lo que busca y no encuentra

en la chalana de desembarco que se pudre en la playa

en la partida silbante de la bala que marca

en la isla de azufre estará su memoria.

 

En aquél que lleva en él su fiebre, al que no le importan los muros

en aquél que se lanza y que sólo tiene cabeza dándosela contra los muros

en el ladrón impenitente

en el débil para siempre recalcitrante

en el pórtico en ruinas estará su memoria.

 

En el camino obsesionante

en el corazón que busca su playa

en el amante de quien su cuerpo huye

en el viajero que el espacio carcome.

 

En el túnel

en el dolor que gira en torno de sí mismo

en el impertérrito que osa hollar el cementerio.

 

En la órbita encendida de los astros que chocan cuando estallan

en el navío fantasma, en la novia envejecida

en la canción crepuscular estará su memoria.

 

En la presencia del mar

en la distancia del juez

en la ceguera

en la taza de veneno.

 

En el capitán de los siete mares

en el alma de aquél que lava la daga

en el órgano de caña que llora por todo un pueblo

en la luz del escupitajo sobre la ofrenda.

 

En el fruto de invierno

en el pulmón de la batallas que vuelven a empezar

en el loco en la chalupa.

 

En los brazos torcidos de los deseos para siempre insatisfechos estará su memoria.

 

Traducción, para Literatura & Traducciones, de Miguel Ángel Frontán