À ARSÈNE HOUSSAYE
Mon cher ami, je vous envoie un
petit ouvrage dont on ne pourrait pas dire, sans injustice, qu’il n’a ni queue
ni tête, puisque tout, au contraire, y est à la fois tête et queue,
alternativement et réciproquement. Considérez, je vous prie, quelles admirables
commodités cette combinaison nous offre à tous, à vous, à moi et au lecteur.
Nous pouvons couper où nous voulons, moi ma rêverie, vous le manuscrit, le
lecteur sa lecture ; car je ne suspends pas la volonté rétive de celui-ci au
fil interminable d’une intrigue superfine. Enlevez une vertèbre, et les deux
morceaux de cette tortueuse fantaisie se rejoindront sans peine. Hachez-la en
nombreux fragments, et vous verrez que chacun peut exister à part. Dans
l’espérance que quelques-uns de ces tronçons seront assez vivants pour vous
plaire et vous amuser, j’ose vous dédier le serpent tout entier.
J’ai une petite confession à
vous faire. C’est en feuilletant, pour la vingtième fois au moins, le
fameux Gaspard de la Nuit, d’Aloysius Bertrand (un livre connu de
vous, de moi et de quelques-uns de nos amis, n’a-t-il pas tous les droits à
être appelé fameux ?) que l’idée m’est venue de tenter quelque chose
d’analogue, et d’appliquer à la description de la vie moderne, ou plutôt d’une
vie moderne et plus abstraite, le procédé qu’il avait appliqué à la peinture de
la vie ancienne, si étrangement pittoresque.
Quel est celui de nous qui n’a
pas, dans ses jours d’ambition, rêvé le miracle d’une prose poétique, musicale
sans rythme et sans rime, assez souple et assez heurtée pour s’adapter aux
mouvements lyriques de l’âme, aux ondulations de la rêverie, aux soubresauts de
la conscience ?
C’est surtout de la
fréquentation des villes énormes, c’est du croisement de leurs innombrables
rapports que naît cet idéal obsédant. Vous-même, mon cher ami, n’avez-vous pas
tenté de traduire en une chanson le cri strident du Vitrier, et d’exprimer dans
une prose lyrique toutes les désolantes suggestions que ce cri envoie jusqu’aux
mansardes, à travers les plus hautes brumes de la rue ?
Mais, pour dire le vrai, je
crains que ma jalousie ne m’ait pas porté bonheur. Sitôt que j’eus commencé le
travail, je m’aperçus que non-seulement je restais bien loin de mon mystérieux
et brillant modèle, mais encore que je faisais quelque chose (si cela peut
s’appeler quelque chose) de singulièrement différent, accident dont tout autre
que moi s’enorgueillirait sans doute, mais qui ne peut qu’humilier profondément
un esprit qui regarde comme le plus grand honneur du poëte d’accomplir juste ce
qu’il a projeté de faire.
Votre bien affectionné,
C. B.
A ARSÈNE HOUSSAYE
Mi querido amigo, le envío una pequeña obra, de la cual no se podría decir, sin injusticia, que no tiene ni pies ni cabeza, puesto que, al contrario, todo en ella es, al mismo tiempo, cabeza y pies, alternativa y recíprocamente. Considere, se lo ruego, qué admirables comodidades esta combinación nos ofrece a todos, a usted, a mí y al lector. Podemos cortar dónde queramos, yo mi ensoñación, usted el manuscrito, el lector la lectura; porque no dejo que la esquiva voluntad de éste quede pendiendo del hilo interminable de una intriga sutilísima. Saque usted una vértebra, y las dos partes de esta tortuosa fantasía volverán a juntarse sin esfuerzo. Despedácela en numerosos fragmentos, y verá que cada uno puede existir por separado. Con la esperanza de que algunos de estos trozos estarán lo bastante vivos para darle placer y entretenimiento, me atrevo a dedicarle la serpiente completa.
Tengo que hacerle una pequeña confesión. Hojeando, por vigésima vez al menos, el famoso Gaspar de la Noche, de Aloysius Bertrand (¿un libro que usted y yo, y algunos de nuestros amigos, conocemos no tiene todo el derecho a ser llamado famoso?), se me ocurrió la idea de intentar algo análogo, y de aplicar a la descripción de la vida moderna o, más bien, de una vida moderna y más abstracta, el procedimiento que él había aplicado a la pintura de la vida antigua, tan extrañamente pintoresca.
¿Quién de nosotros no ha soñado, en sus días de ambición, con el milagro de una prosa poética, musical sin ritmo y sin rima, lo bastante flexible y lo bastante abrupta como para adaptarse a los movimientos líricos del alma, a las ondulaciones de la ensoñación, a los sobresaltos de la conciencia?
Es sobre todo de la frecuentación de las ciudades inmensas, del entrecruzamiento de sus innumerables relaciones, que nace ese ideal obsesivo. Usted mismo, mi querido amigo, ¿no ha intentado mostrar en una canción el grito estridente del Vidriero, y expresar en una prosa lírica todas las desoladoras sugerencias que ese grito lanza hasta las mansardas, a través de las más altas brumas de la calle?
Pero, para decir la verdad, temo que mi envidia no me haya traído suerte. Apenas comencé el trabajo, me di cuenta de que no sólo me quedaba muy lejos de mi misterioso y brillante modelo, sino incluso que hacía algo (si es que esto puede llamarse algo) singularmente diferente, accidente del cual cualquier otro fuera de mí se enorgullecería quizás, pero que no puede sino humillar profundamente a un espíritu que ve como el más grande honor del poeta realizar únicamente aquello que proyectó hacer.
Suyo muy
afectuosamente,
IX
LE MAUVAIS VITRIER
Il y a
des natures purement contemplatives et tout à fait impropres à l’action, qui
cependant, sous une impulsion mystérieuse et inconnue, agissent quelquefois
avec une rapidité dont elles se seraient crues elles-mêmes incapables.
Tel qui,
craignant de trouver chez son concierge une nouvelle chagrinante, rôde
lâchement une heure devant sa porte sans oser rentrer, tel qui garde quinze
jours une lettre sans la décacheter, ou ne se résigne qu’au bout de six mois à
opérer une démarche nécessaire depuis un an, se sentent quelquefois brusquement
précipités vers l’action par une force irrésistible, comme la flèche d’un arc.
Le moraliste et le médecin, qui prétendent tout savoir, ne peuvent pas
expliquer d’où vient si subitement une si folle énergie à ces âmes paresseuses
et voluptueuses, et comment, incapables d’accomplir les choses les plus simples
et les plus nécessaires, elles trouvent à une certaine minute un courage de
luxe pour exécuter les actes les plus absurdes et souvent même les plus
dangereux.
Un de
mes amis, le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une
forêt pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu’on
l’affirme généralement. Dix fois de suite, l’expérience manqua ; mais, à la
onzième, elle réussit beaucoup trop bien.
Un autre
allumera un cigare à côté d’un tonneau de poudre, pour voir, pour savoir, pour
tenter la destinée, pour se contraindre lui-même à faire preuve d’énergie, pour
faire le joueur, pour connaître les plaisirs de l’anxiété, pour rien, par
caprice, par désœuvrement.
C’est
une espèce d’énergie qui jaillit de l’ennui et de la rêverie ; et ceux en qui
elle se manifeste si opinément sont, en général, comme je l’ai dit, les plus
indolents et les plus rêveurs des êtres.
Un
autre, timide à ce point qu’il baisse les yeux même devant les regards des
hommes, à ce point qu’il lui faut rassembler toute sa pauvre volonté pour
entrer dans un café ou passer devant le bureau d’un théâtre, où les contrôleurs
lui paraissent investis de la majesté de Minos, d’Éaque et de Rhadamanthe,
sautera brusquement au cou d’un vieillard qui passe à côté de lui et
l’embrassera avec enthousiasme devant la foule étonnée.
—
Pourquoi ? Parce que… parce que cette physionomie lui était irrésistiblement
sympathique ? Peut-être ; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il
ne sait pas pourquoi.
J’ai été
plus d’une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à
croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à
notre insu, leurs plus absurdes volontés.
Un matin
je m’étais levé maussade, triste, fatigué d’oisiveté, et poussé, me
semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d’éclat ; et j’ouvris
la fenêtre, hélas !
(Observez,
je vous prie, que l’esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n’est
pas le résultat d’un travail ou d’une combinaison, mais d’une inspiration
fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l’ardeur du désir, de cette
humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu
mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d’actions
dangereuses ou inconvenantes.)
La
première personne que j’aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri
perçant, discordant, monta jusqu’à moi à travers la lourde et sale atmosphère
parisienne. Il me serait d’ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à
l’égard de ce pauvre homme d’une haine aussi soudaine que despotique.
« — Hé !
hé ! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque
gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l’escalier fort étroit,
l’homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en
maint endroit les angles de sa fragile marchandise.
Enfin il
parut : j’examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis : « — Comment
? vous n’avez pas de verres de couleur ? des verres roses, rouges, bleus, des
vitres magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez
vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n’avez pas même de vitres qui
fassent voir la vie en beau ! » Et je le poussai vivement vers l’escalier, où
il trébucha en grognant.
Je
m’approchai du balcon et je me saisis d’un petit pot de fleurs, et quand
l’homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement
mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets ; et le choc le
renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune
ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d’un palais de cristal crevé par la
foudre.
Et, ivre
de ma folie, je lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! »
Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu’importe l’éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l’infini de la jouissance ?
IX
EL MAL VIDRIERO
Hay
naturalezas puramente contemplativas y totalmente incapaces para la acción,
que, sin embargo, sometidas a un impulso misterioso y desconocido, actúan a
veces con una rapidez de la que ellas mismas se hubieran creído incapaces.
El que, por
miedo a que el portero le dé una noticia penosa, da vueltas cobardemente una
hora delante de su puerta sin atreverse a entrar, el que guarda quince días una
carta sin abrirla, o que sólo se resigna al cabo de seis meses a dar un paso necesario
desde hacía un año, se sienten alguna vez bruscamente lanzados a la acción por
una fuerza irresistible, como la flecha de un arco. El moralista y el médico
que pretenden saberlo todo no pueden explicar de dónde les llega, tan súbitamente,
esa alocada energía a esas almas perezosas y voluptuosas, y cómo, incapaces de llevar
a término las cosas más sencillas y más necesarias, encuentran en un
determinado momento un valor suntuoso para ejecutar los actos más absurdos y, a
menudo, incluso los más peligrosos.
Uno de
mis amigos, el más inofensivo soñador que nunca haya existido, prendió una vez
fuego a un bosque para ver, según decía, si el fuego se extendía con tanta
facilidad como suele decirse. Diez veces seguidas falló el experimento; pero a
la undécima salió demasiado bien.
Otro
encenderá un cigarro al lado de un tonel de pólvora, para ver, para saber, para
tentar al destino, para forzarse a sí mismo a demostrar energía, para dárselas de
temerario, para conocer los placeres de la ansiedad, por nada, por capricho,
por ociosidad.
Es un
tipo de energía que brota del hastío y del fantaseo; y aquellos en los que se
manifiesta tan de improviso son, en general, como lo he dicho, los más
indolentes, y los más fantasiosos de los seres.
Otro,
tímido hasta el punto de bajar los ojos incluso ante las miradas de los
hombres, hasta el punto de tener que hacer acopio de toda su pobre voluntad
para entrar en un café o pasar por delante de la taquilla de un teatro, donde
los acomodadores le parecen investidos de la majestad de Minos, de Eaco y de Radamanto,
se echará bruscamente al cuello de un anciano que pasa a su lado y lo besará
con entusiasmo ante la muchedumbre asombrada.
—¿Por
qué? Porque..., ¿porque aquella fisonomía le resultó irresistiblemente
simpática? Quizás; pero es más justo suponer que ni él mismo sabe por qué.
Yo he
sido más de una vez víctima de esas crisis y de esos ímpetus que nos autorizan
a creer que Demonios traviesos se cuelan en nosotros y, sin que nos demos
cuenta, nos hacen llevar a cabo sus más absurdas voluntades.
Una
mañana me levanté huraño, triste, cansado por el ocio e impulsado, según me
parecía, a hacer algo grande, una acción inesperada; y, ¡por desgracia!, abrí
la ventana.
(Observen,
se lo ruego, que el espíritu de mistificación que en ciertas personas no es el
resultado de un trabajo o de una artimaña, sino de una inspiración fortuita,
participa en mucho, aunque más no sea por el ardor del deseo, de ese humor,
histérico según los médicos, satánico según aquellos que piensan un poco mejor
que los médicos, que nos impulsa sin resistencia a un sinnúmero de acciones
peligrosas e impropias.)
La
primera persona que vi en la calle fue un vidriero, cuyo grito penetrante, desafinado,
llegó hasta mí atravesando la densa y sucia atmósfera parisina. Me resultaría
imposible decir por qué fui presa, contra ese pobre hombre, de un odio tan
repentino como despótico.
— “¡Eh,
eh!”, y le grité que subiera. Mientras tanto yo reflexionaba, no sin cierta
alegría, que, como la habitación estaba en el sexto piso y la escalera era en
extremo estrecha, al hombre le costaría bastante subir y que, muchas veces, golpería
contra la pared las puntas de su frágil mercancía..
Al fin
apareció: examiné detenidamente todos sus vidrios y le dije: “¿Cómo, no tiene usted
vidrios de colores? ¿Vidrios rosados, rojos, azules, vidrios mágicos, vidrios
del paraíso? ¡Qué descaro el suyo! ¿Cómo se atreve a pasearse por barrios
pobres sin llevar, por lo menos, vidrios que hagan ver la vida hermosa?”. Y lo
empujé violentamente por la escalera, donde tropezó mientras protestaba.
Me
acerqué al balcón y agarré una pequeña maceta, y cuando el hombre volvió a
aparecer saliendo por la puerta, dejé caer perpendicularmente mi artefacto de
guerra sobre el borde posterior de los soportes de su carga; y, derribado por
el golpe, se le rompió del todo bajo la espalda su pobre fortuna ambulante, que
hizo el ruido estridente de un palacio de cristal partido por el rayo..
Y, embriagado
por mi locura, le grité furiosamente: “¡La vida hermosa! ¡La vida hermosa!”.
Estas bromas nerviosas no carecen de riesgos y a menudo pueden pagarse caras. Pero ¿qué le importa la eternidad de la condena a quien halló en un segundo lo infinito del goce?
Traducción,
para Literatura & Traducciones, de Miguel Ángel Frontán
Nota, para la edición italiana más bajo citada, de Massimo Colesanti:
Publicado en La Presse, el 26 de agosto de 1862. Se cuenta entre los poemas en
prosa más complejos y famosos, tanto por el fenómeno analizado y descrito como
por la estructura literaria, que, en nuestra opinión, es lo más importante. El
texto que sin duda inspiró a Baudelaire es el cuento de Poe The Imp of the Perverse (1845),
traducido por Baudelaire en 1854: el impulso irracional “estudiado” es el
mismo, como también lo es la estructura del cuento de Poe, que primero trata
extensamente el fenómeno en sí, y luego da un ejemplo de un caso, narrado en
primera persona. Pero las similitudes o analogías se detienen ahí: Baudelaire
también da ejemplos en la parte teórica, que es más breve, y técnica y
literariamente más elaborada e imaginativa; así, el ejemplo que narra en la
segunda parte, también aquí en primera persona, está más en consonancia con el
discurso preliminar, es un impulso real súbito, inmediato, irracional, y
representado con irónica vitalidad, mientras que el narrador de Poe, que ha
asesinado premeditadamente a un hombre, y disfrutado impunemente de su herencia
durante años, confiesa finalmente su crimen presa de una crisis obsesiva que
también ha madurado gradualmente. Finalmente, Poe parece atribuir el fenómeno
más bien al encanto del mal y del pecado (“actuamos sólo porque no debemos”),
Baudelaire lo atribuye a motivaciones en todo caso incontrolables, histéricas o
satánicas, pero no exentas de una especie de mistificación sádica y de goce
efímero pero intenso (véase para todo el asunto el ensayo de A. Pizzorusso, Le Mauvais Vitrier: l'impulso sconosciuto,
en Da Montaigne a Baudelaire, pp.
261-283). Además, el propio título es desconcertante y equívoco: el vidriero no
es malo, pero es malo para el narrador, que se ve empujado a verlo así, que
debe verlo así en su impulso obsesivo. En cuanto a la relación con el poema de
Houssaye, composición de lacrimosa filantropía romántica, es inexistente, del
mismo modo que es algo del todo legendario que Baudelaire cometiera realmente
un acto semejante.
IX
THE BAD GLAZIER
There are natures purely
contemplative, completely unsuited for action,
who nevertheless, under mysterious unknown impulses, act sometimes with a rapidity of which they would
suppose themselves incapable.
Those for instance who, afraid
their concierge may have bad news for
them, pace an hour timorously before daring to go in; those who hold letters for two weeks before opening
them, or wait six months to take some
step that has been immediately necessary for a year already— but sometimes abruptly feel precipitated into
action by an irresistible force, like an
arrow leaving the bow. Moralists and doctors,
who claim to know everything, fail to explain from whence so sudden a mad energy comes to these lazy, voluptuous
souls and why, incapable of the simplest
and most necessary things, they find at certain
moments a spurt of first class courage to execute the most absurd and even most dangerous actions.
A friend of mine, as harmless a
dreamer as ever was, one day set a forest
on fire, in order to see, he said, if a fire would catch as easily as generally claimed. Ten times the experiment
failed; but the eleventh it was all too
successful.
Another lit a cigar next to a
powder keg, to see, to see if, to tempt fate,
to force himself to prove his own energy, to gamble, to feel the pleasures of anxiety, for nothing, caprice,
to kill time.
This sort of energy springs from
ennui and reverie; and those in whom it
so unexpectedly appears are in general, as I have said, the most indolent and dreamy of mortals.
Another, timid to the extent of
lowering his eyes before anybody’s gaze,
to the point of having to pull together his poor will to enter a café or go past the ticket office of a
theater (where the managers seem to him
invested with the majesty of Minos, of Aeacus and of Rhadamanthus) will all of
a sudden fall on the neck of some geezer and
embrace him enthusiastically, to the astonishment of passers-by.
Why? Because . . . because of an
irresistibly sympathetic physiognomy? Maybe,
but we may well suppose that he himself has no idea.
More than once I have been victim
to these crises, these outbursts, that
give some authority to the notion that malicious Demons slip into us and make us unwittingly accomplish their
most absurd wishes.
One morning I got up on the wrong
side, dejected, worn out from idleness,
driven it seemed to me to perform some grand, some brilliant action. And, alas! I opened the window.
(Please note that the urge to
practical jokes, in certain persons, the
result neither of work nor planning, but of mere chance inspiration, belongs largely, even if only through the
eagerness of desire, to that temper—hysterical
according to doctors; by rather better minds than a doctor’s, satanic—which drives us
irresistibly towards a host of dangerous
or indecent acts.)
The first person I noticed in the
street was a glazier whose cry, piercing,
discordant, came up to me through the oppressive and dirty Parisian atmosphere. Impossible for me to say
why this poor fellow roused in me a
hatred as sudden as despotic.
“—Hey there!” and I yelled for
him to come up, meanwhile reflecting, not
without amusement, that, my room being on the sixth floor and the stairs very narrow, the man
would find it difficult to effect his
ascent, to maneuver at certain spots the corners of his fragile merchandise.
Finally he appeared: I examined
curiously all his glass and said to him:
“What? you have no colored glass? pink, red, blue glass, magical glass, the glass of paradise? Shameful! you
dare promenade this poor district and
you don’t even have glass to suggest a better life!” And I pushed him smartly towards the
staircase where he stumbled growling.
I went to the balcony, picked up
a little pot of flowers, and when the
man came out of the door below, I let my war machine fall straight down, onto the edge of his hooks. The shock
sending him over backwards, he smashed under his back the whole petty fortune
he carried, from which burst the sound of a crystal palace shattered by a bolt
of lightning.
And, drunk with my folly, I
shouted at him, madly, “The beauty of life!
the beauty of life!”
These nervous pleasantries are not without danger, and sometimes quite costly. But what’s an eternity of damnation to one who has found in such an instant infinite satisfaction?
Translated by KEITH WALDROP
IX
IL CATTIVO VETRAIO
Esistono nature puramente
contemplative e assolutamente negate all’azione, le quali tuttavia, per uno
stimolo misterioso ed ignoto, a volte agiscono con una rapidità di cui loro
stesse si sarebbero ritenute incapaci.
Quello che per timore di trovare
dal portiere una dolorosa notizia gironzola vilmente per un’ora davanti al
portone senza avere il coraggio di rincasare, quello che si tiene in tasca per
quindici giorni una lettera senza aprirla o che solo dopo sei mesi si rassegna
a compiere un atto necessario già da un anno, si sentono a volte
improvvisamente sospinti verso l’azione da un’irresistibile forza, come la
freccia di un arco. Il moralista e il medico, che pretendono di saper tutto,
non sanno spiegarsi da dove derivi così all’improvviso una simile folle energia
a certe anime pigre e voluttuose e come, incapaci di compiere le cose più
semplici e necessarie, a un certo momento esse trovino tanta carica di coraggio
da eseguire le azioni più assurde e spesso più pericolose.
Un mio amico, il più innocuo
sognatore di questo mondo, una volta dette fuoco ad un bosco per vedere,
diceva, se il fuoco prende con la facilità che si dice. L’esperimento fallì
dieci volte in seguito, ma l’undicesima riuscì fin troppo bene.
Un altro accenderà un sigaro
accanto ad un barile di polvere, così, tanto per vedere, per sapere, per
tentare il destino, per costringersi a dar prova di energia, per rischiare come
un giocatore, per conoscere i piaceri dell’ansia, per nulla, per capriccio,
perché non sa che fare.
E una specie di energia che
scaturisce dalla noia e dalla fantasticheria; le persone nelle quali essa si
rivela così impensatamente sono in genere, come ho detto, gli individui più
indolenti e sognatori.
Un altro, timido al punto di
abbassare gli occhi anche davanti allo sguardo degli uomini e di dover
concentrare tutta la sua povera volontà per entrare in un caffè o per passare
davanti all’ingresso di un teatro, dove i biglettai gli sembrano investiti
della maestà di Minosse, di Eaco e di Radamanto, eccolo improvvisamente saltare
sul collo d’un vecchio che gli passa accanto e abbracciarlo con entusiasmo
davanti alla folla stupita.
Perché? Perché... perché quella
fisionomia gli riusciva irresistibilmente simpatica? Forse; ma è più logico
supporre che neanche lui sappia il perché.
Più di una volta sono stato
vittima di quelle crisi e quegli slanci, che ci autorizzano a supporre che
Demoni maliziosi si insinuino in noi e ci facciano compiere, a nostra insaputa,
le loro più assurde volontà.
Una mattina m’ero alzato di
malumore, triste, stanco di oziare e spinto, mi sembrava, a fare qualcosa di
grande, un’azione eccezionale; e aprii la finestra, ahimè!
(Vi prego di osservare come lo
spirito di mistificazione, che in certe persone non è il frutto di un lavoro o
di una combinazione, ma di una fortuita ispirazione, molto dipenda, se non
altro per l’ardore del desiderio, da quell’umore che i medici definiscono
isterico, e satanico quelli che pensano un po’ meglio dei medici, il quale ci
spinge inevitabilmente verso una serie di azioni pericolose e sconvenienti).
La prima persona che vidi in
strada fu un vetraio; il suo grido acuto e stridulo salì fino a me attraverso
la greve e sudicia atmosfera parigina. Peraltro non saprei proprio perché
provai verso quel pover’uomo un odio improvviso e dispotico.
«Ehi! Ehi!» e gli gridai che
salisse. Nel frattempo riflettevo, con una certa allegria, che essendo la
camera al sesto piano e la scala molto stretta, l’uomo avrebbe faticato un po’
per salire e avrebbe urtato più volte con gli spigoli della sua fragile
mercanzia.
Finalmente comparve: esaminai con
curiosità tutti i suoi vetri e gli dissi: «Come! Non avete vetri colorati?
Vetri rosa, rossi, azzurri, vetri magici, vetri di paradiso? Impudente! E avete
la sfrontatezza di andare in giro per i quartieri poveri senza neppure un vetro
che faccia veder bella la vita!». E lo spinsi con forza verso la scala, dove
inciampò brontolando.
M’avvicinai al balcone, afferrai
un vasetto di fiori e quando l’uomo ricomparve sulla soglia del portone, feci
cadere perpendicolarmente il mio arnese da guerra sull’orlo posteriore del suo
carico; ruzzolato in terra per l’urto, il vetraio finì per mandare in mille
pezzi sotto la schiena tutta la sua povera fortuna ambulante, che fece il
fragoroso rumore di un palazzo di cristallo infranto dal fulmine.
Ebbro di follia, gli urlai
furiosamente: «La vita bella! La vita bella!».
Certi scherzi nervosi non sono
esenti da pericoli, e spesso si pagano cari. Ma che importa l’eternità della
dannazione a chi ha trovato in un secondo l’infinito del piacere?
Tradución de MASSIMO COLESANTI