jueves, 17 de marzo de 2011

Saint-Pol Roux: Tarde de ovejas.


Paul Roux, llamado Saint-Pol Roux, nació en Saint-Henri, en los suburbios de Marsella, el 15 de enero de 1861. Luego de estudiar en Lyón comenzó estudios de derecho en París donde pronto se relacionó con Mallarmé. A los veinticuatro años, cuando fundó la revista "La Pléiade", ya era conocido como Saint-Pol Roux el Magnífico.


Entre 1895 y 1897, se retiró en los bosques de las Ardenas para escribir su primera obra de teatro La dame à la faux que no fue apreciada por la crítica. En cambio, en 1900 obtuvo un éxito inmenso con la creación de Louise, ópera de Louis Charpentier cuyo libreto le pertenece.


En 1898, abandonó la vida parisina de cenáculos literarios y se instaló en provincias. En 1903 se hizo construir una gran propiedad campestre en Camaret, a la que llamó Coecilian en honor de su hijo primogénito. 


En 1913, el Mercure de France publicó Anciennetés, pronto seguido por los tres volúmenes de los Reposoirs de la procession, su obra capital. André Breton, con quien mantuvo correspondencia en los años veinte, lo proclamó "el único precursor auténtico del movimiento llamado moderno".


 El 29 de marzo de 1918, el poeta y su hija Divine asistían a la misa en la iglesia parisina de Saint-Gervais-Saint-Protais cuando la Gran Berta dejó caer un obús que mató a un centenar de personas.


El 9 de mayo de 1925, los surrealistas organizaron un banquete en honor de Saint-Pol Roux en la Closerie des Lilas. El homenaje que generó un escándalo y terminó con la intervención de la policía quedó en las memorias como una de las grandes fechas de la historia del surrealismo.


Saint-Pol Roux, viviendo la mayor parte del tiempo en su propiedad situada en Bretaña, escribió durante años una vasta obra en gran parte inédita.


La noche del 23 de junio de 1940, un soldado alemán se introdujo en Coecilian, mató a la sirvienta e hirió gravemente a la hija del poeta. Unos meses después Coecilian fue saqueada y los manuscritos quemados.


 Saint-Pol Roux murió en el hospital de Brest el 18 de octubre de 1940.


 En 1944 los Aliados bombardearon Camaret y destruyeron Coecilian.








Soir de brebis


A Louis Denise.


La tache de sang dépoint à l'horizon de ci. 
La goute de lait point à l'horizon de là.


Homme simple qui s'éparpille dans la flûte et dont la prudence a la forme d'un chien noir, le pâtre descend l'adolescence du coteau. 
Le suivent ses brebis, avec deux pampres pour oreilles et deux grappes pour mamelles, le suivent ses brebis: ambulantes vignes. 
Si pur le troupeau! que, ce soir estival, il semble neiger vers la plaine enfantinement. 
Ces menus écrins de vie ont, là-haut, brouté les cassolettes, et redescendent pleines.


Mes désirs aussi, stimulés par la flûte de l'Espoir et le chien de la Foi, montèrent ce matin le coteau du Mystère; et s'en furent plus haut que les brebis de mon hameau, les brebis de mon âme. 
Mais, parmi la prairie de jacinthes, l'odorante étoile incendia les dents avides qui voulaient dégrafer son corsage fertile. 
C'est pourqoui mon troupeau subtil, à l'heure d'angélus, rentre en moi-même, les flancs désespérés.


Les brebis sont au bercail, et l'homme simple va dormir entre sa flûte et son chien noir.




Tarde de ovejas


A Louis Denise.


La mancha de sangre desaparece en el horizonte de aquí. 
La gota de leche aparece en el horizonte de allá.


Hombre simple que se disipa en la flauta y cuya prudencia tiene la forma de un perro negro, el pastor desciende la adolescencia de la ladera. 
Lo siguen sus ovejas, con dos pámpanos en lugar de orejas y dos racimos en lugar de ubres; lo siguen sus ovejas: viñas ambulantes. 
Tan puro el rebaño que en esta tarde de estío parece que nevase sobre la llanura infantilmente . 
Esas pequeñas cajas de vida pastaron allá arriba en las cazuelas y vuelven a bajar repletas.


Mis deseos también, estimulados por la flauta de la Esperanza y el perro de la Fe, subieron esta mañana por la colina del Misterio; y más arriba subieron que las ovejas de mi aldea las ovejas de mi alma. 
 Pero la estrella perfumada, en medio de la llanura de jacintos, incendió los dientes ávidos que querían desabrochar su blusa fértil. 
Es por eso que mi rebaño sutil, a la hora del ángelus, vuelve a entrar en mí mismo con los flancos desesperados.


Las ovejas están en el redil y el hombre simple se va a dormir en medio de su flauta y de su perro negro.


Traducción de Miguel Ángel Frontán.

sábado, 12 de marzo de 2011

Robert Brasillach: Joyas.




Bijoux

 Je n'ai jamais eu de bijoux,
 Ni bagues, ni chaîne aux poignets
 Ce sont choses mal vues chez nous:
 Mais on m'a mis la chaîne aux pieds.

 On dit que ce n'est pas viril,
 Les bijoux sont faits pour les filles:
 Aujourd'hui comment se fait-il
 Qu'on m'ait mis la chaîne aux chevilles ?

 Il faut connaître toutes choses,
 Être curieux du nouveau:
 Étrange est l'habit qu'on m'impose
 Et bizarre ce double anneau.

 Le mur est froid, la soupe est maigre
 Mais je marche, ma foi, très fier,
 Tout résonnant comme un roi nègre
 Paré de ses bijoux de fer.

ROBERT BRASILLACH (Poèmes de Fresnes)



Joyas

 Nunca me he puesto joyas,
 Ni anillos, ni cadena en las muñecas
 Cosas que entre mi gente están mal vistas :
 Mas la cadena en los pies me han puesto.

 Dicen que es algo poco viril,
 Para las jóvenes fueron hechas las joyas:
 ¿Cómo es posible, entonces, que hoy
 La cadena en los tobillos me hayan puesto ?

 Hay que conocer todas las cosas,
 Ser curioso de todo lo que es nuevo:
 Extraño es el hábito que me imponen
 Y extraño también es este doble anillo.

 Frío es el muro, chirle la sopa,
 Sin embargo orgulloso camino yo,
 Haciendo ruido como un rey negro
 Revestido con sus joyas de hierro.

Traducción de Miguel Ángel Frontán.

miércoles, 2 de marzo de 2011

Seis poemas de Louis Calaferte


Rues maintes fois parcourues...

Rues maintes fois parcourues depuis tant d'années.
Les changements y sont lents.
Lente y est la vie.
Certaines physionomies connues à force d'être rencontrées soudainement disparaissent.
Les vitrines des boutiques se renouvellent tout en se ressemblant.
Il y a des magasins dont les propriétaires ne se montrent jamais.
Vieux magasins.
D'autres qui incitent à la dépense.
Il y a un chien noir aux oreilles cassées assis devant une entrée.
Un vieux chien qui ne se laisse pas approcher.
De vieilles personnes marchent lentement.
Avec de vieux vêtements aux couleurs usées.
Les trottoirs sont étroits.
Peut-être ces rues ne mènent-elles nulle part.
De vieilles personnes qui rentrent chez elles.
Vient une heure où les perspectives raccourcies se font désertes.
Heure de cette atroce agonie qu'on appelle le crépuscule.

(Le monologue)


Calles muchas veces recorridas…

Calles muchas veces recorridas desde hace tantos años.
Allí son lentos los cambios.
Allí es lenta la vida.
Algunas fisonomías conocidas de tanto encontrarlas allí desaparecen de pronto.
Los escaparates de las tiendas se renuevan sin dejar de parecerse.
Hay algunas cuyos propietarios nunca se dejan ver.
Viejas tiendas.
Otras que incitan a gastar.
Hay un perro negro de orejas quebradas sentado delante de una entrada.
Un perro viejo que no deja que se le acerquen.
Personas mayores caminan lentamente.
Con viejas ropas de colores desvaídos.
Las aceras son estrechas.
Quizás estas calles no lleven a ninguna parte.
Personas mayores que vuelven a sus casas.
Llega la hora en que las perspectivas acortadas se quedan desiertas.
Hora de esa atroz agonía que llamamos crepúsculo.


Concrétion noire du café...

Concrétion noire du café dans la tasse.
Petite surface circulaire immobile.
Il faut que la vibration extérieure soit accentuée pour qu'elle se trouble.
Odeur forte.
Concentrée.
Liquide qui est puissance.
Odeur d'un brûlé noir.
Un vieil homme à casquette de cuir torréfiait son café devant chez lui.
La fumée fine s'échappait de l'appareil.
Restait en suspension dans l'air froid.
Enveloppante.
On pouvait songer à des forêts impénétrables.
Des encorbellements de lianes.
Des cris d'oiseaux inconnus.
Des grognements menaçants.
Des déplacements souples.
Invisibles.
Une chaleur pétrifiante.
Le petit appareil était cylindrique.
En fer.
Une minuscule porte à glissière sur le dessus.
Le feu de bois l'enrobait de flammes.
Le vieil homme restait assis pendant des heures.
Tournait lentement la manivelle du cylindre.
L'odeur âcre se propageait au loin sur le chemin des maisons.
Ensuite on l'oubliait.
Comme l'odeur du cimetière.
Cette aigrissure.
Le pourrissement des fleurs dans la fosse derrière le portail de l'entrée.
Odeur de femmes noires.
Sévères.
Lentes.
Tristes.
Eclatement du coup de cloche.
La terre rouge ou verte.
Un trou.
Parois grasses.
Luisantes.
Veines jaunâtres de la terre.
Comment s'imaginer qu'un jour son propre corps sera enseveli dans cette profondeur graisseuse.
Pourrir.
Rire.
Jouer.
Le cimetière est un endroit sale.
Café chaud du matin.
Les fenêtres sont ouvertes.
Dehors il fait bleu et nacré.
Les bols sont remplis.
Le pain en tranches.
Le beurre tendre sur la petite assiette rose.
Le lait se mélange avec des dessins de filaments.
Dans les bois il y a des airelles.
Des argenteries de poissons dans la rivière.
Le matin le grand couloir de la maison sent longtemps le café.
Un noir.
Un jus.
Des voyantes lisent l'avenir dans le marc de café.
Une grosse femme à demi soûle.
Les yeux humides.
Les seins énormes.
La tasse pivotant entre ses doigts aux ongles rongés.
Savoir à quand remonte l'usage du café ?
Trouver des ouvrages illustrés chez les bouquinistes.
Le café est-il un fruit ?
Forcément.
Les araignées ne sont pas des insectes.
Un sucre chimique se dissolvait dans la tasse de café et laissait apparaître une substance en forme d'araignée.
Farces et attrapes.
Tout le monde riait.
On changeait la tasse.
L'araignée noire flottait dans l'évier au milieu de la vaisselle.
Il fallait du courage pour oser la toucher du bout du doigt.
C'était flasque.
Que devenait-elle ensuite ?
Les araignées de réglisse aux pattes rouges.
Les filles qui hurlaient.
Le ciel était si clair.
La nuit ne tombait pas.
Les grands bavardaient entre eux dans le jardin.
Les voix n'étaient plus que bruissements.

(Le monologue)


Concreción negra del café...

Concreción negra del café en la taza.
Pequeña superficie circular inmóvil.
Es necesario que la vibración exterior se acentúe para que se perturbe.
Olor fuerte.
Concentrado.
Líquido que es potencia.
Negro olor a quemado.
Un viejo con gorra de cuero tostaba el café delante de su casa.
El humo tenue se escapaba del aparato.
Permanecía suspendido en el aire frío.
Envolvente.
Podía pensarse en bosques impenetrables.
Techos de lianas.
Gritos de pájaros desconocidos.
Gruñidos amenazantes.
Desplazamientos ágiles.
Invisibles.
Un calor petrificante.
El pequeño aparato era cilíndrico.
De hierro.
Con una minúscula tapa corrediza.
El fuego lo envolvía con sus llamas.
El viejo permanecía horas sentado.
Hacía girar lentamente la manivela del cilindro.
El olor acre se propagaba hasta muy lejos por el camino que llevaba a las casas.
Luego se lo olvidaba.
Como el olor del cementerio.
Esa acritud.
La putrefacción de las flores en la fosa detrás del portal de entrada.
Olor a mujeres negras.
Severas.
Lentas.
Tristes.
Estallido de la campanada.
La tierra roja o verde.
Un pozo.
Paredes fértiles.
Brillantes.
Venas amarillentas de la tierra.
Cómo imaginar que un día nuestro propio cuerpo estará enterrado en esta profundidad grasienta.
Pudrirse.
Reir.
Jugar.
El cementerio es un lugar sucio.
Café caliente de la mañana.
Las ventanas están abiertas.
Fuera todo está azul y nacarado.
Las tazas están llenas.
El pan en rebanadas.
La mantequilla blanda en el platito rosado.
La leche se mezcla con dibujos de filamentos.
Hay arándanos en los bosques.
Platería de peces en el río.
Por la mañana el gran corredor de la casa huele mucho tiempo a café.
Un café negro.
Un cafecito.
Hay adivinas que leen el porvenir en la borra del café.
Una mujer gorda medio borracha.
Los ojos húmedos.
Los pechos enormes.
La taza que gira entre sus dedos de uñas comidas.
¿Saber de cuándo data el uso del café?
Encontrar viejos libros ilustrados.
¿Es un fruto el café?
Forzosamente.
Las arañas no son insectos;
Un azúcar químico se disolvía en la taza de café y dejaba aparecer una substancia con forma de araña.
Un chasco.
Todos se reían.
Cambiaban la taza.
La araña negra flotaba en el fregadero entre la vajilla.
Hacía falta tener coraje para atreverse a tocarla con la punta del dedo.
Algo fofo.
¿En qué se transformaba después?
Las arañas de regaliz de patas rojas.
Las chicas que chillaban.
El cielo estaba tan claro.
La noche no caía.
Los grandes charlaban entre ellos en el jardín.
Las voces no eran ya sino murmullos.

Temps mort...

Temps mort.
Les corps se séparent.
Présence brusquement étrangère.
Répugnance à toucher.
A être touché.
Le rapprochement a creusé un vide hostile.
Excitation des nerfs.
Curiosité.
Audace.
Caresser.
Prendre un corps.
Echauffement des désirs.
Simulacre du meurtre.
Une haine lointaine.
Ne pas penser au possible dégoût.
Sexe noir.
Poils.
Maladive rosure.
Odeur intime.
Odeur forte.
Le pli de graisse.
Sueur.
Mots et halètements.
L'envie est déjà passée.
Accomplir le rituel.
La bouche ouverte.
Les dents.
La langue.
Salive.
Pointes des seins.
Cotonnade du ventre.
Sexe.
Poils.
Pénétrer.
Obtenir ce que seule obtient l'imagination.
Bourrelage de l'accouplement.
Humidités.
Sels.
Acides.
Corps harassés.
Ennemis.
Les draps chauds.
Prix de la chambre punaisé sur la porte.
Ternissure autour de la poignée.
Traces brunes.
Glace éraillée de l'armoire.
Le battant ferme mal.
Meuble vide.
Petite table de bois verni.
Meuble vide.
Les vêtements en désordre sur la moquette.
Chaussure béante.
Un soutien-gorge noir.
Une jupe claire.
Les vitres de la fenêtre sont sales.
Partir.
S'habiller.
Partir.
N'être plus cet incompréhensible accident.
Ramolli le sexe pend entre les cuisses.
Un après-midi d'enfance à la campagne.
Avec des fruits.
De gros raisins noirs.
A cheval sur des épaules d'homme.
Le corps glisse doucement du lit.
Vêtements épars ramassés en hâte.
Mouvement proche déjà si lointain.
Le sac à main.
La salle de bains.
Il faisait une chaleur éclatante.
Une petite fille riait.
L'eau dans le lavabo.
Enfiler un slip.
Des chaussettes.
Un pantalon.
Une chemise.
Le veston est sur le dos d'une chaise.
La petite fille blonde avait un prénom très doux.
Musical.
Un prénom blond.

(Le monologue)


Tiempo muerto...

Tiempo muerto.
Los cuerpos se separan.
Presencia bruscamente extraña.
Asco de tocar.
De ser tocado.
El acercamiento ha creado un vacío hostil.
Excitación nerviosa.
Curiosidad.
Audacia.
Acariciar.
Coger un cuerpo.
Fiebre del deseo.
Simulacro de asesinato.
Un odio lejano.
No pensar en el asco posible.
Sexo negro.
Pelos.
Enfermiza rosura.
Olor íntimo.
El pliegue de grasa.
Sudor.
Palabras y jadeos.
El deseo ya ha pasado.
Cumplir el ritual.
La boca abierta.
Los dientes.
La lengua.
Saliva.
Las puntas de los pechos.
Algodón del vientre.
Sexo.
Pelos.
Penetrar.
Conseguir lo sólo consigue la imaginación.
Tormento del acoplamiento.
Humedades.
Sales.
Ácidos.
Cuerpos extenuados.
Enemigos.
Las sábanas calientes.
El precio de la habitación clavado con una chinche en la puerta.
Manchas alrededor del picaporte.
Huellas marrones.
Espejo gastado del armario.
El batiente cierra mal.
Mueble vacío.
Mesita de madera barnizada.
Mueble vacío.
La ropa en desorden sobre la alfombra.
Zapato boquiabierto.
Un sostén negro.
Una falda de color claro.
Los vidrios de la ventana están sucios.
Irse.
Vestirse.
Irse.
Ya no ser este incomprensible accidente.
Reblandecido cuelga el sexo entre los muslos.
Una tarde de la infancia en el campo.
Con frutas.
Grandes uvas negras.
A horcajadas sobre hombros masculinos.
El cuerpo se desliza suavemente de la cama.
Ropa dispersa recogida de prisa.
Movimiento reciente ya tan lejano.
El bolso.
El cuarto de baño.
Hacía un calor deslumbrante.
Una niña reía.
El agua en el lavabo.
Ponerse un eslip.
Calcetines.
Un pantalón.
Una camisa.
La chaqueta está en el respaldo de una silla.
La niña rubia tenía un nombre muy dulce.
Musical.
Un nombre rubio.


Nancy...

Nancy
qui était si petite
si frêle entre mes bras
là-bas
dans la chambre aux saveurs des noirs embruns de mer

Nancy
avec ton regard vert
tes petits cheveux de chien fou
vaguement roux
et qui croyait encore aux choses interdites

Nancy
que ma mémoire emporte
et que je ne reverrai pas
le destin nous ferme ses portes

Tu étais de Dundee
n'est-ce pas

(Londoniennes)


Nancy...

Nancy
que era tan pequeña
tan quebradiza entre mis brazos
allá lejos
en el cuarto que sabía a obscuras brumas del mar

Nancy
con tu mirada verde
tus cabellos cortos de perro loco
un poco pelirrojo
y que creía aún en las cosas prohibidas

Nancy
que mi memoria arrastra
y que ya no veré más
el destino nos cierra sus puertas

Venías de Dundee
¿no es así?

C'est vrai qu'il pleut à Londres...

C'est vrai qu'il pleut à Londres
et que les ponts s'ennuient

Le ciel mourant et hypocondre
aux nuages noués de suie

A Londres il pleut à Londres
paillettes de la pluie

On voyait la ville se fondre
comme irréelle comme enfuie

Un peuple indécis correspondre
sous les dômes des parapluies

Nos ombres allaient se confondre
dans l'ombre grise de la pluie

C'est vrai qu'il pleut à Londres
et que je t'ai suivie

(Londoniennes)


Es cierto que llueve en Londres...

Es cierto que llueve en Londres
y que se aburren los puentes

Moribundo e hipocondríaco el cielo
con sus nubes atadas de hollín

En Londres cae la lluvia en Londres
lentejuelas de la lluvia

Veíamos la ciudad fundirse
como irreal como huidiza

Un pueblo impreciso comunicarse
bajo las cúpulas de los paraguas

Nuestras sombras iban a confundirse
en la sombra gris de la lluvia

Es cierto que llueve en Londres
y que yo te seguí
LOUIS CALAFERTE

Traducción de Carlos Cámara y Miguel Ángel Frontán

(Traducciones publicadas por primera vez en EOM nº 13, julio-agosto de 2002)


martes, 1 de marzo de 2011

Cuatro poemas de Yves Bonnefoy


L'adieu

Nous sommes revenus à notre origine.
Ce fut le lieu de l'évidence, mais déchirée.
Les fenêtres mêlaient trop de lumières,
Les escaliers gravissaient trop d'étoiles
Qui sont des arches qui s'effondrent, des gravats,
Le feu semblait brûler dans un autre monde.

Et maintenant des oiseaux volent de chambre en chambre,
Les volets sont tombés, le lit est couvert de pierres,
L'âtre plein de débris du ciel qui vont s'éteindre.
Là nous parlions, le soir, presque à voix basse
A cause des rumeurs des voûtes, là pourtant
Nous formions nos projets : mais une barque,
Chargée de pierres rouges, s'éloignait
Irrésistiblement d'une rive, et l'oubli
Posait déjà sa cendre sur les rêves
Que nous recommencions sans fin, peuplant d'images
Le feu qui a brûlé jusqu'au dernier jour.

Est-il vrai, mon amie,
Qu'il n'y a qu'un seul mot pour désigner
Dans la langue qu'on nomme la poésie
Le soleil du matin et celui du soir,
Un seul le cri de joie et le cri d'angoisse,
Un seul l'amont désert et les coups de haches,
Un seul le lit défait et le ciel d'orage,
Un seul l'enfant qui naît et le dieu mort ?

Oui, je le crois, je veux le croire, mais quelles sont
Ces ombres qui emportent le miroir ?
Et vois, la ronce prend parmi les pierres
Sur la voie d'herbe encore mal frayée
Où se portaient nos pas vers les jeunes arbres.
Il me semble aujourd'hui, ici, que la parole
Est cette auge à demi brisée, dont se répand
A chaque aube de pluie l'eau inutile.

L'herbe et dans l'herbe l'eau qui brille, comme un fleuve.
Tout est toujours à remailler du monde.
Le paradis est épars, je le sais,
C'est la tâche terrestre d'en reconnaître
Les fleurs disséminées dans l'herbe pauvre,
Mais l'ange a disparu, une lumière
Qui ne fut plus soudain que soleil couchant.

Et comme Adam et Ève nous marcherons
Une dernière fois dans le jardin.
Comme Adam le premier regret, comme Ève le premier
Courage nous voudrons et ne voudrons pas
Franchir la porte basse qui s'entrouvre
Là-bas, à l'autre bout des longes, colorée
Comme auguralement d'un dernier rayon.
L'avenir se prend-il dans l'origine
Comme le ciel consent à un miroir courbe,
Pourrons-nous recueillir de cette lumière
Qui a été le miracle d'ici
La semence dans nos mains sombres, pour d'autres flaques
Au secret d'autres champs « barrées de pierres » ?

Certes, le lieu pour vaincre, pour nous vaincre, c'est ici
Dont nous partons, ce soir. Ici sans fin
Comme cette eau qui s'échappe de l'auge.

(Ce qui fut sans lumière - Mercure de France, 1987)


El adiós

Hemos vuelto a nuestro origen.
Fue el lugar de la evidencia, aunque desgarrada.
Las ventanas mezclaban demasiadas luces,
Las escaleras trepaban demasiadas estrellas
Que son arcos que se hunden, escombros,
El fuego parecía arder en otro mundo.

Y ahora hay pájaros que vuelan de una habitación a la otra,
Los postigos se cayeron, la cama está cubierta de piedras,
La chimenea llena de restos del cielo que van a apagarse.
Allí, por las tardes, hablábamos casi en voz baja
Debido a los rumores de las bóvedas, allí, sin embargo,
Formábamos nuestros proyectos: pero una barca,
Cargada con piedras rojas, se alejaba
Irresistiblemente de una orilla, y el olvido
Depositaba ya su ceniza en los sueños
Que sin fin recomenzábamos, poblando con imágenes
El fuego que ardió hasta el último día.

¿Es cierto, amiga mía,
Que no hay más que una palabra para nombrar
En la lengua que llamamos poesía
El sol de la mañana y el de la tarde,
Una para el grito de alegría y el de angustia,
Una para el desierto río arriba y los golpes de hacha,
Una para la cama deshecha y el cielo tormentoso,
Una para el niño que nace y el dios muerto?

Sí, lo creo, quiero creerlo, pero ¿qué sombras
Son ésas que se llevan el espejo?
Y, mira, la zarza crece entre las piedras
En el camino de hierba aún apenas abierto
Por el que nuestros pasos iban hacia los jóvenes árboles.
Hoy me parece, aquí, que la palabra
Es el pesebre medio roto del que se escapa
En cada amanecer de lluvia el agua inútil.

La hierba y en la hierba el agua que brilla, como un río.
Todo está siempre a la espera de que una vez más se lo ate al mundo.
Sé que el paraíso está diseminado,
Es tarea terrestre el reconocer
Sus flores dispersas en la hierba pobre,
Pero el ángel ha desaparecido, una luz
Que no fue, de golpe, sino un sol poniente.

Y como Adán y Eva caminaremos
Por última vez en el jardín.
Como Adán el primer pesar, como Eva la primera
Osadía, querremos y no querremos
Pasar por la puerta baja que se entreabre
Allá a lo lejos, en la otra punta del ronzal, coloreada
Como auguralmente por un último rayo.
¿Se toma el porvenir en el origen
Como cabe el cielo en un cóncavo espejo?
¿Podremos recoger, de esa luz
Que fue de aquí el milagro,
En nuestras sombrías manos la simiente, para otros charcos
En el secreto de otros campos "cercados de piedras"?

Por cierto, está aquí el lugar para vencer, para vencernos,
El lugar de donde salimos esta tarde. Aquí sin fin
Como esa agua que se escapa del pesebre.


La rapidité des nuages

Le lit, la vitre auprès, la vallée, le ciel,
La magnifique rapidité de ces nuages.
La griffe de la pluie sur la vitre, soudain,
Comme si le néant paraphait le monde.

Dans mon rêve d'hier
Le grain d'autres années brûlait par flammes courtes
Sur le sol carrelé, mais sans chaleur.
Nos pieds nus l'écartaient comme une eau limpide.

O mon amie,
Comme était faible la distance entre nos corps !
La lame de l'épée du temps qui rôde
Y eût cherché en vain le lieu pour vaincre.

(Ce qui fut sans lumière - Mercure de France, 1987)


La rapidez de las nubes

La cama, la ventana cercana, el valle, el cielo,
La rapidez espléndida de esas nubes,
La súbita garra de la lluvia en los cristales
Como si la nada rubricase el mundo.

En mi sueño de ayer
El grano de otros años ardía a fuego lento,
Sin calor, en el suelo embaldosado.
Descalzos, lo apartaban nuestros pies como un agua límpida.

¡Oh amiga mía,
Qué distancia tan débil separaba nuestros cuerpos!
La hoja de la espada del tiempo que merodea
Hubiese allí buscado en vano lugar para vencer!

Noli me tangere


Hésite le flocon dans le ciel bleu
A nouveau, le dernier flocon de la grande neige.

Et c'est comme entrerait au jardin celle qui
Avait bien dû rêver ce qui pourrait être,
Ce regard, ce dieu simple, sans souvenir
Du tombeau, sans pensée que le bonheur,
Sans avenir
Que sa dissipation dans le bleu du monde.

« Non, ne me touche pas », lui dirait-il,
Mais même dire non serait de la lumière.

(Début et fin de la neige - Mercure de France, 1987)


Noli me tangere

De nuevo en el cielo azul vacila el copo
De nieve, el último copo de la gran nevada.

Y es como si en el jardín entrase aquella que
Bien había debido soñar lo que podría ser,
Esa mirada, ese dios simple, sin memoria
Del sepulcro, sin otro pensamiento que la dicha,
Sin otro porvenir
Que su disolución en el azul del mundo.

"No me toques, no", le diría él,
pero hasta el decir no sería luminoso.

YVES BONNEFOY

Traducción de Carlos Cámara y Miguel Ángel Frontán

(Traducciones publicadas por primera vez en EOM nº 17, diciembre de 2002)